Homélie pour la solennité de Notre-Dame du Perpétuel Secours
Homélie pour la solennité de Notre-Dame du Perpétuel Secours
Patronne d’Haïti
Mardi 27 juin 2023
Père Diesel PHAT
1. Célébrer la Vierge Marie sous le vocable de Notre-Dame du Perpétuel Secours, c’est « proclamer Dieu admirable dans le triomphe de tous les saints », c’est dire « la grandeur de sa bonté » pour avoir fait « des merveilles pour la terre entière » et étendu « sa miséricorde à tous les âges » en choisissant son humble servante pour donner au monde le Sauveur, son Fils, le Seigneur Jésus Christ, résume la 2epréface de la bienheureuse Vierge Marie. Cela est d’autant plus vrai pour nous. Nous reconnaissons un signe éclatant de la miséricorde de Dieu pour le peuple haïtien en célébrant la solennité de Notre-Dame du Perpétuel Secours. Depuis 1942, le pays tout entier est consacré à la protection maternelle de la Bienheureuse Vierge Marie sous ce vocable. Depuis lors, chaque 27 juin, par cette solennité propre à Haïti, le peuple haïtien ne cesse pas de rendre grâce à Dieu en se rappelant le miracle de 1882, quand une grave épidémie de petite vérole sévissant à Port-au-Prince disparut soudainement grâce à l’intercession de Notre-Dame du Perpétuel Secours. Ici au Séminaire la joie est double : en cette solennité qui concerne toute l’Église locale et du pays entier, nous la vénérons aussi comme la Patronne principale de notre communauté éducative. Nous aussi, avec une particularité propre, nous prenons la Vierge chez nous. Nous lui donnons une place particulière dans notre vie, dans l’organisation même de la vie communautaire que nous menons ici. Marie nous assure un secours perpétuel, c’est-à-dire elle est toujours là pour nous faire entrer plus avant dans le projet de son Fils en tant qu’elle nous défend contre tout ennemi subtil capable de nous affaisser et nous affaiblir en chemin.
2. Marie a participé à l’œuvre historique de son Seigneur, son propre Fils. La célébrer sous le vocable de « Notre-Dame du Perpétuel Secours », c’est la considérer dans la gloire auprès de son Fils. C’est reconnaître qu’elle nous devance dans le cortège des élus et qu’elle accompagne nos prières pour que « nous obtenions un jour l’héritage promis ». Par cette solennité, nous affirmons sans détour, la médiation universelle de la bienheureuse Vierge Marie dans le don de la grâce. Unie à son Fils dans la chair, elle ne cesse de l’être également dans la gloire. Marie a connu une proximité inouïe, sans égale avec son Fils sur la terre et elle continue de le connaître au Ciel. En Jésus et Marie, cette parole de l’Écriture trouve son plein accomplissement : « Ce que Dieu a uni, que l’homme ne le sépare pas » (Mc 10, 6). Marie est « Perpétuel Secours », parce qu’elle est unie pour toujours à son Fils. Au pied de la croix, le Christ nous l’a donné pour mère. Une mère bienveillante, compatissante, aimante, qui veille sur nous. Elle déverse continuellement sa grâce sur nous. Nous sommes un peuple béni et aimé.
3. Célébrer Marie sous le vocable de « Notre Dame du Perpétuel Secours » nous porte à professer que Jésus, l’unique Médiateur, est la Voie de notre prière, et que, Marie, la pure transparence du Christ, nous montre la voie, le chemin à suivre : « Tout ce qu’il vous dira, faites-le » disait-elle aux serviteurs à Cana de Galilée. Il y a une véritable coopération de Marie à l’action de l’Esprit Saint en notre faveur. L’intercession de Marie en notre faveur est indépassable et irréductible parce qu’elle est toujours portée par et dans l’Esprit qui fait de Marie « la trésorière des grâces de Dieu », « Notre-Dame du Perpétuel Secours ». Elle marche à la tête du cortège des élus pour accompagner les hommes et les femmes de ce monde, en particulier le peuple haïtien, vers le salut de Dieu. Et, nous pouvons le dire avec l’assurance de notre foi : « La grâce de Marie fut tellement abondante qu’elle a rejailli sur l’humanité tout entière ». Elle continue de la rejaillir sur la terre d’Haïti qui connaît encore des moments douloureux. Aujourd’hui encore, nous avons besoin de tourner notre regard vers la Vierge Marie pour invoquer sa protection avec une grande confiance pour nous guérir de tous les maux qui constituent la « vérole » de la société haïtienne. Car nous le savons et nous le confessons : elle est véritablement, la Mère du peuple haïtien. Dans tous les dangers, elle nous protège. La Vierge Marie aime notre pays. Avec elle, nous pouvons espérer le relèvement de ce pays qui deviendra la lumière des nations. Avec elle, un jour, Haïti fera saliver les potentats et deviendra terre hospitalière, terre nourricière, terre d’accueil pour ceux et celles qui auront cherché une vie meilleure, calme et digne. D’ailleurs, l’icône que nous vénérons, présente Marie et Jésus sur fond d’or. Au-delà de la Passion brille la lumière de la Résurrection : par son Fils, la Mère du Rédempteur nous invite à communier à la Gloire de Dieu. Notre-Dame du Perpétuel Secours montre Marie associée intimement à l’œuvre de Rédemption de son Fils, comme Médiatrice de Vie. Ce n’est pas banal si l’icône que nous vénérons présente Marie et Jésus sur ce fond d’or. L’or symbolise la richesse et la spiritualité profonde. C’est bien cela qui caractérise la vie de notre peuple. Nous sommes un peuple riche de tout. Et cela sera mis en lumière le jour où chaque haïtien comprendra son identité et le trésor qui est caché en lui-même, le jour où chaque haïtien décidera d’accomplir sa naissance et d’aimer son pays, ses ancêtres, ses valeurs culturelles et spirituelles. Pour cela, il est bon de recevoir, comme le disciple bien-aimé, cette parole de Jésus : « Voici ta mère ».
4. « Notre-Dame du Perpétuel Secours » qui peut être appelée aussi « Notre-Dame de la Passion », dans diverses occasions de notre histoire, a fait en quelque sorte sentir sa présence et nous accompagner. Elle est notre Mère. Elle veille sur chacun de nous. Elle nous porte dans ses bras protecteurs. Oui, « après le Christ glorifié, intronisé pour toujours à la droite du Père, nul n’est mieux placé que Marie pour intercéder en notre faveur »[1]. L’intercession de la Vierge Marie en notre faveur jouit d’une efficacité particulière puisqu’elle émane de son grand amour. Nous reconnaissons sa douceur et son autorité. Comme Mère et perpétuel secours, elle est à fois servante et reine. Le chant d’entrée en célébration nous l’a bien montré. Elle commande : « Ut mater imperat ». Elle rayonne sa royauté en nous servant et en nous aimant. Elle nous donne tout ce qu’elle possède. Marie n’a rien gardé pour elle-même. La vénérer comme « Notre-Dame du Perpétuel Secours », c’est reconnaître qu’elle nous donne de participer même à ses privilèges. Elle « s’offre à nous comme la mère toujours proche et disponible, prête à tout entendre et à tout comprendre, dispensatrice de toute grâce, secourable en tout »[2]. Marie vient à notre secours dans le combat spirituel et notamment à l’heure de l’adversité et de notre mort. Si nous restons seulement aux germes de mort qui enlaidissent notre pays, nous ne pourrons pas découvrir la vitalité et la force secourables de notre Sainte Patronne, Notre-Dame du Perpétuel Secours. Il nous faut la confiance en elle comme la protectrice face à tout danger : « Sous ta miséricorde nous nous réfugions, sainte Mère de Dieu. Ne méprise pas nos supplications dans les besoins, mais libère-nous du danger, seule pure, seule bénie » prions-nous souvent. Cette Mère comble tout besoin et écarte toute menace, c’est vraiment la Mère parfaite. Elle accueille nos demandes et éduque nos désirs. Elle nous prend là où nous en sommes pour nous faire faire le pas qui est possible. Mais quelque soit notre demande, le souci premier de notre Sainte Patronne, est de nous conduire à une relation intime, confiante et personnelle avec Dieu « le Père de notre Seigneur Jésus Christ, le Père des miséricordes et le Dieu de toute consolation » (2 Co 1, 3).
5. Vénérer ou célébrer Marie sous le vocable de « Notre-Dame du Perpétuel Secours », c’est reconnaître que ses privilèges ne la tiennent à distance de nous, mais au contraire ils la rendent proche de chacun de nous. Elle est de notre race, elle se solidarise avec nous, elle est notre véritable sœur. Elle porte en son cœur maternel toute la fidélité de l’Église et la miséricorde du Sauveur. Dans l’Évangile de ce jour, Marie, sans être nommée, est désignée cinq fois par le titre de « mère » (Jn 19, 25-27). C’est bien cette maternité que Jésus confirme quand il l’appelle « femme », comme à Cana : la femme (isha), la nouvelle Ève, la mère des vivants. Elle est également la parfaite croyante. Elle exprime par sa présence au pied de la croix de Jésus l’obéissance de sa foi et la certitude de son espérance.
6. Nous sommes tous appelés à être frères et sœurs et disciples parfaits, nous sommes tous confiés à Marie. Elle connaît nos besoins et elle les présente au Christ ; elle connaît les desseins du Christ et elle nous invite à les suivre. Jésus se refugiant dans les bras de sa Mère, nous apprend, à travers l’icône du Perpétuel Secours, que le cœur maternel de Marie est notre refuge assuré, perpétuellement offert à nos craintes et à nos peines. Ses mains abandonnées entre les mains de Marie nous disent que celles-ci disposent de sa toute-puissance.
O sainte Vierge Marie, qui, pour nous inspirer une confiance sans bornes, as voulu prendre le nom si doux de Mère du Perpétuel Secours, nous te supplions de nous secourir en tout temps et en tout lieu: dans nos tentations, après nos chutes, dans nos difficultés, dans toutes les misères de la vie et surtout au moment de notre mort. Donne-nous, ô charitable Mère, la pensée et l'habitude de recourir toujours à toi; car nous sommes sûrs que, si nous t’invoquons fidèlement, tu seras fidèle à nous secourir. Procure-nous donc cette grâce des grâces, la grâce de te prier sans cesse et avec la confiance d'un enfant, afin que, par la vertu de cette prière fidèle, nous obtenions ton Perpétuel Secours et la persévérance finale. Bénis-nous, bénis Haïti, ton royaume, ô tendre et secourable mère, et prie pour nous, maintenant et à l'heure de notre mort. Amen.
Grand Séminaire Notre-Dame / Section de la Philosophie
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