COURS DE PASTORALE LITURGIQUE ET SACRAMENTELLE

GRAND SÉMINAIRE NOTRE-DAME

SECTION DE THÉOLOGIE

 

 

 

Pratiques liturgiques et pastorales

Approche théologique et spirituelle pour la mise en œuvre  

de la Pastorale liturgique et sacramentelle

 

 

 

 

 

 

 

 

NOTES DE COURS

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Diesel PHAT, professeur

Contact : dieselphaiti@yahoo.com/ p.diesel.haiti@gmail.com

 

 

 

2022-2023

Fiche  pédagogique

Problématique du cours :

 

La question du bon usage des normes en liturgie n’est pas seulement d’ordre théologique et spirituelle. Elle est aussi d’ordre pastoral. On ne peut pas réduire la liturgie à une simple question de rubrique, de règles et de pratiques à observer. Il faut savoir entrer dans son intelligence pour déployer des propositions liturgiques ajustées aux multiples occasions de célébrer le Mystère pascal du Christ dans la quotidienneté de la vie chrétienne. Du point de vue pastoral, on ne peut pas la dissocier des sacrements. D’où l’importance de la Pastorale liturgique et sacramentelle. Mais, lorsqu’on analyse ou observe les pratiques liturgiques et pastorales en Haïti, on peut se demander si l’esprit de la réforme liturgique du concile Vatican II n’est pas déjà oublié, voire même complètement ignoré par certains. Ce cours plaidera en faveur d’une théologie pastorale qui reconnaisse la place centrale de la liturgie et des sacrements dans la vie de l’Église et du chrétien en scrutant les textes magistériels et les travaux des théologiens de la liturgie et des sacrements en lien avec l’expérience pastorale d’un pasteur qui s’adresse modestement à des candidats se préparant à la mission de pastoration dans l’Église d’Haïti. 

 

 

Compétences à acquérir :

 

·      Être capable d’utiliser les rituels et le Missel romain issus de la réforme de Vatican II concernant la liturgie et les sacrements ;

·      Situer les enjeux théologiques et pastoraux des pratiques liturgiques et sacramentelles actuelles ;

·      Comprendre et expliciter la situation liturgique et pastorale d’une communauté paroissiale ;

·      Comprendre et interpréter les sources historiques et juridiques en matière du droit liturgique ;

·      Comprendre et expérimenter la vie liturgique et sacramentelle comme un lieu de maturation chrétienne ;

·      Être capable de percevoir la liturgie et les sacrements comme une discipline théologique relevant de la théologie positive, la théologie systématique, la théologie dogmatique et la théologie pratique ;

·      Être capable de promouvoir des pratiques liturgiques et pastorales qui intègrent la fragilité par mode de « gradualité » : accompagner, discerner et intégrer ;

·      Exercer un discernement théologique et ecclésiologique sur les pratiques liturgiques et pastorales haïtiennes autour de la célébration des sacrements. 

 

Pédagogie et méthodologie :

 

Par des présentations magistrales, des analyses de célébrations sacramentelles, du travail sur les Rituels et le Missel romain, sur des textes et des formulaires liturgiques, le cours offrira aux étudiants la possibilité de développer l’esprit d’analyse et la sensibilité liturgique et théologique. La méthode voir, juger et agir sera applicable pour l’ensemble du cours. Cela demandera aux étudiants d’être plus pratiques car ils auront à présenter une célébration sacramentelle qu’ils auront observée et sur laquelle ils réagiront en présentiel.  

 

 

 

Mode d’évaluation :

 

Une diversité de mode est proposée : 

·      Présentation et analyse d’une pratique ou d’une célébration sacramentelle dans une paroisse;

·      Exercice d’une célébration sacramentelle, en particulier baptême et eucharistie ;

·      Rédaction d’une fiche de lecture, d’un ouvrage ou d’un document de théologie sacramentaire  (il faut présenter l’ouvrage ou le document et le plan au professeur avant de commencer à rédiger : 3 pages maximum : interligne 1.5, police taille 12) ; 

·      Un examen oral/15 minutes où l’étudiant abordera une question de pratiques liturgiques ou sacramentelles en tenant compte de l’ensemble du cours.

 

 

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PLAN DU COURS

 

 

Introduction

 

1. La pastorale liturgique

 

1.1. La mission

1.1.1.     La mission prophétique

1.1.2.     La mission sacerdotale

1.1.3.     La mission royale

 

1.2. La pastorale

1.2.1. Une image biblique

1.2.2. Une organisation de l’activité de l’Église

 

1.3La pastorale liturgique et sacramentelle

1.3.1. Élucider les écueils 

·      La réduction du culte à l’accomplissement d’obligations rituelles.

·      Réduction de la liturgie au cérémonial.

·      Les sacrements présentés comme des moyens quasi automatiques du don de la grâce de Dieu.

 

1.3.2. Objet de la pastorale liturgique

·      Donner au peuple chrétien d’exercer le sacerdoce commun des baptisés

·      Permettre aux baptisés de vivre leur lien au Christ Seigneur

·      Offrir à chaque membre de la communauté chrétienne les moyens d’honorer sa vocation baptismale personnelle

·      Œuvrer pour faire de l’Église une épiphanie de Dieu

 

 

2. Le champ de la pastorale liturgique

 

2.1. Pour une vision juste

2.1.1. Dieu – l’homme – l’Église

·      La présence et l’absence de Dieu

·      La présence de l’homme concret

·      L’Église dans sa forme concrète

2.1.2. Passé – présent – avenir 

 

2.2. Pour une exploration du champ de la pastorale liturgique

2.2.1. L’accueil et l’accompagnement

2.2.2. L’assemblée

2.2.3. La célébration 

2.2.4. L’espace et le temps

 

3. La pastorale des sacrements

 

3.1. La signification des sacrements

3.2. Sacrements de la vie nouvelle

3.3. Une vie en Christ

3.4. Une vie en croissance

 

4. Les structures de la pastorale liturgique et sacramentelle

 

4.1. La structure paroissiale

4.2. La structure diocésaine

4.3. La structure nationale

 

 

5. Regard d’un pasteur sur le rapport aux normes liturgiques[1]

 

5.1. La diversité des rapports à la norme

 

5.1.1. Le rapport à l’espace liturgique

5.1.2. Le rapport aux normes données par les Rituels

5.1.3. Les personnes dans leur rapport à la liturgie et entre elles

5.1.4. Une norme? Des normes?

 

5.2. Questions liturgiques et ecclésiologiques

 

5.2.1. L’organisation de la vie liturgique des paroisses

5.2.2. La formation liturgique et ecclésiologique des acteurs

5.2.3. Trop de personnalisation 

5.2.4. La liturgie vécue comme une dévotion personnelle

 

5.3. Quelques repères pour le ministère de pasteur

 

5.3.1. Un pragmatique

5.3.2. Un mystagogue

5.3.3. Un catéchète

5.3.4. Un liturge 

5.3.5. Un pédagogue et un homme de communion

 

6. L’art de célébrer

 

6.1. Célébrer: un art

6.1.1. Quid de l’art de célébrer?

6.1.2. La mise en œuvre du concile Vatican II

6.1.3. La liturgie, épiphanie de l’Église

6.1.4. S’exercer à l’art de la composition

6.1.5. Pour une participation fructueuse

 

6.2. Célébrer avec la musique et le chant

6.2.1. La musique liturgique

6.2.2. L’art de célébrer de tout son corps par le chant

 

6.3. Célébrer dans l’espace liturgique

6.3.1. L’art de célébrer dans un lieu

6.3.2. Le lieu de l’assemblée

6.3.3. Un espace vivant à habiter

 

6.4. Importance et dignité de la célébration eucharistique

 

6.5. La structure de la messe, ses éléments et ses parties

6.5.1. Structure générale de la messe

6.5.2 Les divers éléments de la messe

·      La lecture et l’explication de la Parole de Dieu

·      Les oraisons et les autres parties qui reviennent au prêtre

·      Les autres formules dans la célébration

·      Les façons de prononcer les différents textes

·      L’importance du chant

·      Les gestes et les attitudes du corps

·      Le silence 

6.5.3. Les différentes parties de la messe

·      Rites initiaux

-       Le chant d’entrée (l’Introït)

-       La salutation à l’autel et au peuple rassemblé

-       L’acte pénitentiel

-       Le Kyrie eleison 

-       Le Gloria in excelsis

-       La prière d’ouverture (Collecte)

 

·      Liturgie de la Parole

-       Le silence

-       Les lectures bibliques

-       Le psaume responsorial

-       L’acclamation avant l’Évangile

-       L’homélie

-       La profession de foi

-       La prière universelle

 

·      Liturgie eucharistique

-       La préparation des dons

-       La prière sur les offrandes

-       La prière eucharistique

-       Les rites de communion

-       L’oraison dominicale

-       Le rite de la paix

-       La fraction du pain

-       La communion

 

·      Rites de conclusion

 

7. L’intelligence des Rituels

 

7.1. Le Rituel de l’initiation chrétienne des adultes

7.1.1. Notes doctrinales et pastorales

7.1.2. Structure de l’initiation chrétienne

 

7.2. Le Rituel du baptême des petits enfants

7.2.1. L’enseignement de la Parole de Dieu

7.2.2. La célébration 

·       L’accueil

·       Liturgie de la Parole

·       Au baptistère

·       À l’autel

 

7.3. Rituel de la célébration de la pénitence et de la réconciliation

7.3.1. Orientations doctrinales et pastorales

7.3.2. Célébration du sacrement

·       S’accueillir mutuellement

·       Écouter la Parole de Dieu

·       Confesser l’amour de Dieu en même temps que son péché

·       Accueillir le pardon de Dieu pour en être témoin

 

7.4. Rituel de la célébration des sacrements pour les malades

7.4.1. Notes doctrinales et pastorales

7.4.2. Célébration du sacrement

·       La rencontre

·       Démarche pénitentielle

·       Liturgie de la Parole

·       Liturgie du sacrement

 

7.5. Rituel de la célébration du mariage

7.5.1. Les praenotanda

7.5.2. La célébration du sacrement

·       Accueil

·       Liturgie de la Parole

·       Liturgie du sacrement

·       Liturgie eucharistique (la forme typique)

 

8. Exercice de célébration sacramentelle

 

8.1. Célébration eucharistique (pratique en petit groupe)

8.2. Célébration de baptême  (pratique en petit groupe)

 

Conclusion

 

 

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BIBLIOGRAPHIE

 

A. Livres liturgiques

 

01. Missel romain

02. HosannaNouveau Missel biblique, Paris, Tardy, Droguet-Ardant, C.M.R., 1986. 

04. Les Moines de SolesmesMissel grégorien des dimanches noté en chant grégorien, Solesmes, 1985. 

05. Association épiscopale de liturgie pour les pays francophonesRituel de l’initiation chrétienne des adultes, Paris, AELF, 1974, 1997.

06. Association épiscopale de liturgie pour les pays francophones, Célébrer la Pénitence et la Réconciliation (Rituel), Paris, AELF, 1978, 1991. 

07. Association épiscopale de liturgie pour les pays francophones, Rituel du baptême des enfants en âge de scolarité, Paris, AELF, 1977.

08. Association épiscopale de liturgie pour les pays francophones, Rituel romain de la célébration du mariage, Paris, AELF, 1970, 2005.

09. Association épiscopale de liturgie pour les pays francophones, Sacrements pour les malades (Rituel), Paris, AELF, 1977. 

 

B. Sources liturgiques

 

10. Association épiscopale de liturgie pour les pays francophones, L’art de célébrer la Messe. Présentation générale du Missel romain, 3e édition typique 2002, Paris, Desclée-Mame, 2008. 

11. CNPL/Service national du catéchuménatGuide pastoral du Rituel de l’initiation chrétienne des adultes, Paris, Cerf, « Guides Célébrer » 8, 2000. 

12. Centre national de pastorale liturgiqueDu bon usage de la liturgie, Paris, Cerf, « Guides Célébrer » 4, 1999. 

13. Centre national de pastorale liturgiqueL’art de célébrer, t. 1, Paris, Cerf, « Guides Célébrer » 9, 2003. 

14. Centre national de pastorale liturgiqueL’art de célébrer, t. 2, Paris, Cerf, « Guides Célébrer » 10, 2003. 

15. Vatican II, Constitution sur la liturgie, Sacrosanctum Concilium.

 

 

C. Études

 

16. Bouyer Louis, La vie de la liturgie, Paris, Cerf, 1956. 

17. Bricout Hélène (dir.), Du bon usage des normes en liturgie, Paris, Cerf, « Lex Orandi, nouvelle série » 9, 2020.

18. Bricout Hélène, « La vie sacramentelle, un lieu de maturation chrétienne », Revue d’éthique et de théologie morale, N° 294 / Juin 2017, 31-47.

19. Bricout Hélène, Le mariage entre consentement et bénédiction. Le sacrement et son ministre, Paris, Cerf, « Lex orandi » 4, 2015.

20. Bricout Hélène et Prétot Patrick (dir.), Faire pénitence, se laisser réconcilier, Paris, Cerf, 2013. 

21. Bugnini Annibale, La réforme de la liturgie, Paris, Desclée de Brouwer, 2015.

22. Chauvet Louis-Marie et De Clerck Paul (dir.), Le sacrement du pardon, entre hier demain, Paris, Desclée, « Culte et Culture », 1993.

23. Chauvet Louis-Marie, Les sacrements, paroles de Dieu au risque du corps, Paris, Éditions Ouvrières, « Vivre, croire, célébrer », 1993.

24. Chauvet Louis-Marie, Du symbolique au symbole. Essai sur les sacrements, Paris, Cerf, « Rites et symboles » 9, 1979.

25. Chauvet Louis-Marie, Le corps, chemin de Dieu. Les sacrements, Paris, Bayard, 2010.

26. Chauvet Louis-Marie, Symbole et sacrements. Une relecture sacramentelle de l’existence chrétienne, Paris, Cerf, « Cogitatio fidei » 144, 1987, 2011.

27. Centre National de la Pastorale Liturgique, Exultet. Encyclopédie pratique de la liturgie,  Louis-Michel Renier(dir.), Paris, Bayard, 2000. 

28. Congar Yves et Jossua Jean-Pierre (dir.), La liturgie après Vatican II, Paris, Cerf, « Unam Sanctam » 66, 1967.

29. Cuva Armando, « Droit canonique : la liturgie dans le code de 1983 », Dictionnaire encyclopédique de la liturgie, t. 1, Brepols, 1992, 283-290.

30. Cuva Armando, « Droit liturgique », Dictionnaire encyclopédique de la liturgie, t. 1, Brepols, 1992, 290-298. 

31. De Clerck Paul, L’Intelligence de la liturgie, Paris, Cerf, « Liturgie » 4, 19953.

32. De Clerck Paul, Vivre et comprendre la messe, Paris, Cerf, 2016, 51-104.

33. Favreau François, Liturgie, Paris, Desclée, 1983. 

34. Favreau François, « La pastorale liturgique », Gélineau Joseph (dir.), Dans vos assemblées, manuel de pastorale liturgique, Volume I, Paris, Desclée, 1989, 15-31.

35. Gazzola Isaïa, « La célébration du mystère chrétien dans la liturgie », La liturgie, une piété moderne, Jean-Louis Souletie (dir.), Paris, Salvator, 2016, p. 129-151.

36. Gitton Michel, Initiation à la liturgie romaine, Paris, Ad Solem, 2003.

37. Guardini Romano, L’Esprit de la liturgie, Éditions Parole et Silence, 2007.

38. Gélineau Joseph (dir.), Dans vos assemblées, manuel de pastorale liturgique, Volume I, Paris, Desclée, 1989.

40. Hameline Jean-Yves, Une poétique du rituel, Paris, Cerf, « Liturgie » 9, 1997.

41. Martimort Aimé-Georges, L’Église en prière. Introduction à la liturgie, Tournai (Belg.), Desclée & Co., 1961. 

42. Mazza Enrico, L’Action eucharistique, Paris, Cerf, « Liturgie » 10, 1999. 

43. Marini Guido (Mgr), La liturgie, gloire de Dieu, sanctification de l’homme, France, Artège, 2013.

44. Phat Diesel, « La célébration des fêtes patronales en Haïti, enjeux théologiques et pastoraux », Mémoire de licence canonique de théologie (Liturgie et théologie sacramentaire), Hélène Bricout (dir.), Paris, Institut Catholique de Paris, Theologicum, Faculté de Théologie et de Sciences Religieuses, Institut Supérieur de Liturgie, 2017.

45. Ratzinger Joseph, Liturgie et mission, Paris, Édition Artège, 2007.

46. Ratzinger Joseph, L’Esprit de la liturgie, Ad Solem, 2001.

47. Scouarnec Michel, Présider l’assemblée du Christ, peut-on se passer des prêtres, Paris, Les Éditions de l’Atelier/Éditions Ouvrières, « Recherches », 1996. 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

INTRODUCTION

 

Est-il possible de proposer la foi dans la liturgie ? C’est une question importante pour un cours sur « les pratiques liturgiques et pastorales ». Autrement dit, c’est une question qui concerne sans détour la Pastorale liturgique et sacramentelle. Car, « la liturgie rejoint les hommes d’abord par la qualité de sa pratique : le chant, l’architecture des lieux de culte, ou encore l’art de célébrer sont autant d’aspects qu’on ne peut considérer comme de simples éléments destinés à satisfaire les requêtes esthétiques de certains pratiquants »[2]. On ne peut pas penser une liturgie figée, rubricale et pompeuse si on veut prendre en compte les personnes, les situations, les circonstances et les besoins réels des communautés chrétiennes ou paroissiales. La liturgie est service pour Dieu en premier et, service pour l’homme au second. Il ne faut jamais opposer les deux dimensions : verticale (service de Dieu) et horizontale (service de l’homme). Elle vise la glorification de Dieu et la sanctification de l’homme. 

Qui a l’expérience des pratiques liturgiques et pastorales de nos communautés chrétiennes qu’elles soient diocésaines ou paroissiales ne peut pas ne pas souligner avec gravité « que la liturgie actuelle nous convoque à prendre au sérieux les besoins des hommes et des femmes qui s’adressent à l’Église, et à les inscrire dans le temps long du cheminement : en liturgie particulièrement, "le temps est supérieur à l’espace" »[3]. Ce qui est en jeu ici, c’est le cheminement spirituel des personnes qui nécessite parfois une certaine adaptation et une certaine approche qui rendent la liturgie proche des fidèles. Ce qui veut dire également qu’il faut envisager « le rapport et l’obéissance aux normes, en y intégrant un discernement qui nécessite une intelligence profonde de la liturgie, de ses rites et de ses prescriptions »[4]

Dans cette dynamique, le cours sur les pratiques liturgiques et pastorales s’évertuera à faire une sorte de mise au point de l’état de la question en puisant dans les ressources liturgiques, magistérielles et théologiques afin de permettre aux futurs pasteurs étudiants en théologie de profiter de ces ressources pour un discernement sur « les pratiques liturgiques et pastorales » en Haïti. Ainsi ils entreront mieux dans l’intelligence de la liturgie et verront comment elle implique une relation étroite et inséparable entre l’attention aux pratiques et les repères théologiques sans lesquels « les pratiques liturgiques et pastorales » manqueront de consistance ou d’assise théologique, spirituelle et anthropologique. Ils seront en mesure de puiser dans ce lieu source ou fondamental pour déployer des propositions liturgiques ajustées aux multiples occasions de célébrer le mystère chrétien.  Même si la liturgie est « le sommet auquel tend l’action de l’Église, et en même temps la source d’où découle toute sa vertu »[5] (culmen et fons), elle ne peut pas être réduite à des pratiques et à des normes. Le cours se répartit en 8 points sélectifs: La pastorale liturgique (I), Le champ de la pastorale liturgique (II), La pastorale sacramentelle (III), Les structures de la pastorale liturgique et sacramentelle (IV), Regard d’un pasteur sur le rapport aux normes liturgiques (V), L’art de célébrer (VI), L’intelligence des Rituels (VII), Exercice de célébration sacramentelle (VIII).

 

 

 

 

 

1. La pastorale liturgique

 

La liturgie est située au cœur du mystère de l’Église. Elle lui permet d’être « à la fois humaine et divine, visible et riche de réalités invisibles, fervente dans l’action et adonnée à la contemplation, présente dans le monde et cependant en chemin » (SC 2). Grâce à elle également, « ce qui est humain est ordonné et soumis au divin ; ce qui est visible à l’invisible ; ce qui relève de l’action à la contemplation ; et ce qui est présent à la cité future que nous recherchons » (SC 2). La liturgie crée l’équilibre dans l’ordre de ces réalités. Elle fortifie chaque jour les fidèles, alimente leur zèle missionnaire, et « montre l’Église à ceux qui sont dehors comme un signal levé sur les nations, sous lequel les enfants de Dieu dispersés se rassemblent dans l’unité jusqu’à ce qu’il y ait un seul bercail et un seul pasteur » (SC 2).

Ceci dit, nous pouvons de en toute évidence admettre que la liturgie est source de la pastorale. Elle ne peut pas être réduite à ensemble de rites à accomplir, elle est en même temps une pastorale puisqu’elle conduit les fidèles rassemblés en ecclesia orans à la communion avec Dieu et avec les hommes dans la logique même de l’Alliance. La liturgie est d’ordre pastoral puisqu’il s’agit de guider la communauté dans sa vie de prière, dans sa vie sacramentelle. Elle ne s’exerce pas « hors du contexte précis d’une communauté nécessitant une pastorale »[6]. La liturgie n’est pas une affaire de « diseurs de messe ». Elle implique un ars celebrandi qui sait conjuguer la théologie, les normes et la pastorale. Il y a une dimension pastorale des célébrations liturgiques à prendre en compte. Si la liturgie, en tant que culte rendu à Dieu (fin principale) est en même temps la sanctification de l’homme, elle ne peut pas être exclue de la pastorale. Car la liturgie est à la fois pédagogique et éducatrice. Elle est lieu de formation et d’enseignement pour le peuple de Dieu. Les pratiques liturgiques doivent conduire à la glorification de Dieu et à la sanctification de l’homme par la liturgie elle-même dans son caractère sacramentel. On ne peut pas « imaginer une pastorale chrétienne sans la dimension liturgique : la pastorale de toute communauté ecclésiale doit conduire des personnes jusqu’à la relation de communion avec Dieu et rendre actuel, pour les communautés et les personnes, le mystère du salut ; toute pastorale doit avoir une destination "sacramentelle" »[7]. Ainsi, la liturgie et les sacrements sont-ils au cœur de la mission et de la pastorale de l’Église.  

 

 

1.1.La mission

L’Église est essentiellement missionnaire. Aucune activité qu’elle entreprend ne peut être située en dehors de cette réalité. La célébration liturgique en elle-même constitue ce noyau dur de la mission. Le rite d’envoi de toutes les célébrations liturgiques résume cela et fait entrer dans l’intelligence missionnaire de tout acte liturgique. La liturgie n’est pas une affaire de « club d’amis », elle est ouverte sur le monde : « Allez dans la paix du Christ », « Allez porter l’Évangile du Seigneur », « Allez en paix, glorifiez le Seigneur par votre vie » etc. La nouvelle traduction du Missel romain en vigueur témoigne de cet aspect missionnaire dans ses différentes formules proposées pour le rite de conclusion de la célébration eucharistique. La liturgie, dans sa réalité missionnaire et pastorale met en exergue les trois missions christiques du baptême : la mission prophétique, sacerdotale et royale. 

 

 

 

1.1.1.     La mission prophétique

Par la fonction prophétique, nous sommes appelés à travailler pour l’émergence d’un monde nouveau, un monde juste et fraternel ; à annoncer l’Évangile dans sa radicalité pour aider ceux qui le reçoivent à vivre non pas « sous l’emprise de la chair, mais sous celle de l’Esprit » (Rm 8, 9). La Parole de Dieu reçue par l’Église et dans l’Église doit être annoncée aux hommes et aux femmes de notre temps les invitant au Royaume. Cette Parole reçue, célébrée et annoncée, nourrit les fidèles et les incite à témoigner de la vérité de cette Parole dans le monde. La liturgie, en ce sens, pousse aux « périphéries » de l’existence humaine pour la transformer. Et pour ce faire également, elle doit être « didactique et pastorale dans sa célébration »[8]

 

1.1.2.     La mission sacerdotale

Par la mission sacerdotale, nous sommes appelés à offrir le culte spirituel à Dieu, à glorifier Dieu par toute notre vie (ten logiken latreian, Rm 12, 1), à célébrer Dieu en tout et partout. Toute occasion nous est possible pour exercer notre sacerdoce baptismal. 

En ce sens, l’Église a la mission de « veiller, dans l’histoire, aux liens offerts par Dieu à son peuple en posant sans cesse les signes de l’Alliance »[9]. La liturgie et les sacrements sont le lieu d’expression de la mission sacerdotale. La mission sacerdotale ne se confine pas dans les seuls moyens qu’elle donne aux fidèles pour s’adresser à Dieu et nourrir leur vie chrétienne, mais elle est aussi la création nouvelle et la vie nouvelle[10]. C’est bien du mystère pascal qu’il s’agit ici. La mission sacerdotale de l’Église, notre mission sacerdotale émane du mystère pascal du Christ. 

 

1.1.3.     La mission royale

Par la mission royale, nous sommes associés au Christ Serviteur et Lumière du monde pour le salut de tous les hommes ; pour combattre le mal, pour souffrir avec le Christ et pour être avec Lui dans la gloire (cf. Rm 8, 17). Les Pères conciliaires précisent la mission royale de l’Église ainsi : 

 

Le Christ, s’étant fait obéissant jusqu’à la mort et pour cela même ayant été exalté par le Père (cf. Ph 2, 8-9), est entré dans la gloire de son Royaume ; à lui, tout est soumis, en attendant que lui-même se soumette à son Père avec toute la création, afin que Dieu soit tout en tous (cf. 1 Co 15, 27-28). Ce pouvoir, il l’a communiqué à ses disciples pour qu’ils soient eux aussi établis dans la liberté royale, pour qu’ils arrachent au péché son empire en eux-mêmes par leur abnégation et la sainteté de leur vie (cf. Rm 6, 12), bien mieux, pour que, servant le Christ également dans les autres, ils puissent, dans l’humilité et la patience, conduire leurs frères jusqu’au Roi dont les serviteurs sont eux-mêmes des rois[11].

 

C’est la mission des baptisés puisque

 

le Seigneur désire étendre son règne également avec le concours des fidèles laïcs ; son règne qui est règne de vérité et de vie, règne de sainteté et de grâce, règne de justice, d’amour et de paix, règne où la création elle-même sera affranchie de l’esclavage de la corruption pour connaître la liberté glorieuse des fils de Dieu (cf. Rm 8, 21). Grande vraiment est la promesse, grand le commandement donné aux disciples : « Tout est à vous, mais vous êtes au Christ, et le Christ est à Dieu » (1 Co 3, 23)[12].

 La liturgie exprime et réalise au plus haut degré la mission de l’Église. Car elle « contribue au plus haut point à ce que les fidèles, en la vivant, expriment et manifestent aux autres le mystère du Christ et la nature authentique de la véritable Église » (SC 2). En bref, les pratiques liturgiques et pastorales doivent s’éclairer mutuellement.  

 

 

1.2. La pastorale

 

La pastorale est l’art de gouverner, d’enseigner et de sanctifier le peuple de Dieu. D’une manière générale, c’est tout ce qu’entreprend l’Église au quotidien pour mener à bien sa mission. C’est tout ce que les pasteurs organisent pour une meilleure mise en œuvre de la mission de l’Église. Ce que vise la pastorale de l’Église c’est le salut de l’homme et de la femme. 

 

1.2.1. Une image biblique

Le mot « pastorale » est foncièrement biblique. Dans l’Ancien Testament, Dieu n’a pas le titre de pasteur même si son attitude envers le peuple est comparée à celle d’un bon berger. Mais, il confie ses brebis à des serviteurs qu’il choisit lui-même. Ayant faillis à leur mission, ils seront remplacés par Dieu lui-même qui prendra la tête de son troupeau. Désormais, c’est par le Messie qu’il le rassemblera, le guidera et la gardera[13]. L’unique et véritable bon pasteur c’est Jésus lui-même. Il vient prendre soin des brebis sans berger. Il est envoyé aux brebis égarées d’Israël. Il connaît ses brebis, il les appelle par leur nom. Les brebis le connaissent et le suivent. Il leur donne la vie. La passion de Jésus, le bon pasteur pour ses brebis : « leur donner la vie en abondance » est la raison d’être de la pastorale. C’est le lieu originaire de toutes les activités pastorales de l’Église. Car elle doit « faire circuler la vie divine au cœur de la vie des hommes et de constituer la grande famille des enfants de Dieu »[14].

 

 

1.2.2. Une organisation de l’activité de l’Église

Dès que nous parlons de pastorale, nous voyons l’organisation de l’activité de l’Église au service de la mission qu’elle a reçue de son Seigneur. Elle s’organise pour mieux annoncer la joie de l’Évangile, mais elle n’est pas une ONG. Elle est un peuple structuré, actif et missionnaire. Elle met l’avènement du Royaume au premier plan. Elle cherche à établir la vraie fraternité comme signe distinctif de ceux qui marchent vers le Royaume. 

 

 

1.3.La pastorale liturgique et sacramentelle

 

Il est clair que l’œuvre du salut continuée par l’Église s’accomplit dans la liturgie[15]. Et, l’économie du salut, pour reprendre Pierre-Marie Gy, est intrinsèquement sacramentelle[16]. C’est là un point d’ancrage de la pastorale liturgique et sacramentelle car l’Église a la noble mission non seulement d’annoncer la Bonne Nouvelle du salut, mais de célébrer et d’actualiser le mystère pascal du Christ par « le sacrifice et les sacrements autour desquels gravite toute la vie liturgique »[17]. La liturgie et les sacrements relèvent de la mission pastorale de l’Église qui en est la gardienne. Quand l’Église organise la pastorale liturgique et sacramentelle, elle met en œuvre sa mission sacerdotale qui consiste à consacrer au Père un peuple saint. Pour une telle mission, elle a toujours besoin de s’impliquer à fond dans la l’évangélisation et la catéchèse qu’elle soit de première annonce ou mystagogique pour susciter la conversion et la foi : il n’y a pas de liturgie sans des hommes et des femmes qui croient. D’où l’importance de la pastorale liturgique et sacramentelle. C’est cela qui conduira à « une mystagogie et l’éducation liturgique des fidèles »[18]. L’Église s’implique aussi dans les engagements des fidèles et dans leur service des hommes[19]. Il s’agit de vivre au quotidien la vérité d’un culte qui ne s’enferme pas dans ses fastes célébratives, « mais renvoie toujours à l’amour que Dieu attend en chacune de ses créatures »[20]. La pastorale liturgique et sacramentelle peut être résumée ainsi : 

 

La liturgie n’épuise pas toute l’activité de l’Église ; car, avant que les hommes puissent accéder à la liturgie, il est nécessaire qu’ils soient appelés à la foi et à la conversion : « Comment l’invoqueront-ils s’ils ne croient pas en lui ? Comment croiront-ils en lui s’ils ne l’entendent pas ? Comment entendront-ils sans prédicateur ? Et comment prêchera-t-on sans être envoyé ? » (Rm 10, 14-15). C’est pourquoi l’Église annonce aux non-croyants le Kérygme du salut, pour que tous les hommes connaissent le seul vrai Dieu et celui qu’il a envoyé, Jésus Christ, et pour qu’ils changent de conduite en faisant pénitence. Quant aux croyants, elle doit toujours leur prêcher la foi et la pénitence ; elle doit en outre les disposer aux sacrements, leur enseigner à observer tout ce que le Christ a prescrit, et les engager à toutes les œuvres de charité, de piété et d’apostolat pour manifester par ces œuvres que, si les chrétiens ne sont pas de ce monde, ils sont pourtant la lumière du monde, et ils rendent gloire au Père devant les hommes[21].

 

La pastorale liturgique et sacramentelle « constitue un "enseignement" et un "service de l’homme" »[22]. Elle fait partie de la mission prophétique et royale de l’Église. 

 

1.3.1.     Élucider les écueils

Au niveau de la pastorale liturgique et sacramentelle, il y a des écueils à éviter pour qu’on comprenne mieux son sens et sa signification. 

 

·      La réduction du culte à l’accomplissement d’obligations rituelles.

On a tendance à croire que mieux célébrer ou mieux vivre le culte consiste uniquement à accomplir des rites pompeux et triomphalistes, à observer des rubriques. On pense que le culte liturgique est purement et simplement une question d’apparence et de prestation pour s’exhiber devant Dieu et devant les autres : un culte liturgique sans cœur désagréé par Dieu :

 

Je déteste, je méprise vos fêtes, je n’ai aucun goût pour vos assemblées. Quand vous me présentez des holocaustes et des offrandes, je ne les accueille pas ; vos sacrifices de bêtes grasses, je ne les regarde même pas. Éloignez de moi le tapage de vos cantiques ; que je n’entende pas la musique de vos harpes. Mais que le droit jaillisse comme une source ; la justice, comme un torrent qui ne tarit jamais ! (Am 5, 21-24).

 

Le danger dans tout ça, c’est de s’enliser dans la paresse et la routine, trop personnaliser la liturgie, de vouloir trop se mettre en avant et finalement d’instrumentaliser la liturgie pour soi-même.  

 

·      Réduction de la liturgie au cérémonial.

Un autre écueil à éviter, c’est de vouloir enfermer la liturgie dans une sorte de cérémonial. La liturgie n’est plus considérée comme une cérémonie à réaliser avec une stricte observance de règles ou de rubriques. Une conception ritualiste de la liturgie persiste encore dans notre mentalité. Le côté ritualiste de la liturgie peut faire sombrer dans une mentalité séparatiste et élitiste de la liturgie qui finirait par mettre en question les options fondamentales de la réforme liturgique de Vatican II : adaptation à l’assemblée et aux cultures, participation active des fidèles, unité de l’assemblée, unité des deux parties de la messe etc. En bref, il faut éviter les appétits excessifs pour les « célébrations pompeuses » qui trahiraient la simplicité et la beauté de la liturgie. Car la liturgie est noble dans sa simplicité et simple dans sa noblesse. 

 

·      Les sacrements présentés comme des moyens quasi automatiques du don de la grâce de Dieu. 

Il y a danger éminent d’envisager les sacrements comme des moyens mécaniques au lieu de les voir comme des signes d’amour de Dieu pour l’humanité. Une telle vision conduirait à considérer et à célébrer les sacrements comme des rites magiques. On prônerait de la sorte une magie rituelle liée à la simonie et non une liturgie sacramentelle qui célèbre et fait entrer dans l’Alliance à l’intérieur de laquelle les dons de Dieu réclament la corporéité et le consentement de l’homme. 

 

1.3.2. Objet de la pastorale liturgique

La pastorale liturgique et sacramentelle n’a d’autre but que de mettre en œuvre la mission sacerdotale de l’Église : la liturgie et les sacrements qui en sont l’élément principal sont au cœur de sa mission sacerdotale. L’Église est de fait envoyée pour continuer l’œuvre du salut. Comme le Christ l’a voulu, elle est assistée par Lui dans les actes liturgiques et sacramentels qu’elle pose ; le Christ est donc présent dans ce que fait l’Église : il est présent dans la personne du ministre, dans l’assemblée, dans sa Parole, dans le pain et le vin eucharistiés à un plus haut niveau. Ce n’est pas une présence virtuelle, mais réelle que le Christ opère dans les actes liturgiques et sacramentels de l’Église. La pastorale liturgique et sacramentelle permet au peuple de Dieu :

 

1. d’exercer le sacerdoce baptismal qui unit tous membres du Corps du Christ dans la louange (la liturgie) et la mission (la pastorale) :

 

Les baptisés, en effet, par la régénération et l’onction du Saint-Esprit, sont consacrés pour être une demeure spirituelle et un sacerdoce saint, de façon à offrir, par toutes les activités du chrétien, autant d’hosties spirituelles, en proclamant les merveilles de celui qui, des ténèbres, les a appelés à son admirable lumière (cf. 1 P 2, 4-10). C’est pourquoi tous les disciples du Christ, persévérant dans la prière et la louange de Dieu (cf. Ac 2, 42-47), doivent s’offrir en victimes vivantes, saintes, agréables à Dieu (cf. Rm 12, 1), porter témoignage du Christ sur toute la surface de la terre, et rendre raison, sur toute requête, de l’espérance qui est en eux d’une vie éternelle (cf. 1 P 3, 15).

 

2. de vivre leur incorporation au Christ Seigneur comme peuple de Dieu. Liturgie et sacrements sont une réalité communautaire de première importance pour la croissance spirituelle des baptisés. Il n’y a pas de foi authentique en dehors de la foi de l’Église. La pastorale liturgique et sacramentelle est inhérente à la vie de l’Église. Elle fait faire le « travail de la foi dans l’Église » comme « un effort permanent, une dynamique pour saisir le Christ, ou plutôt se laisser saisir par Lui (Ph 3) »[23]. Reprenant à notre compte cette approche de François Favreau, disons que 

 

la pastorale liturgique et sacramentelle nourrit la mémoire des croyants donnant à la foi ses racines ;

   elle les provoque à prendre conscience de leur solidarité ecclésiale dans l’assemblée dominicale ;

   elle place les grands moments de l’existence sous le signe d’une communauté qui accueille, célèbre et accompagne ;

   elle révèle et fait exister l’Alliance, par des rites, dans des gestes, grâces à des mots[24].

 

3. à chaque membre de la communauté chrétienne d’honorer sa vocation baptismale personnelle par les moyens qu’elle lui donne. « De même que la liturgie fait place à la dimension communautaire de la vie de foi, de même dans chaque sacrement célébré, la relation personnelle entre le Christ et le chrétien est signifiée »[25].

 

Il y a un « je – tu » qui exprime l’amour personnifiant de Dieu et qui donne la réponse consentante de l’homme : « Je te baptise » – « Je te pardonne » – « Sois marqué »… Le participant à la liturgie n’est pas un anonyme. Il apprend quel est son nom, et il devient icône de Dieu dans la mesure où il permet à la grâce divine d’agir en lui[26].

 

4. d’œuvrer pour faire de l’Église une épiphanie de Dieu. C’est en elle que sont célébrés les sacrements qui la font exister comme corps vivant du Christ et la manifestent comme telle[27]. Quelque soit le lieu où est célébrée la liturgie, elle garde son caractère public :

 

Les actions liturgiques ne sont pas des actions privées, mais des célébrations de l’Église, qui est « le sacrement de l’unité », c’est-à-dire le peuple saint réuni et organisé sous l’autorité des évêques. C’est pourquoi elles appartiennent au Corps tout entier de l’Église, elles le manifestent et elles l’affectent ; mais elles atteignent chacun de ses membres, de façon diverse, selon la diversité des ordres, des fonctions, et de la participation effective[28].

 

Une nuance importante : la liturgie n’est pas le tout de la vie chrétienne. Le concile Vatican II l’a bien rappelée au numéro 9 de la Constitution sur la liturgie. En revanche, il affirme que 

 

la liturgie est le sommet vers lequel tend l’action de l’Église, et en même temps la source d’où découle toute sa vertu. Car les labeurs apostoliques visent à ce que tous, devenus enfants de Dieu par la foi et le baptême, se rassemblent, louent Dieu au milieu de l’Église, participent au sacrifice et mangent la Cène du Seigneur[29].

 

La pastorale liturgique et sacramentelle œuvre à former à l’intelligence de la liturgie, à la manière de célébrer, au discernement dans les mises en œuvre, à l’accompagnement de ceux qui se préparent à recevoir les sacrements. Bref, elle « œuvre pour que la source soit fréquentée et le sacrement accessible »[30]. Pour une telle œuvre, elle ne cesse pas de chercher à adapter ses pratiques liturgiques et pastorales pour manifester la miséricorde et la sainteté de Dieu en intégrant les fragilités puisqu’elle sait pertinemment que « dans la liturgie, le salut acquis en Jésus Christ est à l’œuvre et l’Église en construction »[31]

 

 

2. Le champ de la pastorale liturgique

 

2.1. Pour une vision juste

La liturgie est fondamentalement un art de l’action de la communauté de foi qui se rassemble pour célébrer l’œuvre du salut pour laquelle elle rend grâce à Dieu, dans le Christ par l’Esprit. En ce sens, elle mobilise l’être humain tout entier[32]. Symboles, rites, attitudes font partie de ce qu’elle est. On ne peut pas parler de la mise en œuvre de la liturgie sans éléments matériels, objets et espace. Elle est faite d’action, de chant et de parole. Elle se réalise dans un site cérémoniel qui nécessite un art de faire. Mais tout se fait et se réalise « pour la gloire de Dieu et le salut du monde ». 

Il est toutefois bon de rappeler quelques éléments importants pour une liturgie qui reste toujours du côté de l’Alliance, une liturgiequi, non seulement garde sa fidélité à cette Alliance, mais aussi la célèbre. 

 

 

2.1.1. Dieu – l’homme – l’Église

Parler de la liturgie, parler de sacrements implique incontestablement Dieu, l’homme et l’Église. Une trilogie indispensable pour la mise en œuvre de la liturgie et des sacrements. Ce qui demande à juste titre, un réel équilibre pour ne pas tout mettre sur le même plan. La place de Dieu dans la liturgie n’est pas égale à celle de l’homme, celle de l’homme n’est pas non plus égale à celle de l’Église. 

 

·      La présence et l’absence de Dieu

Dans toute liturgie, dans tout sacrement, on ne peut pas mettre la main sur Dieu. On ne peut pas le localiser. Il est présent sous mode d’absence : une présence sacramentelle réclamant la foi. Il se donne à rencontrer à travers les actes liturgiques et sacramentels de l’Église sans s’y restreindre. Il appelle, convoque et envoie. C’est Lui qui fait entrer dans l’Alliance et communique sa vie.  

 

 

 

·      La présence de l’homme concret

La liturgie et les sacrements font appel à des hommes et des femmes concrets, situés dans le temps avec leur histoire propre. Le nom est très significatif quand l’Église pose des actes liturgiques et sacramentels en exerçant sa mission sacerdotale : « N., je te baptise… », « N., sois marqué… » etc. Il y a toujours un homme concret, une femme concrète pour qui la grâce de Dieu s’événementise. Mais des hommes et des femmes en chemin de conversion. Ils marchent, cheminent, célèbrent, acceptent la mission confiée. Ils sont comme les disciples d’Emmaüs, parfois désespérés, mais toujours rejoints par le Seigneur. 

·      L’Église dans sa forme concrète

Le mystère de l’Église s’expérimente à travers le rassemblement des fidèles dans un lieu concret, repérable. C’est dans ce lieu concret, repérable que se célèbrent, se vivent la liturgie et les sacrements. 

 

L’action de Dieu est appelée : l’ex opere operato ; celle de l’homme : l’ex opere operantis ; celle de l’Église : l’ex opere operantis Ecclesiae. Tout ce qui fait une célébration, comme tout ce qui constitue une communauté entrent en jeu pour que ce soit ou non tenue l’équitable part de Dieu, de l’homme et de l’Église[33].

 

Quelles conséquences pastorales alors ? Il ne faut jamais trop situer la célébration des sacrements comme une finalité en soi, ni comme le couronnement d’une étape, d’une préparation, d’une démarche somptueusement récompensée. Il faut surtout envisager la célébration des sacrements comme une avancée dans l’amour de Dieu qui nous aime et nous saisit. Car c’est toujours Lui qui a la priorité. Il ne doit jamais être au second plan. Il faut être d’abord du côté de la source (Dieu) pour ne pas chosifier les sacrements, les faire passer pour des rites magiques. Le piège est dans l’attitude de trop vouloir voir leur efficacité qui nous pousse à oublier l’homme ou la femme concret qui les reçoit dans sa fragilité et sa corporéité, dans la survalorisation de la communauté chrétienne qui peut induire en tentation d’élitisme, de communautarisme et même de sectarisme. 

 

Deux écueils à éviter dans la pastorale liturgique et sacramentelle: le pélagianisme et le jansénisme : pour le premier, il s’agit de prôner une sorte de rigorisme moral ou ascétique en négligeant la prédominance de la gratuité de la grâce divine (une sorte de privation de la miséricorde). Les sacrements ne sont pas une sorte de récompense pour les purs, pour ceux qui ont retroussé leurs manches et ont fait un peu de bien. 

Le deuxième n’est pas loin du premier. Il s’agit d’une survalorisation d’observances religieuses et morales, d’une compréhension erronée du rôle de la grâce efficace de Dieu. C’est le danger de s’enliser dans une sorte de mépris du corps, du rigorisme et de la perfection morale. Pour pallier ces écueils, il faut avoir une bonne vision de l’Église, une Église qui sache remplacer le rigorisme moral et l’ascétisme par la grâce et la miséricorde[34]. Une Église de campagne, comme le décrit le pape François, qui sache accueillir les pécheurs. 

 

2.1.2. Passé – présent – avenir 

Toute célébration liturgique et sacramentelle embrasse le passé, le présent et l’avenir. Hier, aujourd’hui et demain constituent le temps chrétien. Ils constituent le temps raconté de l’histoire du salut. Le travail du mystère pascal à l’œuvre dans la liturgie et les sacrements se vit dans l’expérience temporelle qui nous renvoie à leur signification eschatologique. Cela nous inscrit dans ce que Paul Ricœur appelle « une aporétique de la temporalité »[35], c’est-à-dire que nous faisons l’expérience du salut dans le poids du temps, nous célébrons les mystères sans nous débarrasser des apories qui caractérisent aussi notre vie humaine dans le temps. Dans toute liturgie, dans tout sacrement se joue « la phénoménologie du temps ». 

C’est dans ce temps raconté, ce temps phénoménologique et aporétique que se réalise l’Hodie de Dieu. 

 

La liturgie aime dire « C’est aujourd’hui ». Cet aujourd’hui de la liturgie récapitule en un lieu et un moment donnés, au bénéfice de ceux qui le vivent, le mystère du salut. Ce n’est donc pas l’aujourd’hui éphémère du temps qui passe : c’est l’aujourd’hui fécond du temps qui devient éternel[36].

 

Le Royaume de Dieu se vit déjà dans le déroulement de l’histoire :

 

Dans l’existence de chaque jour que nous recevons de ta grâce, la vie éternelle est déjà commencée : nous avons reçu les premiers dons de l’Esprit par qui tu as ressuscité Jésus d’entre les morts, et nous vivons dans l’espérance que s’accomplisse en nous le mystère de Pâques[37]. 

 

C’est une nouveauté apportée par le Christ et récapitulée dans le mystère de sa mort et de sa résurrection. Car « en détruisant un monde déchu, il fait une création nouvelle ; et c’est de lui que nous tenons désormais la vie qu’il possède en plénitude »[38].

 

Alors, on peut conclure ainsi : l’aujourd’hui liturgique est toujours à la fois[39] :

 

1. mémoire : mémoire des événements de l’histoire du salut ; il prend sa source dans la Tradition ; il fait re-vivre ;

 

2. actualité : il ne fait pas que « revivre » le passé car le mémorial n’est pas que souvenir : il rend actuel ; il fait que nous soit « présent » sous les espèces sacramentelles et dans le déploiement rituel le salut donné en Jésus Christ ;

 

3. promesse : parce qu’il est vécu sous le voile de la foi, l’aujourd’hui de la liturgie, en même temps qu’il nous nourrit spirituellement, réactive notre insatisfaction, notre désir, notre attente.

 

La pastorale liturgique a l’obligation de veiller à cet équilibre de l’« aujourd’hui de Dieu ». Si nous nous attardions à la mémoire, nous verserions dans l’archéologisme. Si nous nous enfermions dans l’actualité, nous céderions aux prisons du sentiment et de l’affectivité. Si nous nous intéressions seulement à l’eschatologie, nous serions entrainés à des « désengagements » contraires au vœu même de l’incarnation[40].

 

La liturgie et les sacrements nous tirent en avant dans les conditions aporétiques qui nous caractérisent et nous demandent une réelle conversion de mentalité pour accueillir l’« Hodie » de Dieu dans notre « temporalité ». 

 

 

2.2. Pour une exploration du champ de la pastorale liturgique

 

La pastorale liturgique doit tenir compte de deux principes importants : la fidélité à la Tradition et l’adaptation pour aujourd’hui. Ce sont des principes fondamentaux pour la liturgie elle-même. C’est en référence à ces deux principes qu’il faut envisager toute activité qui a trait à la pastorale liturgique et sacramentelle pour éviter de tomber dans l’arbitraire ou dans l’exagération. Le premier demande toujours un retour à la source, « remettre en valeur les unités liturgiques originelles »[41]. Le second réclame toujours une adaptation de la chose liturgique, « rendre accessible le culte chrétien » à l’homme et la femme d’aujourd’hui. 

Une telle approche nous évitera deux choses : 1) enfermer la liturgie dans le déroulement des rites ; 2) faire tout reposer sur le dos de la pastorale liturgique et sacramentelle. Il faut nécessairement prendre en compte « les divers éléments qui entrent dans la mise en œuvre de la mission sacerdotale de l’Église »[42].

 

2.2.1. L’accueil et l’accompagnement

Le pape François plaide pour une Église en « sortie », une Église qui va aux « périphéries » de l’existence humaine. C’est bien sûr ici une clé pour la pastorale liturgique et sacramentelle. La pastorale liturgique et sacramentelle ne se résume pas à une simple préparation initiale à la célébration des sacrements. Elle doit se préoccuper d’un « avant » et d’un « après ». Comme nous l’avions déjà dit, la pastorale liturgique et sacramentelle ne se clôt pas avec la réception des sacrements. Elle se prolonge dans le temps liturgique et dans l’existence chrétienne ou sacramentelle. L’étape catéchuménale est un bel exemple. Tout n’est pas fini avec la célébration des sacrements de l’initiation chrétienne. La catéchèse mystagogique qui suit a une importance capitale pour la croissance spirituelle du néophyte. 

 

Nous avons dit accueillir : « Accueillir suppose des portes qui s’ouvrent, des espaces où une première rencontre se vive, des conditions d’entrée dans la maison, et de la place faite à l’intérieur »[43].

1. Comprendre l’accueil comme un don et un apprentissage. Nous devons consentir à accueillir toute personne, en particulier celles et ceux qui souffrent de faiblesse, celles et ceux qui sont fragiles. Un accueil qui nous conduit à un discernement des situations et à partager avec tous les grâces de l’amour divin. Un tel accueil nous demande :

- une attention particulière à la vie des personnes. Non pas entrer dans leur vie privée, les juger selon nos critères qui ne tiennent pas toujours compte des circonstances atténuantes de la vie des gens[44]. Cela demande une grande ouverture à l’action de l’Esprit Saint ;

- et l’offre d’une réelle hospitalité rendant possible une rencontre, une aventure ; ouvrant nos cœurs et nos portes avec compassion pour accompagner nos frères et sœurs, les aidant à rencontrer le Christ pour qu’ils aient la vie en Lui. 

 

2. À ceux et celles qui demandent les sacrements, nous voulons :

 

a. leur faire découvrir une Église chaleureuse et cordiale qui sache rayonner la joie de l’Évangile ; b. leur donner le goût de savourer les fruits du mystère pascal comme cœur de l’expérience chrétienne en prenant en compte leur démarche et en l’inscrivant dans la ligne de la mission sacerdotale de l’Église et la richesse de la foi dans laquelle elle est établie elle-même ; c. les engager à donner suite à l’engagement célébré[45]

 

3. « L’accueil en pastorale et liturgique et sacramentelle, c’est aussi tout ce qui se fait ou peut se faire pour que les assemblées dominicales fassent place à l’étranger, à celui qui est de passage, à celui qui est différent »[46]. Il faut dissiper les malaises quand aux choix de l’accueil des demandes et de l’hospitalité de la liturgie. 

 

2.2.2. L’assemblée

Le rassemblement liturgique au nom de Jésus manifeste la présence de l’Église. Ce rassemblement, hérité de la pratique de l’Église ancienne, est constitué de quatre piliers : le service et la prière, l’enseignement et le partage. Les premiers chrétiens comprenaient bien l’importance de se faire « corps », de se faire « ecclesia » en se rassemblant dans la fidélité au Ressuscité, à leur Seigneur. Le premier acteur de toute célébration liturgique est l’assemblée elle-même car la liturgie est le service « d’un peuple », le peuple de Dieu. Il faut tenir compte de chaque situation, de chaque événement qui provoque ou suscite le rassemblement liturgique : un mariage, un congrès, une fête d’anniversaire, une ordination, des funérailles etc. Chaque rassemblement liturgique a un caractère propre nécessitant un déploiement pastoral particulier. Nonobstant, toute tendance à discriminer les autres est à proscrire : « En effet, vous tous que le baptême a uni au Christ, vous avez revêtu le Christ ; il n’y a plus ni juif ni grec, il n’y a plus ni esclave ni homme libre, il n’y a plus l’homme et la femme, car tous, vous ne faites plus qu’un dans le Christ Jésus » (Ga 3, 27-28) – « Dans la liturgie, en dehors de la distinction qui découle de la fonction liturgique de l’ordre sacré, et en dehors des honneurs dus aux autorités civiles conformément aux lois liturgiques, on ne fera aucunement acception des personnes privées ou du rang social, soit dans les cérémonies soit dans les pompes extérieures » (SC 32). Mais l’assemblée s’intéresse d’une manière spéciale à ceux qui connaissent une certaine vulnérabilité dans leur vie chrétienne et qui cherchent à reprendre un chemin de conversion, un chemin de communion avec l’Église. 

 

1. Il faut toujours honorer la sacramentalité de l’assemblée et laisser transparaître la priorité du Dieu qui convoque et qui envoie. Le rite d’ouverture de la Messe nous montre cette évidence. Il y a un « Autre » qui se donne à rencontrer, un « Autre » qui convoque à l’Alliance. Ainsi, l’assemblée n’est pas « un groupe auto-convoqué », elle ne se compose pas par affinité : elle est voulue par Dieu. Ceux qui la président (les évêques et les prêtres) sont les ministres de l’appel de Dieu et le signe de cette priorité d’un Dieu qui nous devance et qui nous attend[47].

 

2. L’assemblée liturgique est rassemblement autour du Christ ressuscité[48]. Tous se reconnaissent membres du Corps du Christ où ils se meuvent par l’Esprit Saint (cf. 1 Co 12, 13). C’est donc la présence du Christ qui fait l’assemblée, construit nos communautés chrétiennes, édifie l’Église : « Dans les communautés, si petites et pauvres qu’elles puissent être souvent dispersées, le Christ est présent par la vertu duquel se constitue l’Église une, sainte, catholique et apostolique. Car la participation au corps et au sang du Christ n’a pas d’autre effet que de nous transformer en ce que nous recevons » (LG 26). C’est bien le Christ qui a promis d’être auprès de ceux qui se sont greffés à Lui par le mystère pascal jusqu’à la fin des temps. Par conséquent, leur rassemblement se fait autour du Christ ressuscité pour trois raisons[49] :

 

— sans la résurrection du Christ il n’y aurait pas d’Église ; l’Église ne vit que pour publier le mystère ;

— en tout rassemblement né de la foi, le Christ est présent d’une manière particulière ;

— enfin, dans le rassemblement, nous essayons de dire ce vers quoi nous allons : le Christ tout en tous ; les cieux nouveaux et la terre nouvelle[50]

 

3. La vie de l’Église ne se réduit pas seulement à son culte et à ses sacrements. Autrement dit, la vie chrétienne ne se cantonne pas uniquement dans le rassemblement liturgique. L’Église vit en chaque baptisé fidèle à son engagement baptismal dans la société. Elle vit dans toutes les activités pastorales, sociales, éducatives, caritatives mûes par l’Amour de Dieu qui rassemble et qui envoie : « Allez en paix, glorifiez le Seigneur par toute votre vie ». Mais l’Église trouve dans son rassemblement liturgique des forces pour accomplir sa mission sacerdotale. Les temps liturgiques célébrés façonnent la vie de foi des croyants. 

 

2.2.3. La célébration 

Célébrer les sacrements ou prier ensemble, ce n’est pas donner un « show ».  Pourtant, toute célébration liturgique ou toute prière de l’Église est en quelque sorte une mise en scène de la foi. Car la liturgie suppose l’accomplissement de certain de rites, de paroles, de gestes et de symboles. C’est une mise en scène de la foi certes, mais ce n’est pas pour autant un « spectacle ». Ceux qui y prennent part véritablement ne sont pas des spectateurs, mais des participants. Cette mise en scène de la foi demande de la pudeur de la part de tous. Elle réclame une certaine retenue, un certain art de célébrer[51]. C’est déjà bien indiqué dans les lignes de la réforme conciliaire sur la liturgie : « Les rites manifesteront une noble simplicité, seront d’une brièveté remarquable et éviteront les répétitions inutiles ; ils seront adaptés à la capacité de compréhension des fidèles et, en général, il n’y aura pas besoin de nombreuses explications pour les comprendre » (SC 34). Il faut donner la chance au mystère de se déployer et de parler de par lui-même. Célébrer est la manifestation de l’Église en prière. C’est l’affaire d’une communauté, c’est entrer dans une histoire : un hier, un aujourd’hui, un avenir. Célébrer est un sacrement puisqu’il s’agit d’un agir « "au nom de Jésus Christ" qui devient un "par Lui, avec Lui et en Lui" »[52]. La célébration liturgique ou sacramentelle n’est pas une simple formalité rituelle, elle construit le Corps du Christ qui est l’Église. 

 

 

 

 

2.2.4. L’espace et le temps

La liturgie s’exécute dans un espace et dans le temps. Comme nous l’avons précisé au début, c’est le temps raconté. C’est le temps d’une mise en intrigue, c’est le temps d’une configuration, c’est le temps d’une refiguration : le temps liturgique est un temps de mimésis, la mimésis du mystère du salut, la mimésis pascale. 

L’espace et le temps sont des données fondamentales de l’existence humaine et ils sont un lieu d’évangélisation, un lieu pour la pastorale liturgique et sacramentelle en vue de leur donner une consistance et un sens. 

L’espace liturgique n’a pas seulement une fonction utilitaire, mais il a aussi une fonction « théologale » et « anthropologale ». C’est le lieu de la rencontre entre Dieu et l’homme. L’organisation de l’espace liturgique doit tenir compte de ces deux aspects inséparables mais distincts. La liturgie et l’espace se rencontrent[53]. Elles s’influent réciproquement. 

 

 

3. La pastorale des sacrements

 

Le mystère se joue dans l’accueil, la célébration, l’espace liturgique pour l’édification des fidèles et la construction de l’Église. Disant cela, nous ne pouvons pas oublier un certain déficit cérémoniel lié à une sorte de banalisation de nos espaces liturgiques et une forte instrumentalisation de la liturgie dans certains milieux. On peut parler d’une certaine liturgie « liguide », taillée de toutes pièces mais sans fondement théologique et spirituel. Là aussi doit se jouer le rôle de la pastorale liturgique et sacramentelle avec moderatio. Car la pastorale liturgique et sacramentelle n’est pas une instance de jugement et sanction. Elle a la mission de faire croitre la mission sacerdotale de l’Église. Car on ne peut pas séparer les actiones liturgicae de celles du Christ et de l’Église. En ce sens, les rites sacramentels célébrés par l’Ecclesia orans, doivent être simples et nobles en même temps. Un véritable enjeu théologique et pastoral pour la mise en œuvre de la liturgie et des sacrements. L’acte sacramentel accompli demande de la familiarité et de la distance. Ce n’est pas une question de routine ou d’habitude. Cela nécessite toujours « une attention "révérente et heureuse" »[54]. Signes de l’Alliance, porteurs du mystère pascal, les sacrements donnent forme et forment la vie nouvelle[55].

 

3.1. La signification des sacrements

 

« Actions du Christ et de l’Église » (C.I.C 840), les sacrements nourrissent la vie spirituelle des croyants. Ils sont des actes d’Alliance qui unissent au Christ par l’action du Saint-Esprit, relient les hommes à Dieu et à leurs frères par le plus intime d’eux-mêmes, et incorporent à l’Église[56]. Tout comme il n’y a pas de christianisme sans le Christ, de même, il n’y a pas d’Église sans les sacrements. La vie de grâce advient par les sacrements célébrés dans l’Église comme des expériences humaines symbolisées dans des actions rituelles. Voilà une clé herméneutique pour la pastorale liturgique et sacramentelle. Car ils sont des actions rituelles confiées par le Christ à son Église pour la vie de ceux et celles qui sont greffés à Lui par son mystère pascal. 

En bref, « les sacrements sont tous, d’une manière ou l’autre, profession de foi, consentement à l’amour et entrée en espérance »[57].

 

1. Profession de foi : la vie sacramentelle dans toutes ses composantes nous met en présence de l’altérité de Dieu. Car c’est Lui qui nous appelle à mener une existence sacramentelle. La démarche, la préparation, la célébration, la réception des sacrements font professer la foi en un Dieu qui aime, appelle, accompagne, nourrit et sauve. Tout le processus du catéchuménat nous fait faire cette expérience de professer la foi dans et par les sacrements. C’est un point important pour la pastorale liturgique et sacramentelle. 

 

2. Consentement à l’amour : tout sacrement, nous dit François Fravreau, dit l’amour de Dieu sous la forme originale qui le définit comme l’un des signes de l’Alliance[58]. Recevoir un sacrement, c’est consentir à l’amour d’un Dieu qui sort de lui-même pour communiquer sa grâce, faire entrer les hommes et les femmes dans son Alliance. Les sacrements tout comme la liturgie sont les célébrations de l’Alliance. 

 

3. Entrée en espérance : le temps du sacrement est un temps aporétique. Certes, nous goûtons déjà la vie divine en ce monde, mais c’est en espérance. Les sacrements nous mettent en chemin vers la communion totale avec Dieu. 

 

 

3.2. Sacrement de la vie nouvelle

 

Les sacrements nous font vivre une vraie naissance dans le Christ, c’est-à-dire la vie nouvelle en Lui. La vie nouvelle que nous donnent les sacrements peut être définie ainsi : « Je vis, mais ce n’est plus moi, c’est le Christ qui vit en moi. Ce que je vis aujourd’hui dans la chair, je le vis dans la foi au Fils de Dieu qui m’a aimé et s’est livré lui-même pour moi » (Ga 2, 20). La vie sacramentelle ne supprime pas les apories du temps qui jalonnent notre vie, elle ne détruit pas notre condition d’homme et de femme comme lieu de notre existence, mais elle lui donne un sens et une orientation christique et eschatologique. C’est une vie de croissance. Tel est le sens des sacrements de l’initiation chrétienne. C’est une entrée dans le mystère de l’Alliance, dans la communion avec Dieu et nos frères et sœurs. 

 

 

4. Les structures de la pastorale liturgique et sacramentelle

 

La pastorale liturgique et sacramentelle concerne toutes les structures de l’Église locale. Elle ne doit pas être décalée de la manière dont l’Église vit sa mission aujourd’hui : une Église proche des gens, synodale et servante de l’humanité. Du niveau paroissial jusqu’au niveau diocésain, du niveau diocésain jusqu’au niveau national, elle doit être un organisme vivant composé de fidèles qui décident d’assurer la continuité de la vie liturgique et sacramentelle.

 

 

 

 

4.1. La structure paroissiale

 

Dans chaque paroisse, est constituée une équipe d’animation liturgique et sacramentelle regroupant des fidèles qui acceptent de se mettre au service de l’assemblée afin de l’aider à participer pleinement et activement à la prière liturgique et à la vie sacramentelle. L’équipe doit avoir coordinateur qui veille à ce que tous les acteurs ou tous les secteurs accomplissent leur mission en synergie. Celui à qui est confiée la guidance de la communauté paroissiale doit s’assurer qu’il y ait une équipe ou des équipes de préparation aux sacrements y compris le service du catéchuménat pour accompagner les adultes et les enfants en âge scolaire qui se préparent à recevoir les sacrements de l’initiation chrétienne, des équipes pour visiter les malades et leur porter la communion, des équipes de funérailles afin de soutenir et accompagner les familles dans leur deuil. Une équipe qui s’occuperait de la charité au niveau de la paroisse aurait toute sa signification évangélique en lien avec toutes les autres équipes. L’équipe pastorale liturgique et sacramentelle vit en parfaite relation avec le pasteur qui tient la place de l’évêque et avec l’évêque lui-même pour l’épanouissement de la communauté paroissiale, surtout dans la célébration communautaire dominicale (cf. SC 42). 

 

 

4.2. La structure diocésaine

 

L’Église, nous dit Placide Pernot, se conçoit comme une communauté voulue par Dieu pour mener toute la communauté humaine à la communauté totale en Dieu[59]. La mission sacerdotale de l’Église comme communauté voulue par Dieu se réalise en tout premier lieu par la liturgie et les sacrements même s’ils n’épuisent pas toute l’activité de l’Église conduisant la communauté humaine à la communauté totale en Dieu. Cela peut nous aider à comprendre le rôle primordial de l’Évêque dans le gouvernement de la liturgie. Dans le diocèse, c’est lui d’abord qui est l’autorité compétente en matière de liturgie. 

Pour l’aider dans cette charge, il met sur pied la commission diocésaine de la pastorale liturgique et sacramentelle dont l’activité se développe sous son autorité (cf. SC 45). Cette commission doit être capable à la fois « de porter attention à tout ce qui fait la vie sacramentelle et liturgique de l’Église, tant dans ses enjeux de foi que dans la qualité de sa réalisation, et d’articuler cette partie de la mission de l’Église  avec les autres dimensions et instances pastorales »[60]. L’évêque veille à la vitalité de la vie liturgique du diocèse puisque, en quelque manière, la vie chrétienne de ses fidèles découle et dépend de lui (cf. SC 41). Cette communauté voulue par Dieu se fait visible « dans la participation plénière et active de tout le saint peuple de Dieu, aux mêmes célébrations liturgiques, surtout à la même Eucharistie, dans une seule prière, auprès de l’autel unique où préside l’évêque entouré de son presbyterium et de ses ministres » (SC 41). 

 

 

4.3. La structure nationale

 

La constitution conciliaire sur la liturgie recommande cette structure au niveau national (SC 44) avec la participation de personnes compétentes en science liturgique, en musique sacrée, en art et en pastorale. Cette commission nationale de la pastorale liturgique et sacramentelle a pour mission de promouvoir la vie liturgique et sacramentelle au niveau national, de promouvoir les recherches et les expériences nécessaires chaque fois qu’il s’agira de proposer les adaptations au Siège apostolique, de préparer les documents et la nouvelle traduction des livres liturgiques sous la direction de l’autorité ecclésiastique compétente (cf. SC 44). Bref, la pastorale liturgique et sacramentelle dans sa structure nationale intervient dans le domaine de la liturgie et des sacrements, l’art de célébrer, la formation de tous ceux qui y participent, les problèmes relatifs à la célébration liturgique et sacramentelle, la préparation aux sacrements, l’éducation de la foi chez les demandeurs etc. Au niveau local, ici chez nous cette structure s’appelle CELI : Commission épiscopale de liturgie. Une structure à mieux penser et à mieux structurer pour qu’elle soit plus efficace dans sa mission. 

 

 

5. Regard d’un pasteur sur le rapport aux normes liturgiques[61]

 

Dès qu’on parle de normes liturgiques, on voit tout de suite le prêtre qui préside la prière liturgique de la communauté chrétienne et célèbre les sacrements. C’est une vérité, certes, mais par rapport aux normes liturgiques, toute l’assemblée est concernée. Nous l’avons vu un peu dans les notes précédentes concernant la pastorale liturgique et sacramentelle en général. Maintenant, ces propos concernent directement le prêtre projetant un regard de pasteur sur le rapport aux normes liturgiques. Car dans la paroisse, il est le premier à s’occuper de la liturgie en raison de son rôle de pasteur et de la portée pastorale de tout ce qui touche à la liturgie et aux sacrements, mais aussi en raison des options doctrinales de la réforme liturgique de Vatican II. Sébastien Guiziou nous guidera dans cette perspective à partir de son expérience de pasteur dans le rapport aux normes édictées dans les rituels ou le missel et les adaptations que nécessitent souvent les besoins pastoraux des fidèles. Cela nous aidera à vérifier le dynamisme de la liturgie au sujet de sa pastoralité, de son ecclésiologie qui nous demande une grande attention. 

 

5.1. La diversité des rapports à la norme

 

5.1.1. Le rapport à l’espace liturgique

La messe célébrée dans une cathédrale ne peut pas être célébrée exactement de la même manière que sous une tonnelle ou sous un hangar. C’est la même messe, la même liturgie, certes, mais ce n’est pas le même espace. L’espace influe sur les postures, les décors, les déplacements ; sur la façon de prendre place dans l’assemblée etc. L’espace est le premier lieu où il faut nécessairement la diversité des rapports aux normes. Il y a toujours une adaptation à faire à chaque assemblée, à chaque groupe. Le président ne s’adresse pas de la même manière à une assemblée composée d’adultes qu’à celle composée d’enfants. Dans tel endroit on utilise un micro, dans tel autre endroit non. Il faut savoir composer avec les lieux. Dans tel église on utilise un confessionnal pour célébrer le sacrement du pardon et de la réconciliation, dans telle autre on utilise des chaises. Les positionnements sont différents. Le prêtre doit s’adapter à la manière dont est conçu l’espace liturgique, à l’assemblée qui s’y rassemble. L’adaptation est inhérente à la liturgie. 

 

5.1.2. Le rapport aux normes données par les Rituels

On peut remarquer que tous les Rituels contiennent des normes, mais avec une certaine plasticité en fonction des situations ou des circonstances pastorales[62]. Dans nos paroisses haïtiennes, par exemple, la pastorale du mariage est un lieu parfois difficile en ce qui concerne le rapport à la norme. Lors de la célébration à l’église, les futurs époux souhaitent diffuser des musiques profanes ou des chansons qui n’ont rien à voir avec liturgie. Parfois, au niveau des demandes de sacrements ou de leur célébration, il y a une certaine tension entre ce que l’Église demande et ce que veulent les demandeurs eux-mêmes. Il y a des gestes qui ne sont pas prévus dans les Rituels mais qui ont du sens. Par exemple, lors d’une célébration de baptême, le célébrant peut inviter ceux qui ont accompagné les parents à faire le signe de la croix sur le front des enfants après eux. Le RICA précise cela : « Suivant les circonstances, les besoins particuliers et le désir des fidèles, le ministre usera volontiers des diverses facultés que le rite lui laisse » (n° 34). Le numéro 35 abonde dans le même sens mais en précisant davantage les adaptations qui reviennent au célébrant : « Outre les adaptations prévues par le Rituel romain lui-même dans le dialogue et les bénédictions, il revient au ministre, selon les circonstances, d’introduire d’autres modifications dont il est parlé expressément dans les Préliminaires au baptême des adultes ou des enfants ». Le geste des membres de l’équipe de préparation au sacrement, leur participation à la signation du candidat au baptême « révèle que chaque membre de l’Église « et en particulier celui qui exerce des responsabilités) se place sous la croix du Christ et transmet ce signe aux nouveaux chrétiens »[63]. Sans exagération, les Rituels offrent la possibilité d’organiser des célébrations qui facilitent davantage la participation active des fidèles en tenant compte des différentes occasions et circonstances. Il y a lieu d’un véritable discernement de la part du célébrant et de ceux qui font la demande. 

 

 

5.1.3. Les personnes dans leur rapport à la liturgie et entre elles

Il peut y avoir une grande différence de sensibilité entre ceux qui exercent une fonction ou un ministère dans la liturgie. Parfois, cela est source de conflit. Tel ministre est plus sensible à tel aspect liturgique, tel autre non. Tous les ministres ou ceux qui ont une responsabilité directe dans l’action liturgique n’ont pas le même rapport aux normes. Dans telle paroisse, on développe une liturgie débridée, théâtrale avec des inventions démesurées, dans telle autre, on ne s’accroche qu’à l’application des rubriques, dans telle autre encore, on prend plaisir à innover arbitrairement en ajoutant des rites qui ne sont pas prévus dans les livres liturgiques officiels. 

On le constate aussi pour les chorales, les animateurs de chant etc. On veut une liturgie à son goût, à sa façon. On oublie que la « liturgie n’aime point les débordements du sentiment »[64] et qu’elle est de « l’émotion domptée »[65]. Elle n’occulte pas totalement la personnalité, mais elle demande une certaine distance, une certaine pudeur, une certaine démaîtrise ou lâcher prise. Chacun est appelé à se laisser saisir par ce qui nous saisit. Chacun doit faire seulement ce qui lui revient. Chacun doit faire les choses non pas en fonction de sa sensibilité ou de son affectivité, mais selon ce que l’Église demande de faire. Il faut développer « une bonne compréhension de ce qu’est la liturgie et l’approfondissement de l’intelligence des Rituels » afin de permettre « une juste approche de la célébration et de la mise en œuvre des normes »[66].

 

 

 

5.1.4. Une norme? Des normes?

Une question épineuse. On voit toute la difficulté de la question des normes en liturgie. S’agit-il de la norme ou d’une norme ? Qui a l’autorité ? Le livre liturgique ? Le prêtre dans sa paroisse qui agit en dehors de tout esprit de diocésanité ou d’étroite relation avec son évêque ? Le diacre ? Le directeur de chapelle ? La religieuse ou le religieux responsable de l’école dans la paroisse ? L’évêque ou les normes qu’il édicte pour le développement de la liturgie dans son diocèse ? La Conférence épiscopale ? La Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements ? Le rapport à la norme ou aux normes, comme le dit Sébastien Guiziou, de même que les possibilités d’adaptation, posent un certain nombre de questions qu’il nous faut maintenant examiner[67].

 

 

5.2. Questions liturgiques et ecclésiologiques

 

5.2.1. L’autorité en liturgie

À regarder de près le déroulement de la liturgie dans certaines paroisses, nous admettons qu’il y a une diversité de situations pastorales qui concernent les normes et expriment la complexité de l’autorité en liturgie. La référence aux normes liturgiques est parfois très subjective. Qu’est-ce qui est faisable en ce sens ? Donner plus de place aux dispositions intérieures pour se situer par rapport aux normes. Prioriser la vie spirituelle des fidèles afin d’éviter les dérives ou les abus liturgiques. Favoriser, susciter l’action de l’Esprit Saint en chacun et en tous. Savoir que c’est l’Esprit Saint qui est à l’œuvre dans l’action liturgique. Voilà ce qui donne sens à l’autorité en liturgie pour ne tomber dans l’excès d’un pouvoir mal géré, mal compris. Tout doit converger vers le Christ, le seul et vrai Maître. 

 

 

5.2.2. L’organisation de la vie liturgique des paroisses

Le dimanche chrétien est à prioriser dans la vie liturgique des paroisses, car c’est le jour de l’Ecclesia, le jour où les chrétiens se rassemblent soit pour célébrer l’Eucharistie soit pour célébrer la Parole (là où il y a un manque de prêtre). C’est le rassemblement du dimanche chrétien qui permet de mieux comprendre le lien qui existe entre l’Eucharistie et l’Église : « l’Eucharistie fait l’Église et l’Église fait l’Eucharistie » disait H. De Lubac. On pourrait inverser cet adage pour dire : « le dimanche chrétien fait l’Église et l’Église fait le dimanche chrétien ». Sans le dimanche chrétien comme jour du Seigneur, jour de la résurrection, l’Église manquerait de fondement et de visibilité. Aussi, sans l’Église, le dimanche chrétien serait vide de sens et paraîtrait utopique. D’où le rôle de la paroisse comme lieu de l’Ecclesia, lieu où le Christ ressuscité se donne rendez-vous. Et justement, la paroisse dépasse la frontière du petit nombre de gens rassemblés le dimanche. Car le Ressuscité ne se confine pas en un lieu précis. C’est pourquoi, la paroisse est un lieu de communion et d’évangélisation. Elle est la communauté des communautés pour reprendre le document Aparecida (n. 170-177).

Par ailleurs, on n’oublie pas les célébrations liturgiques annuelles et en premier lieu le triduum pascal et les grandes fêtes. L’organisation de la pastorale liturgique et sacramentelle doit tenir compte de toutes les composantes de la vie spirituelle des fidèles gravitant autour de la vie paroissiale. La participation consciente, efficiente et active des fidèles à la liturgie est source de la vie spirituelle et missionnaire. Elle est le lieu d’une réelle « compréhension de la norme comme repère indéfectible de la vie ecclésiale ».[68]

 

5.2.3. La formation liturgique et ecclésiologiques des acteurs

La formation des acteurs a un rôle capital dans la pastorale liturgique et sacramentelle. La réforme conciliaire en matière de liturgie le recommande fortement : 

 

Les pasteurs d’âmes poursuivront avec zèle et patience la formation liturgique et aussi la participation active des fidèles, intérieure et extérieure, proportionnée à leur âge, leur condition, leur genre de vie et leur degré de culture religieuse ; ils acquitteront ainsi une des principales fonctions du fidèle dispensateur des mystères de Dieu ; et en cette matière, ils ne conduiront pas leur troupeau par la parole seulement, mais aussi par l’exemple (SC 19).

 

La formation est un des principaux objets du ministère sacerdotal. Les pasteurs doivent pourvoir aux besoins de formation liturgique et ecclésiologique des acteurs. Ils doivent les éduquer à la liturgie. Dans les paroisses, on trouve beaucoup de fidèles qui s’engagent à l’action liturgique, parfois, ils sont très dévoués, mais il leur manque la formation de base ou continue. Les pasteurs doivent pouvoir évaluer leur capacité ou leur éducation liturgique et ecclésiologique. 

Pour cela, les responsables de communauté peuvent recourir ponctuellement à la Commission diocésaine de la pastorale liturgique et sacramentelle en vue d’organiser des sessions de formation dans les paroisses et les chapelles. Cependant, il ne faut pas oublier que les pasteurs ou les responsables de communauté sont eux-mêmes formateurs. Ils doivent se soucier de cela et l’exercer avec un grand amour. Il est important aussi de mettre à la disposition des acteurs (articles simples, liens internet, vidéos, etc.). Outre la formation liturgique, il faut accorder une place importante à la formation ecclésiologique des acteurs. Elle leur permet de mieux comprendre leur place dans la communauté chrétienne et ainsi d’assurer un meilleur service. La liturgie fait l’Église, l’Église fait la liturgie. Ils assurent un meilleur service tout autant qu’ils développent leur sensus ecclesiae. En servant, ils prennent conscience qu’ils forment un corps, qu’ils interagissent en tant qu’Ecclesia orans, une Église ou communauté de prière. Mais aussi, ils forment une grande famille en cherchant à mieux comprendre la nature de l’Église, à mieux vivre la vie ecclésiale en développant davantage l’esprit de synodalité et la collégialité au sein de leur paroisse pour un réel attachement au Christ Tête de l’Église. 

 

5.2.4. Trop de personnalisation 

Dans certaines paroisses, on cherche parfois à trop sectoriser la liturgie. Par exemple, on rencontre souvent cette difficulté avec certains groupes ou certaines chorales qui cherchent à accaparer la liturgie lors de leur anniversaire : la messe dominicale célébrée est leur messe sans tenir compte de l’assemblée. Ils donnent l’impression d’organiser un concert et non une célébration qui réclame la participation active des fidèles. Parfois ils composent leurs propres qui sont plus à leur gloire qu’à celle de Dieu. 

Quelques fois aussi, on peut constater une certaine exagération à vouloir trop adapter les célébrations. On peut prendre l’exemple de la célébration des baptêmes, des funérailles ou des mariages. On se focalise parfois trop sur les personnes. Même si l’Église n’est pas insensible à ce que vivent les gens, elle doit les faire se tourner vers le Christ en son Mystère pascal. Il faut éviter le vedettariat et l’arbitraire dans la façon de célébrer ou de vivre la liturgie. La liturgie est parfois étouffante et perd sa substance symbolique. Une normativité trop portée sur les personnes risque de faire s’estomper le caractère ecclésial des célébrations et d’oublier que le Christ est la Tête de son Église.  

 

5.2.5. La liturgie vécue comme une dévotion personnelle

Un autre écueil à éviter est la tendance de vivre la liturgie comme une dévotion personnelle. Cela conduit à une liturgie instrumentalisée dans laquelle l’individu devient la norme. On oublie la dimension communautaire de la liturgie. L’assemblée est le sujet intégral de l’action liturgique et non le contraire. Il faut toujours valoriser le « nous » de l’assemblée. Les fidèles se rassemblent pour former une communauté de foi et d’amour qui fait monter sa louange vers le Père par le Christ et dans l’Esprit. 

 

5.3. Quelques repères pour le ministère de pasteur

 

5.3.1. Un pragmatique

Beaucoup d’aspects concrets peuvent perturber la liturgie. On peut citer par exemple : manque de places suffisantes, l’oubli de tel ou tel linge liturgique, lecteur se trompant de lecture, chants inappropriés etc. Face à tout cela, le pasteur, dans sa pratique liturgique, doit être pragmatique. Il doit savoir entrer dans l’intelligence de la chose liturgique  sans tomber dans la négligence, la routine ou le « manfoubinisme ». Tout simplement, il doit chercher à trouver le bon moment, le calme et la maîtrise de soi pour corriger ce qui peut être corrigé et pour faire avec ce qu’il ne peut corriger sur le moment afin d’aider l’assemblée liturgique qui le précède à vivre le mystère à célébrer. D’où l’importance pour le prêtre de participer aux réunions liturgiques et, quand il ne le peut pas de voir le déroulement de la célébration en détails avant de commencer, si possible la veille pour corriger ce qui doit l’être… sans froisser personne. Pour cela également, il doit développer la « capacité d’adaptation aux personnes, aux lieux, aux objets permettant de faire face à l’imprévu sans que ce dernier "parasite" la liturgie »[69].

 

5.3.2. Un mystagogue

Les normes liturgiques que donne l’Église sont toujours à adapter non pas de manière lapidaire, mais de manière intelligente pour aider les fidèles à entrer davantage dans le Mystère du Christ que nous célébrons. Toute célébration liturgique se situe dans un lieu donné, dans un espace particulier et se constitue avec des personnes de divers horizons et de toute catégorie. Le pasteur doit tenir compte de tous ces aspects-là en vue d’aider ceux et celles qui participent à la liturgie à se l’approprier vraiment et de pouvoir entrer en contact avec le Christ. Si la liturgie demeure le lieu de la vie spirituelle pour le prêtre et les fidèles, elle  n’en est pas moins le lieu de l’enseignement par le prêtre  pour les fidèles. 

Le pasteur met les fidèles en contact avec leur Seigneur par la mystagogie qui « s’accomplit d’abord par la manière dont la liturgie est célébrée, en tant qu’elle est porteuse du mystère et introduit dans toute sa profondeur »[70]. Elle est la clé d’interprétation de la liturgie en tant qu’elle fait entrer dans l’intelligence du mystère célébré. Elle est comme une pédagogie, une herméneutique et une théologie. La mystagogie ouvre les fidèles à l’intelligence des mystères du Christ proclamés dans les saintes Écritures et célébrés dans la liturgie à la manière d’une clé qui ouvre et ferme la porte d’une maison[71]. Le pasteur explique les rites en les vivant, en les célébrant. Ainsi dire, pour « bien accomplir sa fonction de mystagogue, le pasteur doit être souple, bien connaître la liturgie et être lui-même priant »[72]. La fonction de présidence dans la liturgie est une évidence, car elle met celui qui préside l’assemblée au premier plan, « tout en sachant qu’il doit lui-même s’effacer devant le Christ ressuscité qui préside et conduit son Église »[73].

 

5.3.3. Un catéchète

Le pasteur est le catéchète des catéchètes. La liturgie est le lieu privilégié où il exerce cette fonction puisque l’Église vit du mystère de Dieu qu’elle accueille et célèbre dans la liturgie. La liturgie est un chemin d’évangélisation et de mission. La liturgie n’est pas le lieu où l’on fait de la catéchèse. Elle est foncièrement catéchétique et « ne peut plus être considérée comme un secteur particulier, qui devrait soit être réservé à des croyants bien enracinés dans la foi, soit être tenu à l’écart de la vie missionnaire de l’Église »[74]. Ceci dit, le pasteur accomplit sa mission de catéchète en célébrant la liturgie, en particulier les sacrements. Aujourd’hui, en Haïti, il serait bon que les pasteurs s’engagent davantage à proposer des catéchèses mystagogiques. Car « la liturgie est en effet le lieu d’une authentique rencontre d’amour avec Dieu et il est important d’aider le fidèle à en prendre conscience et à en vivre. La catéchèse mystagogique permet justement cette prise de conscience »[75]. La liturgie forme, éduque et façonne les baptisés. Et c’est la mission de tout pasteur à qui est confiée la guidance de la prière de la communauté chrétienne. La liturgie est pleinement catéchétique quand elle est célébrée de manière belle, digne, soignée[76]. Un véritable défi pour les pasteurs. Comme le souligne le pape Benoît XVI, en reprenant une affirmation du Synode des évêques : « la meilleure catéchèse sur l’eucharistie est l’eucharistie elle-même bien célébrée ».

Le Pape François, dans Evangelium gaudium (EG), insiste sur la « valorisation renouvelée des signes liturgiques de l’initiation chrétienne » (EG  166). Cela nous porte à comprendre que nous devons interpréter les rites liturgiques « à la lumière des événements salvifiques » (Sacramentum caritatis 64), c’est-à-dire de mettre en lumière ce que les rites liturgiques nous dévoilent des mystères du salut et, tout spécialement, du mystère pascal que la liturgie actualise. 

 

5.3.4. Un liturge 

Il n’y a pas de vie sacerdotale sans la liturgie. Le jour de l’ordination au presbytérat, l’évêque interroge le candidat en ces termes : « Voulez-vous célébrer avec foi les mystères du Christ, tout spécialement dans le sacrifice eucharistique et le sacrement de la réconciliation, selon la tradition de l’Église, pour la louange de Dieu et la sanctification du peuple chrétien ? » La liturgie est la réalité la plus expressive de la fonction du prêtre. Il est tout le temps sollicité pour célébrer la liturgie. Les fidèles sont attentifs à la manière dont le prêtre célèbre. D’ailleurs, c’est à travers la liturgie qu’ils cherchent le plus souvent à identifier, qualifier ou à disqualifier les prêtres. On entend souvent qu’ils disent tel ou tel prêtre nous aide vraiment à bien célébrer, à bien prier, à bien méditer ect. Ils disent parfois aussi le contraire. C’est pourquoi le pasteur doit soigner l’art de célébrer. 

« Connaître les livres liturgiques et leurs normes, rappelle Sébastien Guiziou, est nécessaire, mais le prêtre n’est pas d’abord un exécutant servile des rubriques. En tant que liturge, il aide l’assemblée à s’unir au Christ qui prie son Père »[77]. Outre sa familiarité avec les livres liturgiques, le missel et l’évaluation régulière de sa pratique comme liturge, le pasteur ne doit pas négliger d’écouter les fidèles et les confrères pour faire grandir la communauté chrétienne dans la sainteté. Le pasteur n’est pas liturge à vase clôt. Il prend le temps de tout creuser pour aider la communauté à faire l’expérience de la présence mystique du Christ ressuscité. 

 

5.3.5. Un pédagogue et un homme de communion

L’Église est « Mater et Magistra » et pour cela, elle se préoccupe de l’éducation des fidèles. Autrement dit, « le vrai sujet de l’éducation liturgique, c’est l’Église ». Elle éduque ses fidèles par la liturgie notamment. L’étape catéchuménale est un bel exemple. Pour cela aussi, le pasteur s’exerce à cette éducation. Il se donne des méthodes appropriées pour le faire. Cela vaut spécifiquement pour l’éducation liturgique des fidèles confiés aux pasteurs. La Constitution sur la sainte liturgie le précise : « Les pasteurs d’âmes poursuivront avec zèle et patience la formation liturgique et aussi la participation active des fidèles, intérieure et extérieure, proportionnée à leur âge, leur condition, leur genre de vie et leur degré de culture religieuse ; ils acquitteront ainsi une des principales fonctions du fidèle dispensateur des mystères de Dieu ; et en cette matière, ils ne conduiront pas leur troupeau par la parole seulement, mais aussi par l’exemple » (SC 19). Cette pédagogie imprègne toute la vie du pasteur car il est « dispensateur des mystères de Dieu – διανομέας των μυστηρίων του Θεού » (cf. 1 Co 4, 1). Il est donc chargé de communiquer aux hommes le mystère du salut par la parole et les sacrements. Pour le faire, il doit se doter d’une bonne pédagogie. Le prêtre initie au mystère. Cela passe par son ars celebrandi. En liturgie, tout est éducation, tout est pédagogie. 

Guider une communauté chrétienne demande de faire des choix pastoraux. Célébrer ou conduire la prière du peuple de Dieu implique des choix pastoraux. Tout n’est pas applicable partout. Il faut tenir compte de la taille de l’assemblée, de l’espace liturgique, de l’âge des fidèles etc. En tant que pédagogue, le pasteur sait se référer aux normes données par l’Église et en même temps cultive le sens de la pratique, de la mesure pour s’adapter à la situation concrète des gens qu’il est appelé à servir dans l’amour. Pour le dire autrement, « il est formateur au sens où il informe, donne forme et conforme la communauté des fidèles qui lui est confiée »[78]. Comme l’a déjà si bien dit Pie XII dans Mediator Dei, « ce qui est le plus urgent et ce qui importe au plus haut point, c’est que les chrétiens vivent de la vie de la liturgie en alimentant et en fortifiant leur esprit ». La Constitution conciliaire l’a repris à son compte : « La liturgie est la source première et indispensable à laquelle les fidèles puisent un esprit vraiment chrétien » (SC 14). Le pasteur forme les fidèles à la liturgie et par la liturgie. Pour cela, il est un éducateur de la foi par le fait même qu’il initie les fidèles à la lex orandi par la lex credendi

Pour cela aussi, le pasteur se familiarise avec les Rituels, le Missel considérés véritablement comme des livres liturgiques et théologiques avec une réelle portée pastorale pour former les fidèles, les éduquer au sens de la liturgie. D’où l’importance des notes doctrinales et pastorales des Rituels, de la Présentation générale du Missel romain (PGMR), des Lectionnaires etc. Ils lui permettent d’« accompagner, de discerner et d’intégrer » les divers rapports aux normes dans des situations concrètes de la vie de foi des fidèles.

Outre ces aspects-là, le pasteur doit être un homme de communion. Il est de fait pontife par le fait même de la liturgie qui est le lieu de la communion, de l’unité. Le dire ainsi, n’est pas tout de même évident. Les différentes sensibilités sont parfois choquantes et hypothèquent à première vue cette communion ou cette unité que prône la liturgie. L’application des normes est parfois sources d’incompréhension et même de conflit. Face à cela, le pasteur doit être toujours du côté des fidèles qui n’ont pas la même formation ou la même sensibilité liturgique que lui. Il doit manifester une certaine bienveillance envers eux. Le bien spirituel des fidèles doit primer sur toute autre chose. Voici ce que dit la PGMR :

 

L’efficacité pastorale de la célébration sera certainement accrue si les textes des lectures, des prières et des chants correspondent bien, dans la mesure du possible, et à l’état de préparation spirituelle et à la mentalité des participants. C’est ce qu’on obtiendra au mieux si l’on profite des multiples possibilités de choix qui vont être énumérées ci-dessous. Par conséquent, le prêtre, en organisant la messe, considérera davantage le bien spirituel du peuple de Dieu que ses inclinations personnelles. Il se rappellera en outre que ce choix des différentes parties devra se faire en accord avec tous ceux qui jouent un rôle dans la célébration, sans exclure aucunement les fidèles pour ce qui les concerne plus directement (n° 352).

 

Dans tout cela, le pasteur n’oublie pas que c’est le Christ qui initie à ses propres mystères. Cette affirmation doit être la porte d’entrée et le fil conducteur de toute l’action pastorale du pasteur dans le cadre de son rapport aux normes de la liturgie car c’est toujours l’Église qui forme à la liturgie. Et c’est le Christ qui est le fondement de cette responsabilité de l’Église de faire entrer les fidèles dans son propre mystère. Le Christ est toujours au premier plan dans la chose liturgique. 

 

 

6. L’art de célébrer 

 

Il y a un écueil à éviter. Quand nous parlons de l’art, il est automatique de voir les beaux tableaux que nous voyons partout dans les rues de Port-au-Prince ou dans les rues de nos grandes villes, les chefs-d’œuvre de nos grands bâtisseurs de monuments etc. 

Nous lions le mot « art » à « artiste » en pensant à nos grands artistes haïtiens (Nemours Jean-Baptiste, Guy Durosier, Toto Bissainthe, Alan Cavé,  Martha Jean-Claude ect)[79]. Mais l’art dépasse tout cela. Une maman qui s’occupe de son enfant avant d’aller à l’école est un art, un dispositif d’accueil qui suscite de l’enthousiasme d’un invité est aussi un art. Il y a un art de faire, de parler, d’agir, de préparer la table, de cuisiner, de mener une conversation etc. 

La liturgie, elle aussi, est un art de faire : architecture, musique, vêtements, ect. La liturgie est fondamentalement un art de l’action[80]. C’est en ce que nous cherchons à creuser davantage « l’art de célébrer ». 

 

 

6.1. Célébrer: un art

 

6.1.1. Quid l’art de célébrer?

D’origine indo-européenne R’tam, le mot « art » signifie « mise en ordre ». L’art de célébrer est la mise en œuvre d’un espace de sensibilité dans la célébration[81]. La liturgie est un art. Elle demande de donner corps et consistance aux gestes, aux paroles, aux musiques, aux objets afin qu’ils aient du sens, qu’ils soient signifiants[82]. L’art de célébrer ne se réduit pas à l’utilisation de vêtements ou d’objets d’art pompeux dans la célébration. On peut très bien porter une chasuble en or très coûteuse et mal célébrer. L’art de célébrer, c’est le fait de célébrer avec art[83]. La Constitution conciliaire sur la liturgie parle de l’harmonie des rites : 

 

Les rites manifesteront une noble simplicité, seront d’une brièveté remarquable et éviteront les répétitions inutiles ; ils seront adaptés à la capacité de compréhension des fidèles et, en général, il n’y aura pas besoin de nombreuses explications pour les comprendre » (SC 34).

 

On peut alors faire une célébration sous un hangar, avec un calice en or et quelques chants ordinaires, et célébrer avec art parce que la mise en ordre les divers éléments de la célébration liturgique est digne et harmonieuse. L’art de célébrer ne consiste pas à vouloir célébrer à une noble paroisse de la Capitale ou à Pétion-Ville. L’art de célébrer s’applique n’importe où se rassemble la communauté chrétienne. Il faut que les rites manifestent « une noble simplicité » comme le demande la Constitution sur la liturgie. La présence de beaux vêtements, d’objets précieux ne suffit pas pour célébrer avec art. Célébrer avec art est avant tout une mise en ordre des éléments importants de la célébration. Une « bonne mise en ordre des éléments visibles, audibles, touchés, goûtés, sentis, qui constituent la célébration et permettent à l’invisible de la foi et de la grâce d’être manifesté »[84]. C’est aussi « une bonne mise en ordre des déplacements, des paroles, des gestes, des lectures et des chants, au bon moment dans le temps, au bon endroit dans l’espace, au bon ton dans la communication, en bonne cohérence avec ce qui précède et suit, en bonne correspondance entre ce qui est fait et ce qui est dit »[85].

Célébrer avec art consiste à faire entrer les fidèles dans l’intelligence du mystère célébré en sachant que toute la liturgie est mystérique et pastorale. Il faut savoir tenir compte du mystère qu’on célèbre et la communauté des fidèles bien concrète qui célèbre. Cela nécessite l’intelligibilité des rites. Nul ne peut concilier les explications inutiles et la catéchèse mystagogique dans la liturgie. L’art de célébrer, c’est en réalité, s’en tenir à l’essentiel. Le mystère est d’une noble simplicité. Célébrer avec art en liturgie, est proprement épiphanique : laisser Dieu se manifester « en empruntant la logique des médiations humaines »[86].

 

6.1.2. La mise en œuvre du concile Vatican II

La réforme conciliaire sur la liturgie a vraiment permis :

·      aux assemblées de célébrer dans leur langue parlée. Ils peuvent prier et entendre la Parole de Dieu dans leur propre langue. Cela constitue un premier bienfait de la réforme qui mérite notre attention encore aujourd’hui en Haïti. Nous avons tendance à vouloir passer à côté de cela dans notre façon de célébrer. Pour certains, l’art de célébrer est l’art de savoir célébrer en français au détriment de la langue créole. Complexe d’infériorité… Dans ce sens, il y a un travail sérieux à faire au niveau de la nouvelle traduction du Missel romain en créole.

·      un retour à la noble simplicité des rites. La première description de la liturgie que saint Justin nous donne dans ses Apologies nous aide à mieux comprendre cette simplicité des rites dès le tout début de la vie liturgique de l’Église. Ce retour à la noble simplicité des rites liturgiques fût déjà le cahier des charges de Pie X, cinquante ans avant la réforme de Vatican II. 

·      une réelle participation active des fidèles à la liturgie même si Pie X le réclama déjà, en 1914. La Constitution sur la sainte liturgie déclare : 

 

La Mère Église désire beaucoup que tous les fidèles soient amenés à cette participation pleine, consciente et active aux célébrations liturgiques, qui est demandée par la nature de la liturgie elle-même et qui, en vertu de son baptême, est un droit et un devoir pour le peuple chrétien, « race élue, sacerdoce royal, nation sainte, peuple racheté » (1 P 2, 9 ; cf. 2, 4-5). Cette participation pleine et active de tout le peuple est ce qu’on doit viser de toutes ses forces dans la restauration et la mise en valeur de la liturgie. Elle est, en effet, la source première et indispensable à laquelle les fidèles doivent puiser un esprit vraiment chrétien ; et c’est pourquoi elle doit être recherchée avec ardeur par les pasteurs d’âmes, dans toute l’action pastorale, avec la pédagogie nécessaire (SC 14).

 

La nature même de la liturgie réclame la participation active des fidèles comme action du corps entier de l’Église, de la plebs sancta. Cette participation est, pour le coup, fondée sur le baptême : c’est par le baptême que nous devenons membres du peuple saint de Dieu, peuple sacerdotal. Faire participer les fidèles à la liturgie n’est pas un privilège ni une faveur, c’est un droit et un devoir pour eux (jus et officium). 

 

6.1.3. La liturgie, épiphanie de l’Église

Jean-Paul II est venu avec cette belle expression, dans sa lettre apostolique La sainte Liurgie (LsL) pour le 25eanniversaire de la Constitution conciliaire « Sacrosanctum concilium » : « Le Concile a voulu voir dans la liturgie une épiphanie de l’Église : elle est l’Église en prière. En célébrant le culte divin, l’Église exprime ce qu’elle est : une, sainte, catholique et apostolique » (LsL 9). C’est à travers sa liturgie que l’Église manifeste ce qu’elle est réellement. C’est par la liturgie que les chrétiens se rassemblent pour constituer véritablement le corps mystique du Christ. 

Pour le Pape François, la liturgie est une « épiphanie de la communion ecclésiale ». Il renforce l’expression de Jean-Paul II : la liturgie est la communion de l’Église. Elle forme à la communion ecclésiale. C’est autour d’elle que s’organise la communauté des baptisés, l’ecclesia. Le mystère de l’Église se déploie d’abord dans la liturgie. En disant que la liturgie est l’épiphanie de l’Église, nous reconnaissons qu’elle a une double fonction : elle constitue et exprime l’Église. On peut prendre en exemple l’Eucharistie, centre et sommet de la vie ecclésiale. C’est en elle que se construit l’unité du corps du Christ. 

La liturgie est l’épiphanie de l’Église puisqu’elle est un mystère d’unité. Elle « contribue au plus haut point à ce que les fidèles, par leur vie, expriment et manifestent aux autres le mystère du Christ et la nature authentique de la véritable Église » (SC, n° 2). Ici, le concile met en évidence la liturgie comme mystère d’unité : l’unité du Christ et de l’Église qui se réalise à travers l’unité des chrétiens réunis autour de l’autel[87]. Mais, ce mystère d’unité est plus visible encore quant tout le presbyterium et les diacres participent à une seule et même eucharistie présidée par l’évêque : « Les actions liturgiques ne sont pas des actions privées, mais des célébrations de l’Église, qui est « le sacrement de l’unité », c’est-à-dire le peuple saint réuni et organisé sous l’autorité des évêques » (SC, n° 26).Cependant, quelque soit la taille de la célébration, mais la plus modeste qu’elle soit, le mystère d’unité ne s’estompe pas. C’est pourquoi au cours de la célébration de l’eucharistie, le nom du pape et de l’évêque du lieu que le prêtre cite n’est pas seulement une prière mais aussi un signe tangible de cette unité.

Épiphanie de l’Église, la liturgie est donc mystère de communion. Elle « est mystère de communion, c’est parce qu’elle est par excellence le lieu où l’union avec Dieu est réalisée par le don de l’Esprit Saint, lui qui est l’Esprit de communion »[88]. Le Christ se manifeste de différentes manières dans les célébrations liturgiques et c’est toujours le même Esprit Saint qui est moteur de ces différentes manifestations : « le Christ est toujours là auprès de son Église, surtout dans les actions liturgiques » (SC, n° 7). Il est donc présent dans l’assemblée qui se réunit autour de lui et dans le prêtre qui préside la célébration, dans l’écoute de la Parole proclamée, dans les sacrements célébrés et au plus haut point dans le pain et le vin eucharistiés. Cette présence, comme le souligne Patrick Prétot, est le gage de l’offre de la communion que le Père adresse à ses enfants[89].

Cela demande nécessairement d’accueillir, d’intérioriser, de recevoir les signes sensibles de la grâce qui est donnée à l’assemblée. Dit autrement, il savoir acceuillir la présence du Christ: 

 

Pour l’accomplissement d’une si grande œuvre, le Christ est toujours là auprès de son Église, surtout dans les actions liturgiques. Il est là présent dans le sacrifice de la messe, et dans la personne du ministre, « le même offrant maintenant par le ministère des prêtres, qui s’offrit alors lui-même sur la croix » et, au plus haut degré, sous les espèces eucharistiques. Il est présent, par sa puissance, dans les sacrements au point que lorsque quelqu’un baptise, c’est le Christ lui-même qui baptise. Il est là présent dans sa parole, car c’est lui qui parle tandis qu’on lit dans l’Église les Saintes Écritures. Enfin il est là présent lorsque l’Église prie et chante les psaumes, lui qui a promis : « Là où deux ou trois sont rassemblés en mon nom, je suis là, au milieu d’eux » (Mt 18, 20). Effectivement, pour l’accomplissement de cette grande œuvre par laquelle Dieu est parfaitement glorifié et les hommes sanctifiés, le Christ s’associe toujours l’Église, son Epouse bien-aimée, qui l’invoque comme son Seigneur et qui, par la médiation de celui-ci, rend son culte au Père éternel. 

 

Chaque geste, chaque parole, chaque attitude, chaque comportement, compte et doit être accomplie avec dignité car tout cela constitue l’enjeu d’une telle épiphanie. 

 

 

6.1.4. S’exercer à l’art de la composition

Célébrer est une entreprise qui nécessite toujours la référence à tout ce qui exprime le plus profond le mystère de la foi et de l’Alliance. Il y a toujours une mise en œuvre des figures symboliques dans l’accomplissement de l’acte sacramentel : le bain d’eau qu’une parole accompagne (le baptême), le repas eucharistique et la fraction du pain (La messe), l’onction des baptisés ou des malades (confirmation et le sacrement des malades) etc. 

 

 

6.1.5. Pour une participation active

La question de la participation active des fidèles occupe une place centrale dans l’enseignement liturgique du Concile. L’expression « participatio actuosa » est le « principe inspirateur » de la réforme conciliaire en matière de liturgie. Alors qu’est-ce que participer activement à la liturgie ? 

 

Participer à la liturgie est, d’abord et avant tout, participer au mystère pascal du Christ pour devenir membres de son corps. La Constitution Lumen Gentium le rappelle fort bien au n° 11 : « Participant au sacrifice eucharistique, source et sommet de toute vie chrétienne, ils (les fidèles) offrent à Dieu la victime divine et s'offrent eux-mêmes avec elle. Ainsi, tant par l’oblation que par la sainte communion, tous, non pas indifféremment mais chacun à sa manière, prennent leur part originale dans l'action liturgique ». Voilà le sens et le cœur de la participation active qui anime nos attitudes, nos gestes, notre écoute, notre chant, notre prière. Elle nous fait vivre ce chemin pascal où, nous dépouillant du vieil homme et convertissant nos cœurs, nous revêtons le Christ dont nous devenons le Corps, un Corps de louange et d'action de grâce au Père « pour sa gloire et le salut du monde »[90].

 

Dans la démarche qui nous concerne, la participation active des fidèles à la liturgie peut être pour nous un « principe inspirateur » pour renouveler notre engagement à marcher ensemble pour une Église particulière plus unie, plus dynamique et plus synodale. La notion de « participation active » met en évidence l’importance du sacerdoce baptismal de tous les fidèles. Il s’agit bien entendu, d’une participation à la fonction sacerdotale du Christ (ministres ordonnés et fidèles laïcs). La Constitution sur la liturgie, Sacrosanctum concilium (SC) l’a exprimé ainsi : « C’est donc à juste titre que la liturgie est considérée comme l’exercice de la fonction sacerdotale de Jésus Christ » (SC 7) et, plus loin : « Pour l’accomplissement de cette grande œuvre par laquelle Dieu est parfaitement glorifié et les hommes sanctifiés, le Christ s’associe toujours l’Église, son Épouse bien-aimée, qui l’invoque comme son Seigneur et qui, par la médiation de celui-ci, rend son culte au Père éternel » (SC 7). Il faut ainsi comprendre que la participation active est une manière de s’approprier l’union de la communauté croyante, de faire sienne la prière de l’Église, de se laisser saisir par le mystère de Dieu célébré dans l’action sacrée, la liturgie. Cette participation active n’est pas uniquement le fait d’accomplir des tâches ou de jouer des rôles particuliers dans l’action liturgique. Il s’agit avant tout d’une disposition intérieure. Cependant, on ne peut pas opposer la participation « extérieure » de la participation « intérieure »[91]. De ce point de vue, le besoin d’éduquer à la liturgie est d’une importance capitale parce que souvent, dans certaines communautés paroissiales, on confond participation et activisme. La participation active dans la liturgie, « ce n’est pas tendre à rendre des célébrations plus attractives ou plus pédagogiques » se serait passer à côté de la compréhension théologique et pratique de cette belle notion. Il faut sortir des schémas corrosifs de la liturgie pour penser la participation active « dans une perspective de structuration sacramentelle de l’Église et de l’existence chrétienne, dans laquelle la foi n’existe qu’en prenant corps »[92]

 

 



[1] Cf. Sébastien Guiziou, « Regard d’un pasteur sur le rapport aux normes liturgiques », Hélène Bricout (dir.), Du bon usage des normes en liturgie, Paris, Cerf, « Lex Orandi, nouvelle série » 9, 2020, p. 17-33.

[2] Patrick Prétot, « Les propositions de la foi dans la liturgie », LMD, 216, 1998/4, p. 81.

[3] Hélène Bricout (dir.), Du bon usage des normes en liturgie, Paris, Cerf, « Lex Orandi, nouvelle série » 9, 2020, p. 9. 

[4] Id.

[5] SC, n° 10.

[6] Cf. Marcel Metzger« Liturgie, sacrements et théologie pastorale » Revue des Sciences Religieuses, tome 63, fascicule 1-2, 1989, p. 106, https://www.persee.fr, consulté le 15.11.2021. 

[7] Ibid., p. 107.

[8] Pierre Jounel« Normes tirées de la nature didactique et pastorale de la liturgie », LMD, 77, p. 61. 

[9] Cf. François Favreau« La pastorale liturgique », Gélineau Joseph (dir.), Dans vos assemblées, manuel de pastorale liturgique, Volume I, Paris, Desclée, 1989, p. 16.

[10] Cf. Ibid., p. 17. 

[11] Lumen gentium (LG), 36. 

[12] Id

[13] Cf. François Favreau« La pastorale liturgique », Gélineau Joseph (dir.), Dans vos assemblées, manuel de pastorale liturgique, p. 18. 

[14] Id.

[15] Cf. Pierre-Marie Gy« Principes généraux pour la restauration et le progrès de la liturgie », LMD, 77, p. 23. 

[16] Id

[17] Pierre-Marie Gy« Principes généraux pour la restauration et le progrès de la liturgie », p. 23.

[18] Jo Hermans« L’étude de la liturgie comme discipline théologique. Problèmes et méthodes », Revue théologique de Louvain, 18e année, fasc. 3, 1987, p. 360, https://www.persee.fr, consulté le 16.11.2021. 

[19] Cf. François Favreau« La pastorale liturgique », Gélineau Joseph (dir.), Dans vos assemblées, manuel de pastorale liturgique, p. 18.

[20] Id

[21] SC 9. 

[22] François Favreau« La pastorale liturgique », Gélineau Joseph (dir.), Dans vos assemblées, manuel de pastorale liturgique, p. 19.

[23] Cf. Jean Deniau« Proposer la foi dans la pastorale sacramentelle », LMD, 216, 1998/4, p. 25. 

[24] François Favreau« La pastorale liturgique », Gélineau Joseph (dir.), Dans vos assemblées, manuel de pastorale liturgique, p. 20.

[25] Id

[26] Id.

[27] Id

[28] SC 26.

[29] SC 10. 

[30] François Favreau« La pastorale liturgique », Gélineau Joseph (dir.), Dans vos assemblées, manuel de pastorale liturgique, p. 20.

[31] Ibid., p. 21. 

[32] Id.

[33] François Favreau« La pastorale liturgique », Gélineau Joseph (dir.), Dans vos assemblées, manuel de pastorale liturgique, p. 21.

[34] Voir James MallonManuel de survie pour les paroisses. Pour une conversion pastorale, Paris, Artège, 2015, p. 81. 

[35] P. RicœurTemps et récit. Le temps raconté, tome 3, Paris, Seuil, « Points » 229, 1985, p. 9. 

[36] François Favreau« La pastorale liturgique », Gélineau Joseph (dir.), Dans vos assemblées, manuel de pastorale liturgique, p. 22.

[37] 6e préface des dimanches. 

[38] 4e préface pascale. 

[39] Toute cette partie est puisée dans François Favreau« La pastorale liturgique », Gélineau Joseph (dir.), Dans vos assemblées, manuel de pastorale liturgique, p. 22.

[40] Id.

[41] Cf. Jean Daniélou« Le mystère liturgique, intervention actuelle de Dieu dans l’histoire », LMD, 79, p. 28. 

[42] Cf. François Favreau« La pastorale liturgique », Gélineau Joseph (dir.), Dans vos assemblées, manuel de pastorale liturgique, p. 22-23.

[43] Ibid., p. 23. 

[44] Voir Pape François, Exhortation apostolique Amoris laetitia, Rome, 2016, n° 296. 

[45] François Favreau« La pastorale liturgique », Gélineau Joseph (dir.), Dans vos assemblées, manuel de pastorale liturgique, p. 23. 

[46] Ibid., p. 24. 

[47]Cf. Id.

[48] Id

[49] Cf. François Favreau« La pastorale liturgique », Gélineau Joseph (dir.), Dans vos assemblées, manuel de pastorale liturgique, p. 24. 

[50] Ibid., p. 24.

[51] Nous approfondirons cette question au 6e point du cours. 

[52] Cf. François Favreau« La pastorale liturgique », Gélineau Joseph (dir.), Dans vos assemblées, manuel de pastorale liturgique, p. 25. 

[53] La question de l’espace liturgique sera amplement développée au 6e point. 

[54] Cf. Jean-Yves Hameline, Une poétique du rituel, Paris, Cerf, « Liturgie » 9, 1997, p. 43. 

[55] Cf. François Favreau« La pastorale liturgique », Gélineau Joseph (dir.), Dans vos assemblées, manuel de pastorale liturgique, p. 26. 

[56] Cf. Les évêques de FranceCatéchisme pour adultes. L’Alliance de Dieu avec les homes, Paris, Centurion, Cerf, (all.), 1991, p. 221-223. 

[57] François Favreau« La pastorale liturgique », Gélineau Joseph (dir.), Dans vos assemblées, manuel de pastorale liturgique, p. 27.

[58] François Favreau« La pastorale liturgique », Gélineau Joseph (dir.), Dans vos assemblées, manuel de pastorale liturgique, p. 27.

[59] Placide Pernot« La notion de communauté dans les actes de Vatican II. Un thème théologique fondamental », LMD, 91, 65-75. 

[60] Centre National de la Pastorale Liturgique, Exultet. Encyclopédie pratique de la liturgie,  Louis-Michel Renier (dir.), Paris, Bayard, 2000, p. 358. 

[61] Cf. Sébastien Guiziou, « Regard d’un pasteur sur le rapport aux normes liturgiques », Hélène Bricout (dir.), Du bon usage des normes en liturgie, Paris, Cerf, « Lex Orandi, nouvelle série » 9, 2020, p. 17-33.

[62] Cf. Ibid., p. 18. 

[63] Sébastien Guiziou, « Regard d’un pasteur sur le rapport aux normes liturgiques », Hélène Bricout (dir.), Du bon usage des normes en liturgie, p. 19. 

[64] Guardini Romano, L’Esprit de la liturgie, Éditions Parole et Silence, 2007, p. 16. 

[65] Id.

[66] Ibid., p. 22. 

[67] Id

[68] Sébastien Guiziou, « Regard d’un pasteur sur le rapport aux normes liturgiques », Hélène Bricout (dir.), Du bon usage des normes en liturgie, p. 24. 

[69] Sébastien Guiziou, « Regard d’un pasteur sur le rapport aux normes liturgiques », Hélène Bricout (dir.), Du bon usage des normes en liturgie, p. 27.

[70] Rituel de l’initiation chrétienne des adultes (RICA), note 2, p. 21. 

[71] Cf. Jean-Pierre Kalongisa Munina, La mystagogie, clé d’interprétation à la liturgie chrétiennehttps://www.connaissances-savoirs.com, consulté le 20.12.2021.

[72] Sébastien Guiziou, « Regard d’un pasteur sur le rapport aux normes liturgiques », Hélène Bricout (dir.), Du bon usage des normes en liturgie, p. 27.

[73] Id.

[74] Claude Dagens« La proposition de la foi et la liturgie de l’Église », LMD, 216, 1998/4, p. 12. 

[75] La catéchèse mystagogique d’après les papes Benoît XVI et François, https://catechese.catholique.fr, consulté le 20.12.2021.

[76] Id.

[77] Sébastien Guiziou, « Regard d’un pasteur sur le rapport aux normes liturgiques », Hélène Bricout (dir.), Du bon usage des normes en liturgie, p. 29.

[78] Sébastien Guiziou, « Regard d’un pasteur sur le rapport aux normes liturgiques », Hélène Bricout (dir.), Du bon usage des normes en liturgie, p. 30.

[79] Voir Top 10 des plus grands chanteurs haïtiens, https://selonwalter.com, consulté le 21.12.2021.

[80] Cf. Centre national de pastorale liturgiqueL’art de célébrer, t. 1, Paris, Cerf, « Guides Célébrer » 9, 2003, p. 9. 

[81] Cf. Exultet, p. 272. 

[82] Id

[83] Centre national de pastorale liturgiqueL’art de célébrer, t. 1, p. 13. 

[84] Ibid., p. 14.

[85] Centre national de pastorale liturgiqueL’art de célébrer, t. 1, p. 14. 

[86] Ibid., p. 15. 

[87] Michel Wackenhem50 idées reçues en liturgie, Paris, Éditions Salvator, 2013, p. 25. 

[88] Ibid., p. 23. 

[89] Ibid., p. 24. 

[90] Serge Kerrien« La participation active des fidèles durant la messe »https://liturgie.catholique.fr, consulté le 11/06/2022.

[91] Voir Patrick Prétot, « Retrouver la ²participation active² : une tâche pour aujourd’hui », LMD 241, 2005/1, p. 172.

[92] Voir Louis-Marie ChauvetSymbole et sacrement. Une relecture sacramentelle de l’existence chrétienne, Paris, Cerf, « Cogitatio fidei » 144, 1987, 2011, p. 11-162.

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