INTRODUCTION À LA LITURGIE / GRAND SÉMINAIRE NOTRE-DAME

FICHE PÉDAGOGIQUE

 

OBJECTIF : 

Ce cours est donné aux séminaristes de la première année de Philosophie du Grand Séminaire Notre-Dame en guise d’introduction à la liturgie dans le cadre de leur formation au ministère presbytéral. Il leur permettra, dans une démarche introductive, d’entrer dans l’intelligence de la foi par la formation liturgique. La lex orandi et la lex credendisous-tendront cette démarche formative.



DESCRIPTIF : 

À partir de la constitution conciliaire Sacrosanctum Concilium et la lettre apostolique Desiderio desideravi du Pape François sur la formation liturgique du peuple de Dieu, ce cours a pour but d’introduire les étudiants à s’initier au mystère de la liturgie de l’Église : « lex orandilex credendi – l’Église prie comme elle croit ». 

 

 

MODE D’ÉVALUATION :

Une diversité de mode est proposée : 

1°)  Rédaction d’une fiche de lecture, d’un ouvrage ou d’un document sur la liturgie (il faut présenter l’ouvrage et le plan au professeur avant de commencer à rédiger) : 5 pages maximum : interligne 1.5, police times new roman taille 12) ou travaux dirigés. 

2°) Travail sur table à la fin du cours.

Participation au cours (Travaux personnels) : 40% ; Examen final : 60% (à la fin du cours).

____________________________

 

 

PLAN DU COURS

 

CHAPITRE I

LA  LITURGIE DE L’ÉGLISE

 

1.1 Liturgie : définition et sens

1.1.1. La nature de la liturgie dans la perspective de Vatican II

1.1.2. La liturgie, acte de l’Église

1.1.3. Le mystère de la liturgie

1.1.4. Les acteurs de la liturgie

1.1.4.1. Le Christ et l’Église : acteurs de la liturgie

1.1.4.2. La participation des fidèles à la liturgie

 

1.2. L’Eucharistie, centre de la liturgie

1.3. La Liturgie des Heures : louange du Mystère

1.4. Liturgie et vie spirituelle : le mystère pascal au cœur de notre vie chrétienne

1.5. Conception limitée de la liturgie

 

 

CHAPITRE II

L’ÉVOLUTION DE LA LITURGIE À TRAVERS LES SIÈCLES

 

 

2.1. De la dernière Cène à la résurrection du Christ : la célébration du mystère pascal

 

2.2. L’Âge apostolique et l’Église des martyrs (Première étape)

2.3. L’Âge des Pères de l’Église (Deuxième étape)

 

2.4. Le Moyen-Âge (Troisième étape)

 

2.5. La réforme catholique et le renouveau liturgique

2.5.1. La réforme catholique : 16e – 18e siècles (Quatrième étape)

2.5.2. Le renouveau liturgique : 19e – 20e siècles (Cinquième étape)

 

 

CHAPITRE III

LA CÉLÉBRATION

 

3.1. Les éléments de la célébration 

 

3.2. L’espace de la célébration

 

 

CHAPITRE IV

LA COMMUNICATION DANS LA LITURGIE

 

4. 1. Le langage liturgique

 

4.2. Les vêtements liturgiques

 

4.3. Les objets liturgiques

 

 

Conclusion 

 

 

 

 

 

 

 

BIBLIOGRAPHIE 

 

1.             Sources liturgiques

 

·      Association épiscopale de liturgie pour les pays francophones, L’art de célébrer la Messe. Présentation générale du Missel romain, 3e édition typique 2002, Paris, Desclée-Mame, 2008.

·      Centre national de pastorale liturgiqueDu bon usage de la liturgie, Paris, Cerf, « Guides Célébrer » 4, 1999.

·      Centre national de pastorale liturgiqueL’art de célébrer, t. 1, Paris, Cerf, « Guides Célébrer » 9, 2003. 

·      Centre national de pastorale liturgiqueL’art de célébrer, t. 2, Paris, Cerf, « Guides Célébrer » 10, 2003. 

·      HosannaNouveau Missel biblique, Paris, Tardy, Droguet-Ardant, C.M.R., 1986.

·      Les Moines de SolesmesMissel grégorien des dimanches noté en chant grégorien, Solesmes, 1985. 

·      Missel romain (Nouvelle traduction française)

·      Vatican II, Constitution sur la liturgie, Sacrosanctum Concilium.

 

 

  2. Ouvrages et articles

 

·      Bouyer Louis, La vie de la liturgie, Paris, Cerf, 1956. 

·      Bradshaw Paul, La liturgie chrétienne en ses origines, Paris, Cerf, 1995.

·      Bugnini Annibale, La réforme de la liturgie, Paris, Desclée de Brouwer, 2015.  

·      Congar Yves et Jossua Jean-Pierre (dir.), La liturgie après Vatican II, Paris, Cerf, « Unam Sanctam » 66, 1967.

·      Dalmais Irénée-Henri, Initiation à la liturgie, Paris, Desclée de Brouwer, 1958. 

·      De Clerck Paul, L’Intelligence de la liturgie, Paris, Cerf, « Liturgie » 4, 19953.

·      De Clerck Paul, Vivre et comprendre la messe, Paris, Cerf, 2016, 51-104.

·      Favreau François, Liturgie, Paris, Desclée, 1983. 

·      Gazzola Isaïa, « La célébration du mystère chrétien dans la liturgie », La liturgie, une piété moderne, Jean-Louis Souletie (dir.), Paris, Salvator, 2016, p. 129-151.

·      Gitton Michel, Initiation à la liturgie romaine, Paris, Ad Solem, 2003.

·      Guardini Romano, L’Esprit de la liturgie, Éditions Parole et Silence, 2007.

·      Marsili Salvatore, « Liturgie », Dictionnaire encyclopédique de la liturgie, Belgique, Brepols, 1992, 629-640.

·      Martimort Aimé-Georges, L’Église en prière. Introduction à la liturgie, Tournai (Belg.), Desclée & Co., 1961. 

·      Marini Guido (Mgr), La liturgie, gloire de Dieu, sanctification de l’homme, France, Artège, 2013.

·      Metzger Marcel, Histoire de la liturgie, Paris, Desclée de Brouwer, 1994. 

·      Renier Louis-Michel (dir.), Exultet. Encyclopédie pratique de la liturgie, Paris, Bayard, 2000. 

·      Ratzinger Joseph, L’Esprit de la liturgie, Ad Solem, 2001.

·      Steinmetz Michel, Entrer en liturgie, t. 2, Paris, Mame-Desclée, 2014. 

·      Vezin Jean-Marie et Villemin Laurent, Les sept défis de Vatican II, Paris, Desclée de Brouwer, 2012. 

La liturgie est le sommet 
auquel tend l'action de l'Église 
et en même temps la source 
d'où découle toute sa vertu (SC, n° 10).

 

 

INTRODUCTION 

 

L’enseignement de la liturgie dans les séminaires et les maisons d’études des religieux doit être placé parmi les disciplines nécessaires et majeures, et dans les facultés de théologie parmi les disciplines principales et il faut le dispenser dans sa perspective théologique et historique aussi bien que spirituelle, pastorale et juridique. En outre, les maîtres des autres disciplines, surtout de théologie dogmatique, d’Écriture Sainte, de théologie spirituelle et pastorale, se préoccuperont, selon les exigences intrinsèques de chaque objet propre, de faire ressortir le mystère du Christ et l’histoire du salut, si bien qu’on voie apparaître clairement le lien de ces disciplines avec la liturgie et l’unité de la formation sacerdotale. 

Les clercs, dans les séminaires et les maisons religieuses, acquerront une formation liturgique à la vie spirituelle, par une bonne initiation qui leur donne l’intelligence des rites sacrés et les y fasse participer de toute leur âme, et aussi par la célébration même des saints mystères et par les autres exercices de piété, imprégnés d’esprit liturgique ; également, ils apprendront à observer les lois liturgiques, de telle sorte que la vie des séminaires et des maisons de religieux soit profondément façonnée par l’esprit de la liturgie. 

Les prêtres, séculiers ou religieux, déjà à l’œuvre dans la vigne du Seigneur, seront aidés par tous les moyens opportuns à comprendre toujours plus pleinement ce qu’ils accomplissent dans les fonctions sacrées, à vivre de la vie liturgique et à la partager avec les fidèles qui leur sont confiés (SC, n° 16-18).

 

Ce texte conciliaire nous introduit d’emblée dans un vaste sujet qu’est la liturgie selon l’héritage de Vatican II. La liturgie comme célébration de la foi, doit être vécue de manière renouvelée en gardant intact ce qui est immuable. Elle est une source vivifiante pour la croissance de notre vie chrétienne. 

À la lumière de la réforme conciliaire, nous prendrons la liturgie comme constante pour mieux percevoir le regard de Dieu comme déterminant de toute action liturgique sans lequel elle perd son orientation et son sens. Pour tenter d’y arriver, nous aborderons dans un premier chapitre, la liturgie de l’Église ; son évolution à travers les siècles dans un second chapitre ; la célébration dans un troisième chapitre et, dans un quatrième chapitre, le dernier, la communication dans la liturgie. 

 

N.B : Nous devons en grande partie ces notes de cours au Monastère Sainte-Claire de Salaberry-de-Valleyfield, « Initiation au Mystère de la Liturgie de l’Église », http://www.clarissesval.ca, consulté le 26 novembre 2022. 

 

 

 

 

CHAPITRE I

LA  LITURGIE DE L’ÉGLISE

 

1.1. Liturgie : définition et sens

 

En effet, la liturgie, par laquelle, surtout dans le divin sacrifice de l’Eucharistie, « s’exerce l’œuvre de notre rédemption », contribue au plus haut point à ce que les fidèles, en la vivant, expriment et manifestent aux autres le mystère du Christ et la nature authentique de la véritable Église. Car il appartient en propre à celle-ci d’être à la fois humaine et divine, visible et riche de réalités invisibles, fervente dans l’action et adonnée à la contemplation, présente dans le monde et cependant en chemin. Mais de telle sorte qu’en elle ce qui est humain est ordonné et soumis au divin ; ce qui est visible à l’invisible ; ce qui relève de l’action à la contemplation ; et ce qui est présent à la cité future que nous recherchons. Aussi, puisque la liturgie édifie chaque jour ceux qui sont au-dedans pour en faire un temple saint dans le Seigneur, une habitation de Dieu dans l’Esprit, jusqu’à la taille qui convient à la plénitude du Christ, c’est d’une façon admirable qu’elle fortifie leurs énergies pour leur faire proclamer le Christ, et ainsi elle montre l’Église à ceux qui sont dehors comme un signal levé sur les nations, sous lequel les enfants de Dieu dispersés se rassemblent dans l’unité jusqu’à ce qu’il y ait un seul bercail et un seul pasteur (SC, n° 2).

 

            Qu'est-ce que la LITURGIE ? Que signifie ce terme et cette réalité que nous vivons tous les jours au cœur de l'Église notre Mère? Partons d’abord de son étymologie : le mot liturgie, de l'adjectif grec leitos, qui appartient au peuple (public), et du nom commun ergon : « service », « œuvre », « travail ». La liturgie est donc étymologiquement un « service public », une œuvre faite au bénéfice du peuple. La liturgie est en fait, « l’œuvre que les hommes accomplissent à l’égard de Dieu en l’occurrence ». Dans les démocraties grecques, leitourgia désigne tout service rendu au bien commun par les citoyens, mais particulièrement la fonction publique dont le titulaire supportait les dépenses et qui consistait à organiser les chœurs, les jeux, etc. 

 Au 3e siècle (entre 250-150) avant Jésus Christ, la traduction grecque de l'Ancien Testament de la Septante rend le terme hébreu 'abodah (service du culte) par leitourgia. Elle emploie ce mot pour désigner le service des prêtres et des lévites dans le Temple. La Liturgie devient le service religieux et rituel rendu à Dieu par la communauté rassemblée en son Nom.  Dans le Nouveau Testament, le mot se présente aussi plusieurs fois en ce sens. Lc 1, 23 : « Lorsqu'il (Zacharie) eut achevé son temps de service (liturgie) au Temple, il repartit chez lui ». Et encore  He 10,11 : « Tout prêtre, chaque jour, se tenait debout dans le Lieu saint pour le service liturgique, et il offrait à maintes reprises les mêmes sacrifices, qui ne peuvent jamais enlever les péchés ». Le Christ est appelé « liturge du Sanctuaire et de la véritable Tente »  (cf. He 8,2).

 

La Liturgie est en effet une réalité vivante, riche et une à la fois. On ne la comprend bien qu'en y prenant part. On ne peut bien la définir qu'en entrant dans l'expérience que l'Église nous fait vivre tout au long de notre vie chrétienne. La Liturgie c'est en effet la prise de conscience de l'Église comme corps social, en ce qui la constitue ici-bas : être la dispensatrice du Mystère du Salut dans l'humanité. Pour le Concile Vatican II, la Liturgie est « le sommet auquel tend l'action de l'Église et, en même temps la source d'où découle toute sa vigueur » (SC, n° 10). Mais la meilleure définition de la liturgie, selon la réforme conciliaire est celle-ci : « La liturgie est considérée comme l’exercice de la fonction sacerdotale de Jésus Christ, exercice dans lequel la sanctification de l’homme est signifiée par des signes sensibles et réalisée d’une manière propre à chacun d’eux, et dans lequel le culte public intégral est exercé par le Corps mystique de Jésus Christ, c’est-à-dire par le Chef et par ses membres » (SC n° 7).

En d’autres termes, la liturgie apparaît comme le culte que les baptisés rendent au Père, par le Fils, dans l’Esprit Saint. C’est un culte par lequel les chrétiens se trouvent transformés et deviennent pour ainsi dire, eux-mêmes le Christ (ipse Christus) en s’offrant à Dieu le Père. C’est pourquoi la liturgie est l’œuvre de Dieu et de l’homme. C’est vraiment une mise en scène de la foi. Car la liturgie suppose le déroulement d’un certain nombre de rites, de paroles, de gestes et de symboles. L’espace liturgique, la décoration, le temps, les couleurs, les chants, l’odeur de l’encens, la disposition des mobiliers liturgiques évoquent et signifient quelque chose. La Parole de Dieu proclamée dans son lieu (l’ambon) et non sur un pupitre quelconque souligne son importance dans la liturgie, car le Christ « est là présent dans sa parole, car c’est lui qui parle tandis qu’on lit dans l’Église les Saintes Écritures » (SC, n° 7). La centralité et la dignité de l’autel indique également l’importance de l’Eucharistie comme « source et sommet de la vie chrétienne » (LG, n° 11). 

Dans cette mise en scène qu’est la liturgie, les baptisés ne sont pas spectateurs. Ils participent à la liturgie et ceci, de manière consciente et active. Dans une liturgie réussie, tous les participants se reconnaissent acteurs : « Un seul préside, mais tous célèbrent ». La liturgie est « une action du sacerdoce du Christ confié à l’Église, mise en œuvre dans l’espace et dans le temps pour la sanctification des hommes et le culte qu’ils rendent à Dieu » note Louis-Marie Chauvet.

 

 

1.1.1. La nature de la liturgie dans la perspective de Vatican II

 

            L'Église, depuis plus de cinquante ans, a profondément réfléchi et découvert la richesse de sa Liturgie : « Par conséquent, toute célébration liturgique, en tant qu’œuvre du Christ prêtre et de son Corps qui est l’Église, est l’action sacrée par excellence dont nulle autre action de l’Église ne peut atteindre l’efficacité au même titre et au même degré » (SC, n° 7). Dès son encyclique Mediator Dei, en 1947, Pie XII apportait à l'Église une heureuse définition de la Liturgie qui deviendra, au Concile Vatican II, le fondement de sa Constitution qui nous était donnée en 1963, premier Document du Concile.

 

L’Église, fidèle au mandat reçu de son fondateur, continue donc la fonction sacerdotale de Jésus-Christ, principalement par la sainte liturgie. Elle le fait d’abord à l’autel, où le sacrifice de la croix est perpétuellement représenté et renouvelé, la seule différence étant dans la manière de l’offrir; ensuite par les sacrements qui sont pour les hommes les moyens spéciaux de participer à la vie surnaturelle ; enfin par le tribut quotidien de louange offert à Dieu, Souverain Bien. « Quel joyeux spectacle n’offre pas au ciel et à la terre l’Église en prière, dit Notre prédécesseur Pie XI, d’heureuse mémoire. Sans interruption, tout le jour et toute la nuit, se répète sur la terre la divine psalmodie des chants inspirés ; il n’est pas d’heure du jour qui ne soit sanctifiée de sa liturgie propre, il n’est pas de période de la vie qui n’ait sa place dans l’action de grâces, la louange, les demandes et la réparation de cette solennelle et commune prière du Corps mystique du Christ, qui est l’Église (MD, intr. L’Église continue la fonction sacerdotale de Jésus Christ).


            Après avoir écarté des définitions anciennes de la Liturgie qui faisaient d'elle une chose toute extérieure et accessoire, le Pape Pie XII soulignait la réalité surnaturelle qu'elle contient. Il invitait à en chercher la compréhension dans le sacerdoce du Christ et aussi, dans une juste notion de l'Église, Corps mystique du Christ. « La Liturgie n'est pas autre chose que l'exercice de cette fonction sacerdotale du Christ ».

            Dans la Constitution Sacrosanctum concilium sur la Liturgie, promulguée le 4 décembre 1963, le Concile a donné les principes généraux pour la restauration et le progrès de la Liturgie, ainsi qu'un enseignement sur la nature de la Liturgie et son importance dans la vie de l'Église : a. c’est l’œuvre du salut accomplie par le Christ ; b. une œuvre continuée par l’Église qui se réalise dans la liturgie ; c. pour laquelle le Christ est présent dans la liturgie. Pour cela, il est bon de reprendre le n° 7 de SC que nous venons de citer ci-dessus :

 

C'est à juste titre que la liturgie est considérée comme l'exercice de la fonction sacerdotale de Jésus-Christ, exercice dans lequel la sanctification de l'homme est signifiée par des signes sensibles et est réalisée d'une manière propre à chacun d'eux, dans lequel le culte public intégral est exercé par le Corps mystique de Jésus-Christ, c'est-à-dire par le Chef et par ses membres. Par suite, toute célébration liturgique, en tant qu'œuvre du Christ prêtre et de son Corps qui est l'Église, est l'action sacrée par excellence dont nulle autre action de l'Église ne peut atteindre l'efficacité au même titre et au même degré.

 

            On voit ici que cette vision de la Liturgie par le Concile reprend la grande pensée du Pape Pie XII, en particulier au sujet de notre participation au sacerdoce de Jésus Christ. Cependant le Concile Vatican II va plus loin encore, et pour nous, actuellement, nous sommes situés dans cette vaste perspective au sujet de la Liturgie que nous vivons chaque jour. Le Concile ajoute ceci :

1. La Liturgie est tout entière un signe sacré, comme l'Église l'est en ce monde: c’est-à-dire que l'élément visible de la liturgie est signe efficace d'une réalité surnaturelle, présence du Christ et action de l'Esprit Saint. SC, n° 2 le dit expressément, faisant de la Liturgie un signe missionnaire de l'Évangile

 

  La liturgie, par laquelle, surtout dans le divin sacrifice de l'Eucharistie, "s'exerce l'œuvre de notre rédemption", contribue au plus haut point à ce que les fidèles, par leur vie, expriment et manifestent aux autres le mystère du Christ et la nature authentique de la véritable Église. Car il appartient en propre à celle-ci d'être à la fois humaine et divine, visible et riche de réalités invisibles, fervente dans l'action et occupée à la contemplation, présente dans le monde et pourtant étrangère. Mais de telle sorte qu'en elle ce qui est humain est ordonné et soumis au divin; ce qui est visible, à l'invisible; ce qui relève de l'action, à la contemplation; et ce qui est présent, à la cité future que nous recherchons. /.../ C'est d'une façon étonnante qu'elle fortifie leurs énergies (des fidèles) pour leur faire proclamer le Christ, et ainsi elle montre l'Église à ceux qui sont dehors comme un signal levé devant les nations, sous lequel les enfants de Dieu dispersés se rassemblent dans l'unité jusqu'à ce qu'il y ait une seule bergerie et un seul pasteur.

 

2. L'action liturgique fait non seulement monter vers Dieu la prière d'adoration et de supplication de l'Église, mais aussi descendre sur l'Église et ses membres les grâces de la Rédemption.

3. La place et la nature exacte de la Liturgie sont bien éclairées lorsqu'on la situe dans l'économie du salut de Dieu car elle réalise dans le mystère des signes ce que l'Ancien Testament annonçait, ce que le Christ a accompli dans sa Pâque et ce qui apparaîtra dans la Liturgie du ciel. Le Concile a insisté longuement sur cette perspective très vaste du mystère du salut dans la Liturgie.

4. La Liturgie appartient au peuple chrétien qui est député par le baptême à y prendre une part active.

 

 

1.1.2. La liturgie, acte de l’Église

 

            Il n’y a pas d’Église sans la Liturgie, car c'est la Parole de Dieu qui y est à l'œuvre, comme le prophète Isaïe le dit : « La Parole qui sort de ma bouche ne me revient pas sans résultat, sans avoir fait ce que je voulais et réussi sa mission ». La liturgie dans l'Église remplit une double fonction : 1) constituer l'Église et, 2) exprimer l'Église. La première est principalement l'œuvre de la Liturgie des sacrements; la seconde, celle de la liturgie de la louange, celle des signes et des symboles. 

1. La liturgie de l’Eucharistie est au cœur même de la vie de l'Église. Elle en est par excellence le sacrement, signe et lien de l'unité du Corps du Christ. Bien évidemment c'est d'abord aux sacrements de l'initiation chrétienne que l'on pense en parlant de l'acte liturgique qui constitue l'Église. Ils sont, selon l'image des Pères de l'Église, ce sein fécond dans lequel la Mère Église enfante au Christ de nouveaux fils et filles. Par les sacrements, l'Église se construit elle-même dans et par l'Esprit Saint. Tout sacrement qu'elle distribue et reçoit sert à l'édification du Corps du Christ, lui donne vie et l'agrandit. Ainsi l'Église se réalise elle-même dans la mesure où s'accomplit la sanctification sacramentelle des hommes.

2. Le second aspect de l'acte liturgique de l'Église exprime son « Mystère ». Est mystère ce qui au moyen de signes sensibles et de symboles, exprime et rend présent une réalité divine inaccessible de soi en notre condition présente. Cette expression de l'Église par la Liturgie rejoint l'économie de l'Incarnation choisie par Dieu. Ainsi la liturgie sera chargée de tout ce que l'Église intègre en elle d'humain, qu'elle portera la marque et le poids des cultures au sein desquelles elle a germé. De ce fait, elle n'exprime qu'un aspect de la plénitude mystérieuse qu'elle signifie, car ce mystère dépasse notre intelligence. Cependant, à travers et malgré ses limites humaines, l'Église se dit en sa Liturgie, qui est son Acte par excellence, l'exercice de sa mission de salut par lequel elle opère tout au travers du temps et au profit de toutes les races humaines.

 

 

1.1.3. Le mystère de la liturgie

 

            Cette expression très riche du « mystère de la Liturgie » a trouvé une grande place dans la liturgie rénovée depuis le Concile. Ce mot « mysterion » a été traduit par « sacramentum » dans l'Église latine occidentale. Précisons toute la richesse de cette expression du « mystère » chrétien qu'est la liturgie.

Au début, pour mieux situer et synthétiser ce « mystère », il est bon de rappeler deux extraits de saint Jean : « Le Verbe s'est fait chair et il a habité parmi nous » (Jn 1, 14) et « Voici comment Dieu a manifesté son amour parmi nous : Dieu a envoyé son Fils unique dans le monde pour que nous vivions par lui. Voici à quoi se reconnaît l'amour : ce n'est pas nous qui avons aimé Dieu, c'est lui qui nous a aimés, et il a envoyé son Fils qui est la victime offerte pour nos péchés.» (1 Jn 4, 9-10). Le mystère est là pleinement exprimé quand nous prenons conscience qu'il s'agit de Dieu. Car la venue de Dieu dans le monde signifie une transformation radicale du sens des choses et de l'histoire. Le mystère de l’Incarnation et le mystère pascal changent tout. Si le Christ est né, mort et ressuscité, nous n'avons d'autre chose à faire qu'à nous le redire et à entrer dans ce Mystère qui seul réalise l'union du temps et de l'éternité, de Dieu et de l'humanité. C'est là ce que l'Écriture nous révèle si souvent, ce que l'Église proclame et réalise dans son Eucharistie.

            En Dieu, ce Mystère est celui de l'Amour qui veut éternellement nous sauver et nous amener à la consommation par l'Incarnation du Verbe, son Fils. Dans le Christ, lieu de l'union, le même mystère d'unité et du salut de l'humanité se réalise concrètement. Et c'est par la Liturgie de l'Église, instituée par le Christ, que toute l'humanité entre dans ce même et unique Mystère de l'Amour de Dieu.

C'est surtout l'Apôtre Paul qui a le mieux compris ce terme si riche du « mystère ». Revoyons en raccourci, dans ses Lettres, les principaux aspects de ce terme. On peut distinguer dans sa pensée trois degrés en progression continue : 

a. Au premier, « mystère » est l'équivalent de secret, mais dans le sens de « révélation » :

« Nous proclamons la sagesse du mystère de Dieu, sagesse tenue cachée, prévue par lui dès avant les siècles, pour nous donner la gloire » (1 Co 2, 7).

b. Au second, « mystère » prend un sens précis : c'est l'accès des nations à l'héritage des biens divins, au même titre qu'Israël : « Voilà le mystère qui est maintenant révélé : il était resté dans le silence depuis toujours, mais aujourd'hui il est manifesté. Par ordre du Dieu éternel, et grâce aux écrits des prophètes, ce mystère est porté à la connaissance de toutes les nations pour les amener à l'obéissance de la foi » (Rm 16, 25-26). 

c. Au troisième sens, « mystère » se personnifie et devient un nom du Christ : « Assurément, il est grand le mystère de notre religion : c'est le Christ manifesté dans la chair, justifié par l'Esprit, apparu aux anges, proclamé chez les païens, accueilli dans le monde par la foi, enlevé au ciel dans la gloire » (1 Tm 3,16). C'est cette dernière précision qui sera retenue pour la Liturgie de l'Église. Le Christ est le médiateur unique du dessein de salut et en même temps il accomplit et résume en Lui ce dessein de Dieu tout entier. Quand il est apparu sur terre comme Dieu Sauveur, c'est vraiment le Mystère qui s'est manifesté dans la chair. Cependant, c'est seulement au jour de sa Résurrection, quand il est constitué Seigneur, que le Christ s'identifie pleinement au Mystère et en exprime toutes les dimensions, car alors il domine le temps et la brisure de la création, et fait de l'humanité croyante son propre Corps en son Église.

        

   

 

1.1.4. Les acteurs de la liturgie

 

Dans la liturgie, nous sommes invités par Dieu le Père à nous réunir au nom de son Fils Jésus, sous l’action du Saint-Esprit, pour célébrer le Mystère pascal. La Très Sainte Trinité est l’origine, le contenu et le centre de toute la liturgie chrétienne, comme nous l’enseigne le Catéchisme de l’Église catholique (CEC, n° 1110): « Dans la liturgie de l’Église Dieu le Père est béni et adoré comme la source de toutes les bénédictions de la création, et du salut, dont Il nous a béni en son Fils, pour nous donner l’Esprit de l’adoption filiale ». 

Ainsi, la liturgie n’est autre que Dieu qui agit dans l’histoire de chaque homme et le Saint-Esprit qui chante, grâce à l’Église, Corps mystique du Christ, un chant d’amour au Père. Nous pouvons dire que la liturgie est la rencontre vivante de Dieu avec son peuple grâce à l’action de l’Église. Il nous faut cependant souligner, comme l’affirme SC, que la liturgie n’épuise pas toute l’action de l’Église. 

Par la liturgie, nous célébrons et nous vivons le mystère de notre salut accompli en Jésus Christ. Avez-vous remarqué qu’au cours de notre étude nous affirmons toujours que nous célébrons la liturgie ? Mais qui donc célèbre la liturgie? 

 

 

1.1.4.1. Le Christ et l’Église : acteurs de la liturgie

La liturgie est « l’action » du « Christ total » : Christus et Ecclesia. SC affirme que la liturgie est l’action de l’Église – définie comme le sacrement de l’unité – et que ses célébrations appartiennent à tout le « corps de l’Église, c’est-à-dire le peuple saint réuni et organisé sous l’autorité des évêques ». Nous pouvons donc dire que nous tous, en tant que « communauté des baptisés » réunis par la Très Sainte Trinité, nous célébrons la liturgie. SC, n° 28 et 29 nous donne de quoi réfléchir sur notre manière de célébrer : 

 

Dans les célébrations liturgiques, chacun, ministre ou fidèle, en s’acquittant de sa fonction, fera seulement et totalement ce qui lui revient en vertu de la nature de la chose et des normes liturgiques.

Même les servants, les lecteurs, les commentateurs et ceux qui font partie de la Schola cantorum s’acquittent d’un véritable ministère liturgique. C’est pourquoi ils exerceront leur fonction avec toute la piété sincère et le bon ordre qui conviennent à un si grand ministère, et que le peuple de Dieu exige d’eux à bon droit. 

Aussi faut-il soigneusement leur inculquer l’esprit de la liturgie, selon la mesure de chacun, et les former à tenir leur rôle de façon exacte et ordonnée.

 

Revenons maintenant à la question initiale: Qui célèbre la liturgie? Et ajoutons quelques autres questions pour élargir notre réflexion. Comment est-elle célébrée? Quelles fonctions sont-elles exercées pendant la célébration? Quelles en sont les conclusions? 

Ce que l’on peut affirmer c’est qu’« il y a diversité de ministères, mais il n’y a qu’un seul et même Seigneur » (cf. 1 Cor 12, 4). Toute l’assemblée est « liturge », chacun selon sa fonction. Nous avons ainsi une assemblée et plusieurs ministères suscités par le Saint-Esprit en sa faveur. 

Les fonctions et les offices exercés pendant les célébrations liturgiques, sont définis selon le ministère exercé. Il y a trois sortes de ministère, qui se présentent tous comme un service, et non comme un honneur. Ce sont:  

a.  les ministères ordonnés; 

b.  les ministères institués; 

c.  les ministères confiés. 

 

a) Ministères ordonnés: évêque, prêtre et diacre 

Ce sont des ministères normalement exercés par l’évêque ou par le prêtre, et parfois par le diacre, ordonné lui aussi. On les nomme présidents de la célébration. Le président de la célébration représente le Christ, tête de son Corps, l’Église. 

En certains cas, la célébration peut être faite par un diacre. Il est au service de la Parole de Dieu lors de la proclamation de l’Évangile et au service de l’autel lorsqu’il accompagne le célébrant principal. Son ministère évoque le Christ qui est venu pour servir et non pour être servi. Il peut aussi exercer d’autres fonctions ministérielles. 

b) Ministères institués : les acolytes et les lecteurs 

La Présentation Générale du Missel Romain (PGMR), au chapitre III, décrit les fonctions et les ministères lors de la messe. Parmi les fonctions décrites se trouve celle de l’acolyte (n° 98), 

« L’acolyte est institué pour servir à l’autel et pour aider le prêtre et le diacre. C’est à lui principalement qu ́il revient de préparer l ́autel et les vases sacrés et, si cela est nécessaire, de distribuer aux fidèles l ́Eucharistie dont il est le ministre ». Puis celle du lecteur : « Le lecteur est institué pour proclamer les lectures de l’Écriture sainte, excepté l’Évangile. Il peut aussi proposer les intentions de la prière universelle et, en l´absence d’un psalmiste, dire le psaume entre les lectures » (PGMR, n° 99).

La PGMR (n° 100) détermine encore qu’en l’absence d’un acolyte institué les ministres laïcs peuvent aider le prêtre et le diacre dans le service de l’autel, en ajoutant comment : 

« ...ils portent la croix, les cierges, l ́encensoir, le pain, le vin et l ́eau. Ils peuvent même être délégués pour distribuer la communion comme ministres extraordinaires ». 

De même, tout laïc avisé et préparé à cela, peuvent, en l’absence d’un lecteur institué,  faire les lectures de l’Écriture sainte, à l’exception de l’Évangile. Il peut aussi proposer les intentions de la prière universelle, et encore, en l’absence du psalmiste, réciter le psaume entre les lectures. 

c) Ministères confiés: 

Ce sont les ministères confiés à un membre de la communauté, par un geste liturgique ou une forme canonique, comme prévu dans les documents de l’épiscopat de chaque pays, qui traitent de la mission et des ministères des chrétiens laïques.

Nous trouvons encore dans la PGMR l’affirmation suivante (PGMR, n° 107): 

« Les fonctions liturgiques qui ne sont pas réservées au prêtre ou au diacre et dont il est question ci-dessus (n°. 100-106) peuvent aussi être confiées, par une bénédiction liturgique ou une délégation temporaire, à des laïcs idoines, choisis par le curé ou le recteur de l église ». 

Les Ministres extraordinaires de la Sainte Communion sont des laïcs (hommes et femmes) idoines qui rendent un service liturgique ou de charité. Leur fonction est de distribuer la communion pendant la messe ou hors de la messe, aux malades ou autres personnes ayant une bonne raison de la demander; l’admnistration du viatique; en l’absence d’un prêtre ou d’un diacre, l’exposition du Saint Sacrement pour l’adoration des fidèles (mais, soulignons-le, en aucun cas la bénédiction); ils peuvent encore diriger des veillées mortuaires. Cependant, toutes ces fonctions ne doivent être exercées qu’en cas de besoin, c’est-à-dire quand il n’y a pas de ministres ordonnés disponibles ou en nombre suffisant. Autres fonctions ou services liturgiques: 

Il y a encore d’autres ministères qui ne sont pas institués, mais qui peuvent être un service liturgique stable ou occasionnel. Ce sont les servants d’autel, les lecteurs, les psalmistes, les équipes d’animation liturgique, les chanteurs, les instrumentistes, les sacristains, ceux qui font la quête pendant la messe, ceux qui accueillent les fidèles, les maîtres de cérémonie etc. (cf. PGMR, n° 105). 

 

1.1.4.2. La participation des fidèles à la liturgie

La liturgie est une œuvre ecclésiale. En chaque acte liturgique, l’Église est engagée. En revanche, la première réalité visible de la liturgie chrétienne est la communauté rassemblée, l’assemblée sainte, le Peuple sacerdotal, rassemblé au nom du Christ, qui jouit de la certitude de sa présence et reçoit de Lui le mandat de répéter ses gestes et ses paroles « en sa mémoire ». Cette assemblée est donc une manifestation privilégiée du Corps du Christ, et exprime une conviction et une réalité qui nous aident à comprendre la primauté de l’assemblée dans les célébrations liturgiques. 

On rencontre souvent dans l’Ancien Testament des références aux grandes assemblées du peuple d’Israël, qui écoute la Parole de Dieu, lui adresse sa prière et célèbre les gestes symboliques de l’Alliance. Le peuple se sentait convoqué par le Seigneur. Dans le Nouveau Testament, la convocation de l’assemblée se fait autour du Christ et s’appelle l’Église - le peuple convoqué et rassemblé. 

Au long des siècles, « jamais l’Église ne manqua de se réunir pour célébrer le Mystère Pascal », surtout l’Eucharistie dominicale, le dimanche étant, depuis la première génération, le jour par excellence de la réunion de l’assemblée chrétienne, le jour pascal (cf. SC, n° 6). 

La motivation n’est pas seulement pédagogique ou sociologique – l’assemblée liturgique chrétienne « dépasse les affinités humaines, raciales, culturelles et sociales » (CEC, 1097) – mais surtout théologique: « Dans la célébration de la messe, les fidèles constituent le peuple saint, le peuple acquis par Dieu et le sacerdoce royal » (PGMR, n° 95).

Le peuple sacerdotal, la communauté des baptisés, se réunit pour célébrer le mystère de la Nouvelle Alliance en ayant toujours la conviction de la présence, invisible, mais réelle, de son Seigneur, Jésus Christ, qui a promis : « Quand où deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis là, au milieu d’eux » (Mt 18, 20). L’assemblée est le lieu d’élection de la présence du Seigneur. 

Chaque assemblée liturgique est en même temps l’aboutissement et l ́épiphanie (la manifestation) de toute l’Église: « Le peuple de Dieu, qui se rassemble pour la messe, forme une assemblée organisée et hiérarchique, qui s ́exprime par la diversité des ministères et des actions » (PGMR, n° 294 ; cf. 91). 

L’assemblée chrétienne est celle qui célèbre l’Eucharistie sous la présidence du ministre, qui la conduit en rendant visible le véritable président, le Christ: « À la messe ou Cène du Seigneur, le peuple de Dieu est convoqué et rassemblé, sous la présidence du prêtre, qui agit en la personne du Christ, pour célébrer le mémorial du Seigneur, ou sacrifice eucharistique (PGMR, n° 27). L’assemblée liturgique n’est donc pas un groupe quelconque de personnes rassemblées pour un but déterminé. Elle est le Peuple de Dieu, « une communauté de fidèles, hiérachiquement constituée, légitimement rassemblée et hautement qualifiée par une présence particulière et salutaire du Christ ». 

Nous pouvons conclure que la réunion de l’assemblée liturgique doit avoir un sens objectif, communautaire et écclésial, et non pas un sens subjectif et personnaliste, même s’il est clair que, dans la liturgie, le chrétien ne perd pas son individualité, ses traits personnels et subjectifs ; ceux-ci, d’ailleurs, doivent être mis au service de l’acte célébratif, car dans la liturgie le « moi » psychologique et individuel se fond dans le « nous » communautaire et liturgique, non seulement au sens physique et « spatial », mais au sens spirituel et mystique. 

L’assemblée liturgique est donc le peuple rassemblé par Dieu, qui, par la foi, répond à sa Parole. Elle est différente de tout autre groupe de personnes. Elle réunit les enfants de Dieu, unis par la même foi en Jésus-Christ et avec le même objectif : servir leurs frères. Elle diffère aussi par la manière dont elle prend part à la célébration. Elle cherche à s’engager dans la célébration de tout son être : corps, esprit et âme, afin de vivre intensément le mystère célébré. 

L’assemblée liturgique, tout en nous rendant tous égaux en Christ, exerce des fonctions différentiées du fait qu’elle est organisée d’une manière hiérarchique, comme nous l’indique SC, n° 26 : 

« C’est pourquoi ces célébrations appartiennent au Corps tout entier de l’Église, elles le manifestent et elles l’affectent ; mais elles atteignent chacun de ses membres, de façon différente, selon la diversité des ordres, des fonctions, et de la participation effective ». Pour cela aussi, notre agir liturgique doit se dérouler en parfaite syntonie avec l’assemblée, en ayant toujours présentes les paroles de l’Écriture: « qu’il n’y ait pas de division dans le corps, mais que les différents membres aient tous le souci des uns et des autres » (cf. 1 Co 12, 25). 

La participation des fidèles à la liturgie ne se limite pas à faire des choses extérieures, mais qu’elle engage une mise en présence du Seigneur, pour que le peuple devienne communicator[1] de la vie christique ou pascale. Ce passage de SC peut nous en éclairer : 

 

Aussi l’Église se soucie-t-elle d’obtenir que les fidèles n’assistent pas à ce mystère de la foi comme des spectateurs étrangers et muets, mais que, le comprenant bien dans ses rites et ses prières, ils participent de façon consciente, pieuse et active à l’action sacrée, soient formés par la Parole de Dieu, se restaurent à la table du Corps du Seigneur, rendent grâces à Dieu ; qu’offrant la victime sans tache, non seulement par les mains du prêtre, mais aussi en union avec lui, ils apprennent à s’offrir eux-mêmes et, de jour en jour, soient consommés, par la médiation du Christ, dans l’unité avec Dieu et entre eux pour que, finalement, Dieu soit tout en tous (SC, n° 48). 

 

Cependant, à la lumière de SC, n° 30, on peut lire le numéro ci-dessus ainsi : la participation active englobe « écoute de la parole de Dieu », « communion sacramentelle et action de grâce », « offrande de l’Église entière au Père qui, par le Christ (et dans l’Esprit), « communion (participation) avec Dieu »[2].

 

 

1.2. L’Eucharistie, centre de la liturgie

 

            L’Eucharistie est au centre et au sommet de la Liturgie. Jésus l'a instituée pour son Épouse, l'Église. Par cette parole définitive : « Faites ceci en mémoire de moi », à la dernière Cène, et cet autre parole aussi mémorable au jour de sa montée vers son Père : « Je suis avec vous tous les jours jusqu'à la fin du monde ». SC précise cette centralité de l’Eucharistie en matière liturgique : « C'est donc de la liturgie, et principalement de l'Eucharistie, comme d'une source, que la grâce découle en nous et qu'on obtient avec le maximum d'efficacité cette sanctification des hommes dans le Christ, et cette glorification de Dieu, que recherchent, comme leur fin toutes les autres œuvres de l'Église » (SC, n° 10).

            Dans sa lettre encyclique Ecclesia de Eucharistia (EE), sur l’Eucharistie dans son rapport à l’Église, Jean-Paul II rappelle : « L'Église vit de l'Eucharistie. Cette vérité n'exprime pas seulement une expérience quotidienne de foi, mais elle comporte en synthèse le cœur du Mystère de l'Église... Dans l'Eucharistie, par la transformation du pain et du vin en corps et sang du Seigneur, elle jouit de cette présence avec une intensité unique. L'Église a le regard constamment fixé sur son Seigneur, présent dans le sacrement de l'autel, dans lequel elle découvre la pleine manifestation de son immense amour » (EE, n° 1).  Plus loin, il souligne : « L'Église naît du mystère pascal. C'est pour cela que l'Eucharistie, sacrement par excellence du mystère pascal, a sa place au centre de la vie ecclésiale » (EE, n° 3). Centralité qui implique la liturgie dans son déploiement mystérique.  Cœur de la liturgie et de l’Église, l’Eucharistie est la source vitale de la vie chrétienne car tous les autres sacrements de l’Église gravitent autour d’elle.  Encore plus,        

           

L'Eucharistie, présence salvifique de Jésus dans la communauté des fidèles et nourriture spirituelle pour elle, est ce que l'Église peut avoir de plus précieux dans sa marche au long de l'histoire. Ainsi s'explique l'attention empressée qu'elle a toujours réservée au Mystère eucharistique, attention qui ressort de manière autorisée dans l'œuvre des Conciles et des Souverains Pontifes. Comment ne pas admirer les exposés doctrinaux des décrets sur la sainte Eucharistie et sur le saint Sacrifice de la Messe promulgués par le Concile de Trente? Au cours des siècles qui ont suivi, ces pages ont guidé la théologie aussi bien que la catéchèse, et elles sont encore une référence dogmatique pour le renouveau continuel et pour la croissance du peuple de Dieu dans la foi et l'amour envers l'Eucharistie (EE, n° 9).

 

Et, 

 

Quand l'Église célèbre l'Eucharistie, mémorial de la mort et de la résurrection de son Seigneur, cet événement central du salut est rendu réellement présent et ainsi « s'opère l'œuvre de notre rédemption ». Ce sacrifice est tellement décisif pour le salut du genre humain que Jésus Christ ne l'a accompli et n'est retourné vers le Père qu'après nous avoir laissé le moyen d'y participer comme si nous y avions été présents. Tout fidèle peut ainsi y prendre part et en goûter les fruits d'une manière inépuisable. Telle est la foi dont les générations chrétiennes ont vécu au long des siècles. Cette foi, le Magistère de l'Église l'a continuellement rappelée avec une joyeuse gratitude pour ce don inestimable (EE, n° 11).

 

Action du Christ et de l’Église, la célébration de l’Eucharistie est le centre de toute la vie chrétienne (cf. LG, n° 11). C’est toute l’Église qui accueille et célèbre ce don que Jésus Christ fait de lui-même pour nous manifester concrètement et sacramentellement l’amour infini de Dieu. Benoît XVI dans Sacramentum caritatis (Sc) renforce notre conviction eucharistique comme acte d’amour du Christ pour nous : « Sacrement de l'amour, la sainte Eucharistie est le don que Jésus Christ fait de lui-même, nous révélant l'amour infini de Dieu pour tout homme. Dans cet admirable Sacrement se manifeste l'amour « le plus grand », celui qui pousse « à donner sa vie pour ses amis » (Jn 15, 13) » (Sc, n° 1).  En effet,

 

à travers le Sacrement de l'Eucharistie, Jésus fait entrer les fidèles dans son « heure »; il nous montre ainsi le lien qu'il a voulu entre lui et nous, entre sa personne et l'Église. En effet, le Christ lui-même, dans le Sacrifice de la croix, a engendré l'Église comme son épouse et son corps. Les Pères de l'Église ont médité longuement sur la relation entre l'origine d'Ève, issue du côté d'Adam endormi (cf. Gn 2, 21-23), et celle de la nouvelle Ève, l'Église, née du côté du Christ, immergé dans le sommeil de la mort: de son côté transpercé, raconte Jean, il sortit du sang et de l'eau (cf. Jn 19, 34), symbole des sacrements. (30) Un regard contemplatif vers « celui qu'ils ont transpercé » (Jn 19, 37) nous conduit à considérer le lien causal qui existe entre le sacrifice du Christ, l'Eucharistie et l'Église. L'Église, en effet, « vit de l'Eucharistie ». (31) Puisqu'en elle se rend présent le sacrifice rédempteur du Christ, on doit avant tout reconnaître qu'« aux origines mêmes de l'Église, il y a une influence causale de l'Eucharistie ». (32) L'Eucharistie est le Christ qui se donne à nous, en nous édifiant continuellement comme son corps. Par conséquent, dans la relation circulaire suggestive entre l'Eucharistie qui édifie l'Église et l'Église elle-même qui fait l'Eucharistie, la causalité première est celle qui est exprimée dans la première formule: l'Église peut célébrer et adorer le mystère du Christ présent dans l'Eucharistie justement parce que le Christ lui-même s'est donné en premier à elle dans le Sacrifice de la croix. La possibilité, pour l'Église, de « faire » l'Eucharistie est complètement enracinée dans l'offrande que le Christ lui a faite de lui-même. Nous découvrons ici aussi un aspect convaincant de la formule de saint Jean: « Il nous a aimés le premier » (1 Jn 4, 19). Ainsi, dans chaque célébration, nous confessons nous aussi le primat du don du Christ. L'influence causale de l'Eucharistie à l'origine de l'Église révèle en définitive l'antériorité non seulement chronologique mais également ontologique du fait qu'il nous a aimés « le premier ». Il est pour l'éternité celui qui nous aime le premier.

 

 

1.3. La Liturgie des Heures : louange du Mystère

 

« Vivez dans la prière et les supplications ; priez en tout temps, dans l'Esprit ; apportez-y une vigilance inlassable et intercédez pour tous les saints » (Eph 6, 18).

« Restez toujours joyeux. Priez sans cesse. En toute condition soyez dans l'action de grâces. C'est la volonté de Dieu sur vous dans le Christ Jésus » (1 Th 5, 16-18).

 

Comme son nom l’indique, depuis la réforme conciliaire, la Liturgie des Heures (LH) se déroule au long du jour. Elle a pour but de sanctifier le nom de Dieu et de l’invoquer. Elle est fondamentalement une école quotidienne de prière de l’Église, car les psaumes, éléments-clés de la Parole de Dieu et de la liturgie des Heures, ont un rôle et une fonction pédagogique (cf. Col 3, 16 ; Ep 5, 19-20). Elle est un lieu théologique, un lieu de rencontre et de dialogue entre Dieu et l’homme. Elle est une action liturgique au même titre que les autres célébrations liturgiques de l’Église. La réforme conciliaire est consciente de cette réalité quand elle fait passer du terme « Bréviaire » à celui de « Liturgie des Heures ». « Il y a un double mouvement dans la liturgie: celui qui va de l'homme vers Dieu (l'ouverture de Vêpres le chante ainsi: que notre prière devant toi s'élève comme l'encens) et celui, toujours premier, qui va de Dieu vers l'homme. La liturgie est un lieu où Dieu nous initie à sa présence et nous apprend l'écoute. La liturgie des heures est une prière structurée qui existe avant de devenir la prière de chacun. Nous la recevons d’une Église, nous n’avons pas à l’inventer! Celui qui prie avec la Prière de l’Église accepte de se dessaisir un peu de lui-même : il n’a pas choisi l’hymne, un psaume de joie lui est proposé alors qu’il est dans la peine (ou l'inverse)... En ce sens, la liturgie est une école de prière »[3].

SC, dans son fameux chapitre IV, nous introduit, de manière noble à cette louange des Heures qui est le symbole de la prière continuelle de l'Église. Au numéro 83, nous lisons ceci : « Le Souverain Prêtre de la nouvelle et éternelle Alliance, le Christ Jésus, prenant la nature humaine, a introduit dans notre exil terrestre cet hymne qui se chante éternellement dans les demeures célestes. Il s'adjoint toute la communauté des hommes et se l'associe dans ce divin cantique de louange. En effet, il continue à exercer cette fonction sacerdotale par son Église elle-même qui, non seulement par la célébration de l'Eucharistie, mais aussi par d'autres moyens et surtout par l'accomplissement de l'office divin, loue sans cesse le Seigneur et intercède pour le salut du monde entier ».

La Liturgie des Heures est la « voix de l'Épouse » comme le décrit si justement le Concile. Il ne suffirait donc pas de voir dans la Liturgie des Heures une prière proposée aux communautés et aux personnes comme un modèle à suivre, l'expression parfaite de leur propre prière. Bien plus, elle est destinée à remplir une part essentielle de la mission même de l'Église, une de ses fonctions principale. Car l'Église doit être à la fois « fervente dans l'action et occupée à la contemplation » (SC, n° 2). Sa prière est vraiment « la voix de l'Épouse elle-même qui s'adresse à son Époux » (SC, n° 84), pour le louer, lui rendre grâce de son œuvre rédemptrice, implorer son secours dans le combat. C'est pourquoi d'ailleurs cette prière s'insère si profondément dans l'histoire du salut. Là, l'Église intercède aussi pour le monde entier. La Présentation générale de la Liturgie des Heures présente avec vérité ce sens fécond et maternel de la Prière des Heures : « Ce n'est pas seulement par la charité, par l'exemple et par les œuvres de pénitence, mais également par la prière que la communauté ecclésiale exerce un véritable rôle maternel envers les âmes pour les conduire au Christ. Ceux qui participent à la Liturgie des Heures contribuent donc par une mystérieuse fécondité apostolique à accroître le peuple du Seigneur » (PGLH, n° 17-18).

 

 

LA SIGNIFICATION DES HEURES

La liturgie des Heures, comme son nom l’indique, se déroule au long du jour. Son but est de louer et invoquer Celui qui a envoyé son Fils dans notre monde qui passe pour le sauver et le consacrer.

L'office de la nuit: les Vigiles

Cet office, organisé en deux vigiles la semaines, et trois les dimanches et jours de fêtes et solennités, est peut-être plus que tout autre construit autour de la parole de Dieu: à l'alternance des psaumes répondent des lectures.

Les Lectures de cet Office sont assez longues, contrairement aux autres Offices consacrés plus spécialement à la louange.

Les Répons, empruntés soit au texte même, soit à des parallèles, que nous chantons les dimanches, jours de fête et de solennité, jouent un rôle important pour l’assimilation de la Parole biblique et pour orienter vers sa lecture chrétienne.

La Deuxième Lecture présente un texte des Pères de l’Église, d'auteurs plus contemporains ou, les jours de mémoire, des extraits des œuvres significatives de la spiritualité du saint que l’on célèbre.

Les dimanches et fêtes, un cantique est chanté et l’Évangile du jour proclamé.

L’Office du Matin

Comme l’indique l’appellation traditionnelle de “Laudes”, l’Office du Matin est caractérisé par la louange: pour la création, pour l’histoire sainte du Salut, pour les mystères du Seigneur. À la foi chrétienne, l’aube rappelle l’heure de la résurrection

Une autre orientation de la Liturgie du matin consiste à "prévoir" le jour qui arrive. Lectures et prières prévoient la journée avec son cortège de travail, de rencontres, d’épreuves et de joies, en invitant à y vivre la foi au Ressuscité.

Les "petites heures"

Tertullien de Carthage précise que l'on doit prier : à la troisième heure (9h), parce que c'est l'heure où l'Esprit Saint descendit sur les Apôtres à la Pentecôte; à la sixième heure (12h), car c'est celle de la crucifixion; et à la neuvième (15h), qui est celle de la mort du Christ.

Ces Heures sont brèves. Les hymnes et les oraisons sont en fonction de l’heure qu’il est : matinée, midi ou après-midi. Ainsi elles se rapportent à l’Esprit Saint, pour Tierce, à la Passion et au combat pascal pour Sexte, et à la mort de Jésus et la nôtre, pour None. Ces Heures sont brèves. Les hymnes et les oraisons sont en fonction de l’heure qu’il est : matinée, midi ou après-midi. Ainsi elles se rapportent à l’Esprit Saint, pour Tierce, à la Passion et au combat pascal pour Sexte, et à la mort de Jésus et la nôtre, pour None.

Aujourd'hui encore, nos offices de tierce, sexte et none, correspondent (grosso modo) à ces heures.

L'office du Soir

L’Office du Soir chante le Mémorial de la nouvelle Alliance. L'action de grâces est une de ses caractéristiques essentielles. Au sommet de cette Heure, faisant suite au Cantique du Nouveau Testament, et à la lecture (qui est toujours tirée du Nouveau Testament), vient le cantique évangélique de Marie (le Magnificat), figure de l’Église de tous les temps, pour «les merveilles que le Seigneur a faites.»

Une autre caractéristique de l’Office du Soir est l’espérance de la gloire, la fin au-delà des temps, l’attente de la manifestation du Seigneur en gloire entraînant toute l’humanité avec Lui. Cette espérance est présente à tous les offices du Soir.

Complies

Cette fois, la journée est presque finie mais avant de retrouver le repos de la nuit, nous prions encore pour la journée écoulée, pour la nuit qui se prépare, évocation de la mort. Le rite est bref : une hymne, trois psaumes, une lecture brève avec son répons reprenant la dernière parole de Jésus sur la croix, le cantique de Syméon, une oraison, la bénédiction et le Salve Regina grégorien..

Cf. Abbaye Notre-Dame de Bonne-Espérance, « La liturgie des Heures ».

 

 

1.4. Liturgie et vie spirituelle : le mystère pascal au cœur de notre vie chrétienne

 

            À quoi sert la Liturgie? Cette question se pose souvent dans son lien avec notre vie spirituelle, intérieure, notre lien d'union avec Dieu. Comment, chaque jour, la Liturgie me rejoint-elle pour m'unir à Dieu? Une vie spirituelle authentique s'épanouit nécessairement par la Liturgie et dans la Liturgie. La Liturgie donne le sens, l'esprit, la forme à toute vraie spiritualité chrétienne, en même temps qu'elle lui offre un certain cadre. Chaque chrétien peut y éprouver au mieux le réalisme de son être spirituel, à la fois personnel et communautaire.

            Et même, la vie chrétienne à sa racine, prend une forme pascale. La vie spirituelle du chrétien, commencée au baptême, s'actualise et se fortifie par l'Eucharistie, et c'est toute sa vie qui est saisie dans le mystère pascal de Jésus, en assumant toutes les diminutions et les croissances qui font parties intégrantes de tout être humain. C'est à la lumière de la liturgie que le chrétien peut lire les événements de sa propre vie et leur trouver un sens ultime.

            Par la Liturgie, l'âme chrétienne apprend la bénédiction, la louange et surtout l'action de grâce dans une vie spirituelle authentique, s'ouvrant ainsi avec ses frères et sœurs à la plénitude du don de Dieu. Car dans la Liturgie, l'âme chrétienne affirme en effet que la mort est vaincue dans le Christ, que la puissance des ténèbres a été renversée par la force du Ressuscité, et cette affirmation de foi engendre l'action de grâce ecclésiale: « Vraiment il est juste et bon pour ta gloire et notre salut de te rendre grâce toujours et en tout lieu ».

 

 

1.5. Conception limitée de la liturgie

 

1. Conception rubriciste. Indiquons d'abord quelques manières un peu limitées de voir ou vivre la Liturgie de l'Église. D'abord celle qui voit la liturgie comme un lieu de rubriques, là où il faut réaliser les indications de l'Ordo, par exemple.

Les rubriques cependant, les introductions, sont importantes. Ce sont souvent des justifications de l'aspect spirituel et théologique, la raison de telle structure. Ces textes de rubriques gagnent à être connus, en particulier celui de l'introduction au Missel ainsi que l'introduction à la Liturgie des Heures. Mais ceci étant dit, la Liturgie ne consiste pas en ces prescriptions.
             2. Conception esthétique, cultuelle: un cérémonial. Ou encore une manière de voir ou vivre la Liturgie comme un moment purement esthétique, comme un cérémonial de cour. Autrefois, on appelait ainsi la Liturgie de la messe, une cérémonie. De même une conception cultuelle. Une telle façon de voir n'est pas suffisante pour exprimer le mystère de la Liturgie. Le culte, c'est un acte de la vertu de religion. La vertu de religion c'est le respect dû à Dieu dans son mystère, et le culte, c'est la façon de manifester extérieurement ce respect et cette soumission. Quelque chose de cela se trouve dans la Liturgie, mais ce n'est pas profondément cela. La liturgie n'est pas d'abord un acte de la personne humaine, ni de l'Église, mais c'est d'abord un acte de Dieu au sein de la communauté ecclésiale. Dieu accomplit une réalité au milieu de son Église assemblée et nous y entrons par la foi et le rite.

3. Liturgie comme moyen de grâce. Une autre conception limitée est devenue courante, beaucoup plus fréquente que nous le pensons : voir la Liturgie comme un moyen de grâce, ce qu'elle est évidemment. Ainsi l'Eucharistie, c'est la présence du Seigneur mort et ressuscité dans son mystère pascal même. Il ne vient pas s'offrir à nous simplement comme un moyen de grâce, mais il vient pour nous insérer en lui. Ainsi le rite de la manducation exprime l'intensité inouïe de l'unité, puisque c'est une sorte d'absorption de l'un par l'autre. Ainsi des autres sacrements de l'Église.

 

 

CHAPITRE II

L’ÉVOLUTION DE LA LITURGIE À TRAVERS LES SIÈCLES

 


            Pour mieux comprendre la pratique de la Liturgie actuelle, il sera bon de parcourir les étapes de son évolution à travers les âges qui nous ont précédés. 

 

 

2.1. De la dernière Cène à la résurrection du Christ : la célébration du mystère pascal

 

            C'est Jésus lui-même qui a inauguré le rythme hebdomadaire de la réunion chrétienne en apparaissant aux apôtres réunis au Cénacle le troisième jour après sa mort, qui était le premier jour de la semaine juive (Mt 28,1; Mc 16,2; Lc 24,1; Jn 20, 1-19).

Aux pratiques ancestrales, les premiers chrétiens ajoutent leurs propres réunions :    « Ils étaient fidèles à écouter l'enseignement des Apôtres et à vivre en communion fraternelle, à rompre le pain et à participer aux prières » (Ac 2,42). Nous n'avons pas de précisions sur le déroulement de ces célébrations eucharistiques dominicales, sans doute encore liées au repas.

            L'une des premières sources d'information sur la vie liturgique des premières communautés chrétiennes nous est fournit par la première Lettre de saint Paul aux Corinthiens. Il y donne des règles pour le bon ordre dans les assemblées (ch 12-14) et pour la célébration eucharistique (ch 11, 2-33).

 

 

2.2. L’Âge apostolique et l’Église des martyrs (Première étape)

 

            L'Église hérite de la tradition juive : les historiens de la Liturgie chrétienne découvrent de plus en plus ses racines juives très profondes. A cette Liturgie juive s'ajoutent le Baptême et l'Eucharistie, l'Ordination des ministres et la sanctification du temps. Nous sommes désormais en présence d'une liturgie bien constituée et nous voyons apparaître les premiers formulaires liturgiques dont nous sommes encore bénéficiaires. La célébration pascale en particulier nous est décrite en détail. Importance du Dimanche : jour de la résurrection.

Les martyrs et les Pères réfléchissent sur les données de la foi au mystère pascal. Importance du Baptême: illumination chrétienne. Et de l'Eucharistie. Saint Justin, philosophe martyr vers 165, écrit : « Cette ablution s'appelle illumination, parce que ceux qui reçoivent cette doctrine ont l'esprit rempli de lumière. Et aussi au nom de Jésus Christ, qui fut crucifié sous Ponce-Pilate, et au nom de l'Esprit Saint qui prédit par les prophètes toute l'histoire de Jésus, est lavé celui qui est illuminé ».

2.3. L’Âge des Pères de l’Église (Deuxième étape)

 

            Dès le 3e siècle, à la faveur des périodes de tolérance qui suivent les persécutions, les chrétiens possèdent dans les villes leurs lieux de culte, mais ce ne sont encore que des édifices modestes et discrets. Avec la paix de l'Église et les conversions en masse, il va falloir, avec l'aide de la munificence des empereurs, construire de vastes édifices pouvant servir de lieu d'assemblée au peuple chrétien. Les basiliques. Chaque ville aura désormais sa basilique épiscopale, lieu de l'assemblée dominicale. Mais il y aura aussi, dans les lieux de pèlerinage, des martyria, basiliques élevées sur les tombeaux des martyrs ou les lieux saints, comme saint Pierre du Vatican, ou à Jérusalem, la basilique de la Résurrection, ou du Saint-Sépulcre, ou celle de la Nativité, à Bethléem. Dans ces grandes basiliques urbaines, les Églises locales vont organiser des réunions quotidiennes de prières, matin et soir, auxquels tout le peuple chrétien est convié. Ces offices du matin et du soir, en se combinant avec les offices que célèbrent les moines aux heures traditionnelles de la prière, tierce, sexte et none et pendant la nuit, vont donner naissance au cycle quotidien de la Liturgie des Heures.

            Le cycle annuel de la liturgie à cette époque repose sur un seul pivot : la fête de Pâques renouvelée chaque dimanche. Jusqu'au 4e siècle, le Pascha évoque non seulement la résurrection, mais aussi la mémoire de la passion et de la mort du Christ.

            Mystagogie des Pères: saint Cyrille de Jérusalem, saint Ambroise, saint Jean Chrysostome...Les Pères, s'ils composent des traités théologiques, sont d'abord et surtout des pasteurs qui s'adressent à leur peuple au cours des célébrations liturgiques. Ils créent ainsi un nouveau genre littéraire : l'homélie, qui est une explication simple et familière, mais pourtant profonde et théologique, de la parole de Dieu proclamée au cours de la célébration. Ils expliquent aussi les rites introduisant ainsi aux mystères célébrés par la liturgie. Exemple : Saint Grégoire de Naziance (+ 390): 

 

Cette illumination est l'éclat fulgurant des âmes, transformation du cours de la vie, mettant la conscience en quête de Dieu. Cette illumination est pour notre faiblesse un secours: mettant de côté la chair, elle fait suivre l'Esprit et entrer en communion avec le Verbe. Redressement de la nature créée dont elle submerge le péché, elle donne part à la lumière et anéantit les ténèbres. Cette illumination fait monter vers Dieu, partager la route du Christ; elle est l'appui de la foi, la perfection de l'intelligence, la clé du Royaume des cieux. Transformation de la vie, suppression de la servitude, libération des liens, elle est une amélioration totale de l'être. Cette illumination est, de tous les dons de Dieu, le plus beau et le plus magnifique. Aussi, comme on parle du Saint des saints et du Cantique des cantiques, ils comprennent que la transfiguration du baptême est l'illumination par excellence, étant donné qu'elle est la plus sainte de toute celle de la terre (Sermon 40).

 

 

2.4. Le Moyen-Âge (Troisième étape)

 

            Après le 7e siècle, commence un processus de fusion entre la liturgie romaine et celle des Églises plus récentes de Gaule et du Nord des Alpes. Les forces motrices de ce mouvement ont été autant la haute estime dont jouissait partout l'Église romaine du fait de la succession de Pierre, que l'incertitude et l'insatisfaction de beaucoup d'évêques et d'abbés face à la diversité des liturgies dans leurs régions. C'était un motif important pour rattacher les tribus franques et germaniques à Rome et à sa liturgie.  Première rupture en ce qui concerne le mystère liturgique. Précision sur le nombre de sacrements.

Recherche du signe essentiel et nécessaire du sacrement qui remplace une réflexion plus profonde sur le mystère (comme au temps des Pères).

Vers la fin du 8e siècle, s'introduisit peu à peu la coutume de ne plus dire le canon de la messe qu'à voix basse. On légitime cette pratique en disant qu'à ce moment le prêtre pénètre au plus intime du mystère et qu'il faut préserver les paroles sacrées de toute profanation.
                    Au 9e siècle se réalise la fixation du latin qui, de langue vivante en constante évolution, devient une langue morte fixée une fois pour toutes. Alors que le latin n'est plus parlé par le peuple dans aucune région, c'est lui seul qui est enseigné dans les écoles. Il fournit aux clercs un langage qui transcende les frontières. Ce changement fut lourd de conséquence sur le plan liturgique.

            À cause de la langue latine, obligatoire depuis le 9e siècle, apparaît la tendance à allégoriser les rites de la messe. Puisque la liturgie devient de plus en plus un spectacle qui se déroule dans une langue incomprise, on vise à donner une signification à tous les éléments extérieurs qu'on pouvait voir. Dans la succession des rites de la messe, par exemple, on verra les grands événements de l'histoire du salut et une mise en scène de la vie du Seigneur. Cette interprétation allégorique de la liturgie devint universelle. C'est elle qui fut employée par tous les liturgistes du Moyen-Âge. Voici comment Guillaume Durand, évêque de Mende, à la fin du 13e siècle commente le geste du sous-diacre apportant le calice et la patène à l'autel :


          Le sous-diacre porte le calice à gauche, parce que le Christ a bu de l'eau du torrent en son chemin, c'est-à-dire qu'il a souffert la passion en cette vie; on porte la patène à droite, parce que, par la croix, il est parvenu à la gloire; c'est pourquoi Dieu l'a exalté; avec le corporal par-dessus parce que l'Église ne cesse d'imiter sa passion. On blanchit le corporal : et l'Église se moule sur le Christ à travers un grand nombre de tribulations. Notre sous-diacre, c'est-à-dire le Christ, a porté la patène avec le calice, quand il a porté la croix dans sa passion (Livre 4, 30,26).


            Évidemment cela déconcerte nos esprits actuels, formés à une certaine rigueur scientifique. Mais la pensée directrice de la méthode allégorique était juste. C'est grâce à elle que le peuple fidèle a compris que la messe commémore le mystère de la mort et de la résurrection du Christ et le rend présent pour que les membres de l'assemblée s'y unissent.

            Malgré cette tentative pour maintenir un certain contact entre la liturgie et le peuple, on ne réussit pas à empêcher qu'un fossé se creuse entre vie liturgique d'une part et piété personnelle d'autre part. La liturgie devient la chose des prêtres qui la célèbre dans le chœur séparé de la nef des fidèles par un jubé très haut, tandis que les fidèles créent spontanément des formes nouvelles de piété. Tendance à mettre par écrit les rubriques et les cérémonies. À cette époque, on s'éloigne de la profondeur du mystère liturgique.
            Le peuple réagit par l'apparition des dévotions entourant l'humanité du Christ. Ainsi ne disparaît pas la mémoire du mystère pascal. Communion rare, peu fréquente, en dehors de la messe pour les fidèles. Le prêtre communie seul, comme représentant le peuple de Dieu. Adoration de l'Hostie comme substitut à la communion. La piété des fidèles se coupe de plus en plus des sources liturgiques.

L'Office divin aussi est allégorisé. Méditation des mystères de Jésus durant la célébration de l'Office. Piété individuelle et pénitentielle. Développement des indulgences. Vie liturgique florissante en cérémonies, mais très extérieure.

 

 

2.5. La réforme catholique et le renouveau liturgique

 

À la fin du 15e siècle, un monde nouveau apparaît. L'invention de l'imprimerie et l'humanisme, c'est-à-dire une nouvelle vision de l'homme, de sa place dans l'univers inspirée de la redécouverte de la civilisation gréco-romaine antique. C'est dans ce climat que Martin Luther, en Allemagne, prenant prétexte du scandale d'une prédication sur les indulgences, dénonce les abus trop réels de l'Église de son temps et entre en lutte avec la papauté.
            Dans le milieu des humanistes chrétiens qui rêvent de combiner la sagesse antique avec le christianisme, se fait jour le désir d'une réforme liturgique procurant un accès plus large à la Bible et aux Pères de l'Église et on verra ainsi apparaître un nouveau Bréviaire vers 1535, ce bréviaire comportant chaque jour deux lectures de la Bible, de l'Ancien et du Nouveau Testament, et une lecture des Pères. Le Concile de Trente entreprend alors d'éliminer de la vie liturgique et dévotionnelle toute trace de superstition et d'avarice. Il affirme sa volonté d'unification liturgique et confie au Saint-Siège la révision des livres liturgiques et du calendrier.

En 1568 et 1570, le pape saint Pie V promulgue le Bréviaire et le Missel romain, demeurés en usage, le premier jusqu'en 1911, et le second jusqu'en 1970. 

            Durant la Contre-Réforme:

·      La liturgie, c'est strictement faire selon ce qui est écrit dans les livres: rubriques établies par Rome.

·      La liturgie est conçue comme un spectacle, une cérémonie. Grandes églises. Ornements richement décorés qu'on multiplie.

·      La prédication (après la messe) et la communion se détachent complètement de la Messe et deviennent pratiques de dévotion.

·      L'Oraison devient de plus en plus le chemin privilégié des fidèles plus fervents : 

1. étapes du chemin spirituel des commençants, progressants et parfaits, mais très éloignés des sources de la liturgie et souvent, de la Bible ;

2. la piété populaire se polarise alors sur la dévotion eucharistique et la dévotion mariale. L'aspect eucharistique se manifeste surtout dans l'éclat avec lequel on célèbre la Fête-Dieu, devenue la grande fête de l'année, et particulièrement la procession où l'on se sent plus libre pour créer. On multiplie d'ailleurs tout au long de l'année les expositions et les saluts du Saint-Sacrement. La dévotion mariale se traduit par des pèlerinages et l'introduction de nouvelles fêtes au calendrier universel : le Saint Rosaire, le Saint Nom de Marie, Notre-Dame du Mont-Carmel et des fêtes locales.

 

 

 

 

 

 

2.5.1. La réforme catholique : 16e – 18e siècles (Quatrième étape)

 

A partir du XVIIe siècle, il y a un retour timide à l'histoire de la liturgie, et cela entraîne le renouveau du XXe siècle. En premier lieu, les grands précurseurs.

En France, Dom Guéranger. Restauration de la vie monastique à l'Abbaye de Solesmes en 1833. Il élabore et influence une reprise de la liturgie romaine, une imprégnation, une sorte d'intelligence nouvelle qui donneront leur fruit au début du XXe siècle. Son œuvre majeure: L'Année liturgique, qui a eu un rayonnement extraordinaire dans le peuple de Dieu. 

            Ces intuitions ont été reprises par Dom Lambert Beauduin (1873-1960), moine de l'Abbaye du Mont-César, en Belgique. Celui-ci est considéré aujourd'hui comme le grand initiateur de la liturgie, le père du renouveau. On s'accorde en général à fixer en 1909 la naissance du mouvement liturgique.

Dom Lambert Beauduin comprend que la liturgie est la catéchèse fondamentale à la dévotion chrétienne, capable de stimuler et nourrir la vie spirituelle. Il avait été admirablement préparé par l'influence décisive de Dom Marmion, son professeur, durant le séjour de celui-ci au Mont-César. Dom Lambert considère Dom Colomba Marmion comme le théologien de la liturgie, titre qui lui convient à la suite de ses trois livres qui ont influencé et préparé les voies de la spiritualité vers une grande unification entre la liturgie et la vie spirituelle: Le Christ, vie de l'âme, Le Christ dans ses mystères, et Le Christ, idéal du moine.

            Dom Lambert Beauduin cependant, pousse plus loin la réflexion, aidé par sa grande érudition et de nombreux disciples. Il parlait de la nécessité de « démocratiser la liturgie », c'est à dire d'en faire l'affaire de tout le peuple. Au Congrès de Malines, en 1909, il présente la liturgie comme la véritable prière de l'Église, réalisant l'unité entre le prêtre et le peuple, et le moyen privilégié de l'annonce de la foi de l'Église. Les décisions qu'il proposa furent acceptées à l'unanimité. : multiplier les traductions en langue vernaculaire, des textes de la messe et des vêpres du dimanche, axer toute la piété sur la liturgie, former les choristes. Il fonde le monastère de Chevetogne dans un but d'œcuménisme qui le rapproche des Églises orthodoxes. A travers beaucoup de contradictions et d'épreuves, il prépare les voies décisives du Concile Vatican II, qu'il ne connaîtra pas.  Il y a un lien absolument vital entre le retour à la liturgie et l'œcuménisme.

La caractéristique la plus frappante de ce renouveau liturgique d'avant le Concile est son réalisme. On tient compte du peuple réel, des paroisses réelles et des prêtres comme ils sont. L'initiative la plus marquante a été le Missel de Dom Lefebvre, latin-français. Des millions d'exemplaires de ces Missels ont contribué de manière décisive à faire comprendre la liturgie de la messe et sa célébration communautaire. 

           

 

2.5.2. Le renouveau liturgique : 19e – 20e siècles (Cinquième étape)

 

Cependant, dans l'Église, c'est la réforme demandée et favorisée par deux grands Papes qui réaliseront les désirs de tous ceux qui souhaitent un renouveau.

            Pie X, avait été un disciple ardent du mouvement liturgique. Devenu Pape, il disait souvent: « Il ne faut ni chanter, ni prier durant la messe; il faut chanter et prier la messe ». Et dans son Motu proprio du 22 novembre 1903, il réclame : « la participation active aux mystères et la prière officielle et solennelle de l'Église ».

·      1905, Restauration de la Communion fréquente, dans l'acte de l'assistance de la messe.

·      1910, Décret sur l'âge de la première communion.

·      1912, Décret autorisant les catholiques de tous rites à communier dans un autre rite et restauration des Rites: Bréviaire et livres liturgiques, des lectures bibliques quotidiennes. Réforme du calendrier liturgique.

·      1913, Décret développant un programme complet de Réforme liturgique. Quand Pie X a publié le nouveau bréviaire, il disait déjà: Ce n'est qu'un début... La guerre a cependant stoppé plusieurs de ces initiatives.

            Pie XII, avec l'encyclique Mediator Dei (1947) déclenche un très grand événement. C'est la première encyclique doctrinale d'un Pape sur la Liturgie, qui tente une synthèse théologique. C'est encore imparfait, car la place centrale du Mystère pascal n'est pas située. Mais ce qui est nouveau c'est l'affirmation que la liturgie est source de la piété. Lors d'un Congrès liturgique à Assise en 1956, il exprimait sa très forte approbation pour le mouvement liturgique : « Le mouvement liturgique est apparu comme un signe des dispositions providentielles de Dieu sur le temps présent, comme un passage du Saint Esprit dans son Église, pour rapprocher davantage les hommes des mystères de la foi et des richesses de la grâce, qui découlent de la participation active des fidèles à la vie liturgique ».

·      Le 9 février 1951, restauration de la Vigile pascale, et en 1955, restauration de la Semaine Sainte.

Entre les Papes Pie X et Pie XII, il faut situer l'apport d'un grand liturgiste allemand, Dom Oto Casel (1886-1948), moine de l'Abbaye de Maria Laach. Il fut trente ans chapelain des bénédictines. Un grand contemplatif et celui qui a compris d'une manière intuitive et décisive le sens du mystère liturgique. Son livre fondamental est Le mystère du Culte dans le Christianisme. Ce livre a eu une grande influence de son vivant, même s'il a suscité beaucoup de controverses. Le Concile, dans la Constitution sur la Liturgie, dans sa partie principale, reprend les expressions de Dom Casel et est beaucoup plus proche de lui que de l'encyclique précédente de Pie XII, Mediator Dei.

            C'est tout le travail accompli par les savants et les pasteurs qui permit au schéma sur la Liturgie d'être le premier prêt à être soumis à la discussion lors du Concile (1960-1965). Le 4 décembre 1963, la Constitution était promulguée par Paul VI. Cette Constitution sur la Liturgie annonce une ère de renouveau liturgique pour toute l'Église et en reste la charte. Depuis des siècles, l'Église n'avait pu réalisé une évolution aussi importante en matière de liturgie. Cette Constitution est en fait le résultat de travaux et de recherches de plus d'un siècle. 

            Ce regard sur les étapes de l'intelligence de la Liturgie nous permet de voir que nous vivons à une époque qui a été une redécouverte du mystère liturgique dans sa plénitude et sa vérité. Le Mystère liturgique est vraiment le sommet de la vie de l'Église et le sommet de l'expérience chrétienne et la mise en œuvre de la foi. C'est le Mystère pascal qui en est le cœur.

 

 

 

CHAPITRE III

LA CÉLÉBRATION

 

La célébration est partie intégrante de la vie humaine en général. Les évènements significatifs pour l’expérience humaine se distinguent habituellement par une célébration (fête). Plusieurs aspects de la vie individuelle, familiale, sociale et religieuse des hommes et des femmes appartenant à toutes cultures, religions, milieux et niveaux sociaux sont celébrés. Toute véritable célébration commence toujours par une convocation et comprend une réunion. Ceux que certains liens unissent (parents, amis, connaissances) se réunissent pour célébrer. 

Cela n’est pas différent dans le domaine religieux. C’est exactement ce que nous faisons. Nous aussi nous nous réunissons pour célébrer pleinement notre rencontre avec Dieu dans l’œuvre du salut. Dieu, qui s’est révélé au peuple de l’Ancien Testament, qui a parlé par la bouche des prophètes, se manifeste de manière définitive en Jésus Christ. C’est en Lui que le projet de Dieu se réalise définitivement, et son Mystère pascal est le centre de l’histoire du salut. C’est par l’action du Saint- Esprit que nous célébrons dans la liturgie les évènements de notre vie qui s’insèrent dans le Mystère pascal du Christ. 

Il est donc évident pour nous qu’au cours de l’assemblée liturgique nous célébrons avec toute notre vie, dans toutes ses dimensions, ce que nous possédons de plus sacré: notre rencontre avec le Seigneur de la Vie; et que, pour bien célébrer cette rencontre, la Sainte Mère Église a organisé dans le Temps liturgique les différents aspects de l’unique Mystère pascal. Alors, comment la célébrons-nous? Comment a lieu l’acte célébratif? Qu’est-ce qui nous frappe dans l’espace célébratif? Nous contemplerons la liturgie en tant qu’action symbolique, dans son sens le plus complet. Nous réfléchirons à la beauté de tout l’acte célébratif, depuis l’assemblée réunie jusqu’à la petite flamme du cierge qui brûle et nous renvoie au plus profond du mystère de Dieu. 

 

 

3.1. Les éléments de la célébration 

 

Il y a dans la célébration des éléments communs que nous pouvons grouper ainsi: « signes et symboles, paroles et actions, chant et musique, saintes images ». Les signes et les symboles occupent une place très importante dans la vie des hommes. C’est par leur truchement que l’être humain exprime des réalités qu’il ne serait pas capable d’exprimer ou de communiquer autrement. Nous pouvons définir le signe comme « quelque chose que nous voyons et qui nous amène à connaître ce que nous ne voyons pas, comme, par exemple, dans la fumée, l’existence du feu, dans les empreintes de pas, le passage d’un animal »[4]. Tandis que « les symboles renferment la réalité de ce qu’ils signifient, ils la rendent présente et nous mettent en rapport avec elle (l’offre – signe d’amour). Tout symbole est un signe, mais tout signe n’est pas un symbole »[5].

Le symbole est, dans la liturgie, le langage par excellence - le langage du mystère. Le symbole renvoie toujours au-delà de lui-même. Le Christ lui-même a choisi les signes visibles employés par la liturgie pour signifier les réalités divines invisibles » (SC, n° 33). Ils nous invitent à aller au delà de ce que nous pouvons voir, entendre, sentir et savourer, en favorisant notre communication avec Dieu et en rendant réel ce qu’ils signifient. Les symboles sont des réalités créées qui « peuvent devenir le lieu d’expression de l’action de Dieu qui sanctifie les hommes, et de l’action des hommes qui rendent leur culte à Dieu » (CEC, n° 1148). 

Le Catéchisme de l’Église Catolique nous affirme encore que (CEC, 1189):
« La célébration liturgique comporte des signes et des symboles qui se réfèrent à la création (lumière, eau, feu), à la vie humaine (laver, oindre, rompre le pain) et à l’histoire du salut (les rites de la Pâque). Insérés dans le monde de la foi et assumés par la force de l’Esprit Saint, ces éléments cosmiques, ces rites humains, ces gestes du souvenir de Dieu deviennent porteurs de l’action salvatrice et sanctificatrice du Christ ». 

Comme nous le voyons, les symboles nous communiquent la vérité ineffable de Dieu que nous n’arrivons pas à traduire en paroles, parce que le mystère que nous célébrons doit être vécu, et non expliqué. Cependant, la catéchèse mystagogique des sacrements, en permettant un retour sur l’expérience vécue, n’exlue pas une certaine explication des symboles, ainsi que les Pères de l’Église nous en ont témoigné. 

Sans doute, les actions symboliques sont déjà, par elles-mêmes, un langage. Au delà des symboles et des signes, la Parole est un autre élément important dans la liturgie, parce que Dieu lui-même nous communique son amour lorsque sa parole est proclamée au cours de la célébration liturgique. SC nous affirme que le Christ est présent « dans sa parole, car c’est lui qui parle tandis qu’on lit dans l’Église les Saintes Écritures » (SC, n° 7). 

Finalement, les paroles et les actions liturgiques sont inséparables et constituent les sacrements, moyennant lesquels le Saint-Esprit réalise aussi les « merveilles » de Dieu annoncées par la Parole : il rend présent et communique l’œuvre du Père accomplie par le Fils Bien-aimé (cf. CEC, n° 1155). 

Portons maintenant notre réflexion sur le chant et la musique en tant qu’éléments constitutifs, eux aussi, de l’action célébratrice. À ce sujet, le Catéchisme nous dit (CEC, 1157): 

« Le chant et la musique remplissent leur fonction de signes d’une manière d’autant plus significative qu’ils sont " en connexion plus étroite avec l’action liturgique " (SC, n° 112), selon trois critères principaux : la beauté expressive de la prière, la participation unanime de l’assemblée aux moments prévus et le caractère solennel de la célébration. Ils participent ainsi à la finalité des paroles et des actions liturgiques : la gloire de Dieu et la sanctification des fidèles ». 

La musique insérée dans l’espace liturgique nous aide à pénétrer le mystère célébré. À ce propos, la Présentation Générale de la Liturgie des Heures nous dit: « le chant ne peut donc être tenu pour un ornement surajouté comme du dehors de la prière ; bien plutôt il jaillit des profondeurs de l’âme qui prie et qui loue Dieu »  (PGLH, n° 270). Au moyen de la musique, nous nous sentons accueillis par Dieu, et cela nous permet de faire ce que nous demande le Psaume 149,1: « Chantez au Seigneur un cantique nouveau, que résonne sa louange dans l’assemblée des fidèles ». 

Finalement, le Catéchisme nous présente les saintes images qui, associées à la méditation de la Parole de Dieu et au chant, réveillent et nourissent notre foi dans le mystère du Christ : « À travers l’icône du Christ et de ses œuvres de salut, c’est Lui que nous adorons. A travers les saintes images de la sainte Mère de Dieu, des anges et des saints, nous vénérons les personnes qui y sont représentées » (CEC, n° 1192). 

 

 

3.2. L’espace de la célébration

 

L’espace de la célébration est aussi une réalité symbolique qui nous aide à percevoir la présence amoureuse de Dieu dans la célébration de la liturgie divine. L’espace de la célébration en lui-même doit nous communiquer cette présence et nous inviter au recueillement et à la prière. Les emplacements les plus importants de la célébration liturgique sont: l’autel, la table de la Parole (l’ambon) et le siège de présidence. 

L’autel est le centre de l’église, le lieu du sacrifice et la table sur laquelle nous sommes invités à prendre part au banquet pascal. La Présentation Générale du Missel Romain affirme que:  « L ́autel, où le sacrifice de la croix est rendu présent sous les signes sacramentels, est aussi la table du Seigneur à laquelle, dans la messe, le peuple de Dieu est invité à participer; il est aussi le centre de l ́action de grâce qui s’accomplit pleinement par l ́Eucharistie » (PGMR, n° 296). 

La table de la Parole (l’ambon) est le lieu approprié pour la proclamation de la Parole de Dieu, qui évoque la présence vivante du Seigneur parlant à son peuple. 

Le siège de présidence symbolise la fonction du prêtre comme président de l’assemblée et de guide de la prière. Ainsi précise la PGMR, n° 310: « Le siège du prêtre célébrant doit être le signe de la fonction de celui qui préside l ́assemblée et dirige sa prière ». 

En d’autres termes, comme nous l’avons déjà dit, le siège présidentiel mis en évidence évoque la présence invisible du Christ, qui préside la liturgie en la personne du ministre. 

L’autre lieu, noble et sacré, de l’église est le tabernacle, où repose la réserve du Saint Sacrement de l’autel, lieu qui permet l’adoration du Seigneur, qui y est réellement présent (CEC, n° 1182-1184).  Il est aussi des signes importants, tels que la croix et les saintes images, qui nous aident à fixer en notre mémoire les mystères sacrés, et puis à les vivre. Et encore les livres liturgiques, les vases sacrés, les ornements, les objets sacrés, la lumière, les fleurs... 

 

 

CHAPITRE IV

LA COMMUNICATION DANS LA LITURGIE

 

Si nous admettons que la liturgie « est la source et le sommet de la vie chrétienne », et qu’elle doit être vécue par tous d’une manière « consciente, active et fructueuse », il nous faut vraiment la comprendre comme étant un processus de communication dont l’efficacité nous mène à la rencontre du Christ (cf. SC, n° 10 et 11). 

La liturgie qui ne nous communique pas la beauté de l’amour de Dieu ne nous transforme pas et ne nous rend pas aptes au témoignage prophétique que nous avons à donner au monde. Il nous est donc nécessaire de vivre cette rencontre en sachant qui nous rencontrons, pourquoi nous le rencontrons, comment nous le rencontrons et où nous le rencontrons. Pour cela, il ne suffit pas que nous le rencontrions sur le plan intellectuel ; il faut que le Saint-Esprit agisse en notre faveur pour que notre rencontre soit un moment intense et produise des fruits. Comme nous l’avons déjà dit, la liturgie est le dialogue amoureux de Dieu avec son peuple par l’entremise de Jésus Christ.

La liturgie est en elle-même communication. Elle est l’art de la rencontre avec le Père, par le Fils, dans le Saint-Esprit, dans la communauté Eglise. Dans ce processus de communication, le Christ est l’émetteur – « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, écoutez- le », nous dit le Père; il est le récepteur de la communication de Dieu avec l’humanité, et de celle-ci avec Dieu – « Nul ne vient au Père que par moi » (Jn 14, 6) , nous dit-il. Il est aussi le canal, car il se présente lui-même ainsi: « Je suis le chemin, la vérité et la vie » (Jn 14, 6). 

Dans la liturgie, la communication doit favoriser la communion par la participation au Mystère pascal. Dans la note précédente, nous avons affirmé qu’« une célébration sacramentelle est tissée de signes et de symboles » (cf. CEC, n° 1145), et que le langage de la liturgie, un symbole en soi, inclut aussi d’autres symboles et actions symboliques. 

La communication s’effectue dans la liturgie par différents codes : des gestes et des postures (marcher, s’incliner, manger, boire, parler, asperger, se lever, s’agenouiller), des signes (le pain, le vin, le calice, l’eau, le feu, le livre, les vêtements, l’autel, le crucifix), et par les éléments du milieu (l’art et l’architecture, la couleur et la texture, la lumière et l’ombre, le son et le silence). Tout est important dans la liturgie quand il s’agit de communication. Il faut que ce que nous faisons, ce que nous pensons, ce que nous sentons nous portent à une véritable communication avec Dieu. Pourquoi est-ce que je fais cela? Qu’est-ce que cela m’apporte? Comment est-ce que je le vis ? 

En toute chose, il nous faut nous configurer au Christ et dépasser la différence entre la façon d’agir du Christ et la nôtre, entre sa vie et notre vie, entre son sacrifice d’adoration et le nôtre, en sorte qu’il n’existe qu’une seule façon d’agir, la sienne, qui soit en même temps la nôtre. Nous pourrons ainsi affirmer avec Saint Paul: « Je suis crucifié avec le Christ: ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi » (Ga 2, 20). 

 

 

4. 1. Le langage liturgique

 

L’expression corporelle est importante dans la liturgie. Elle doit nous aider à manifester la beauté et le mystère qu’elle renferme. Tout le corps parle. Il est important de soigner notre posture: de regarder les personnes et de créer avec elles un lien. Le regard doit être serein, accueillant, assuré, joyeux, confiant. La posture doit être droite, ferme. Le visage doit être expressif. Il doit y avoir une syntonie entre la parole, le sentiment et l’expression faciale. Les gestes parlent souvent plus fort que les paroles. Nous devons comprendre ce que nous faisons afin d’en valoriser la signification. Il est important qu’il y ait une unité quand il s’agit des gestes de l’assemblée, ce qui exige de nous un détachement, un dépassement de nos goûts personnels. 

Avez-vous remarqué que c’est tout notre corps qui est engagé dans la célébration ? Voyons le signification de chacun de nos gestes: 

Incliner la tête: devant l’autel et le célébrant, pendant la célébration, en signe de respect et de révérence; en entendant les noms de Jésus, de Marie et du Saint du jour; pour recevoir la bénédiction. 

 Lever les yeux : Jésus, lors des moments solennels, levait les yeux au ciel, exprimant ainsi sa communion intime avec le Père. L’homme est appelé à contempler Dieu face à face, et la liturgie est un avant-goût de la contemplation. 

Baiser ou accolade: signe de révérence, de communion, d’amour. Expression d’affection envers le Christ présent à l’autel, l’Evangile, la personne du chrétien, les symboles liturgiques. 

Silence: de grande valeur dans la prière. Il nous aide à nous concentrer afin d’approfondir les mystères de la foi : « Le Seigneur parle dans le silence du cœur ». 

Génuflexion: acte d’adoration devant le Saint Sacrement et la Croix ; lors de l’adoration de la Sainte Croix. 

Prostration: les orientaux se prostraient pour prier, le visage à terre ; Jésus l’a fait au Jardin des Oliviers. C’est aujourd’hui l’attitude de celui qui se consacre à Dieu, comme lors de l’ordination de l’évêque, des prêtres et des diacres et les vœux perpétuels pour les religieux. Cela signifie mourir pour le monde et renaître pour Dieu, recevoir une nouvelle vie et une nouvelle mission. 

Se lever, se tenir debout: promptitude, réponse, disposition à l’action. C’est la position du ressuscité. 

Être assis: accueil et méditation. 

S’agenouiller: respect, humilité, repentir, adoration. 

Signe de croix: c’est une profession de foi baptismale, trinitaire, une identification au Christ Crucifié.

Se frapper la poitrine: signe de repentir et désir de conversion. Se fait lors de la préparation pénitentielle, au début de la messe. 

Triple signe de croix: le signe de croix sur la tête rappelle que l’Évangile doit être compris, étudié, connu; sur les lèvres, que l’Evangile doit être proclamé, annoncé (mission de tout chrétien); sur la poitrine, à la hauteur du coeur, que l’Évangile doit surtout être vécu, prêché et manifesté par tous ceux qui croient que le Christ est ressuscité. 

Les mains levées: attitude de celui qui prie. Attitude qui signifie la supplication, la remise à Dieu. 

Les mains jointes: signifient le recueillement intérieur, la foi, la supplication, la confiance, la remise de sa vie. C’est une attitude de piété. 

Les mains unies: recueillement, dévotion, prière . 

Se donner les mains: salutation fraternelle, unité, engagement sacré. 

Procession d’entrée: rappelle la marche du peuple de Dieu en route vers la Terre promise, réuni pour célébrer sa marche et se nourrir du Pain du Ciel. 

Procession de l’É́vangéliaire: symbolise Jésus qui se lève dans l’assemblée pour diriger sa Parole aux fidèles, qui le saluent, l’acclament, écoutent attentivement sa Parole. 

Procession des offrandes: L’assemblée s’offre au Père, en union avec le Christ. 

Procession de Communion: le Peuple de Dieu qui se nourrit du Pain de Vie afin de poursuivre sa route vers Dieu. 

 

 

 

 

 

4.2. Les vêtements liturgiques

 

Les vêtements liturgiques sont des moyens de communication de la vie liturgique; ils créent un climat de joie et de fête pour célébrer le salut que nous offre le Christ. 

La couleur des vêtements liturgiques s’accorde avec le temps liturgique et a une signification propre : 

Le vert: symbolise l’espérance que tout chrétien doit avoir. On l’utilise aux messes du Temps Ordinaire. 

Le blanc: symbolise la joie chrétienne et le Christ vivant. On l’utilise aux messes de Noël, de Pâques, de la Fête-Dieu, aux fêtes de Notre Seigneur et de Notre-Dame, aux fêtes des Saints, à l’exception des martyrs, alors qu’on utilise le rouge, etc. Lors des grandes solennités, on peut remplacer le blanc par le jaune, ou plutôt le doré. 

Le rouge: symbolise le feu purificateur, le sang et le martyre. On l’emploie aux messes de la Pentecôte et des saints martyrs. 

Le violet: symbolise la préparation, la pénitence, la conversion. On l’utilise lors des messes du Carême et de l’Avent. Ici en Haïti, on l’utilise aussi pour les funérailles.

Le rose: couleur intermédiaire entre le violet (du Carême et de l’Avent) et le blanc (de Pâques et de Noël), que l’on utilise exclusivement le troisième dimanche de l’Avent (dimanche de Gaudete) et le quatrième dimanche du Carême (dimanche de Laetare). 

Le bleu: en désuétude, utilisé aux messes de Notre-Dame; symbolise son Manteau bleu. On l’utilise aujourd’hui à Lyon.

Le noir: également en désuétude; symbolise la mort ; utilisé au cours des funérailles, on le remplace par le violet. 

 

VÊTEMENTS LITURGIQUES LES PLUS PORTÉS OU UTILISÉS

Aube: vêtement liturgique blanc. Longue tunique blanche, attachée à la ceinture par un épais cordon, appelé cordon d’aube. 

 

Cordon d’Aube: cordon avec lequel le prêtre serre l’aube à la ceinture. 

 

Chasuble: manteau revêtu par les prêtres et les évêques, symbole du joug suave du Christ. À l’usage exclusif du prêtre, se met par-dessus l’aube et l’étole. Le diacre porte la dalmatique sur l’aube et l’étole. 

 

Étole: bande d’étoffe qui symbolise le service sacerdotal, et parement liturgique propre au prêtre. Elle est presque totalement recouverte par la chasuble.
L’étole du diacre se porte différemment de celle du prêtre: en diagonale, de l’épaule gauche à la hanche droite. 

 

Soutane: tunique noire, long vêtement porté par les clercs séculiers qui ne possèdent pas d’habit propre. Elle est noire, ornée de 33 boutons sur le devant et de 5 à chaque manche, et descend jusqu’aux talons. 

 

Surplis: vêtement liturgique qui se porte pendant les cérémonies religieuses; en général de couleur blanche, descendant jusqu’au dessus des genoux et dont les manches sont de bonne ampleur. 

Amict: voile blanc que le prêtre enfile par la tête et dont il se couvre les épaules lorsqu’il se paremente pour la célébration liturgique. On le met avant de revêtir l’aube. 

 

Dalmatique: vêtement propre aux diacres. 

 

Voile huméral: tissu dont on recouvre les épaules du prêtre pendant la bénédiction ou la translation du Saint Sacrement. On s’en sert aussi pour tenir les reliques ou les saintes huiles. Le voile huméral est un parement carré que l’on met sur les épaules. 

 

Pluvial ou Cape d’Aspergès: parement liturgique revêtu surtout à l’extérieur, pendant les processions, par le prêtre qui porte le Saint-Sacrement, mais aussi dans l’église, lors de bénédictions et aspersions d’eau bénite, de mariages sans messe et d’offices divins solennels. 

 

 

 

Les Insignes épiscopales sont des objets qui symbolisent le pouvoir, la juridiction, la prudence, l’amour et la fidélité de l’évêque à l’Église et à ceux qui lui ont été confiés: 

 

 

LES INSIGNES ÉPISCOPALES

Le Pallium: sorte de col en laine blanche, d’environ 5 cm. de largeur qui compte deux appendices, l’un devant, l’autre derrière, le long desquels se trouvent brodées 6 croix. Il exprime l’unité de l’évêque avec le successeur de Pierre. 

La crosse: bâton ou houlette utilisé par les évêques. Symbole du rôle du Bon Pasteur, qui garde et mène avec sollicitude le troupeau qui lui a été confié par le Saint-Esprit. 

 

 

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La calotte : portée par l'évêque, du latin calva « crâne » ou « boîte crânienne », elle est apparue dans l’Église entre le XIIIe et le XIVe siècle. Signe d’humilité, elle exprime également la dignité de sa consécration et son appartenance à la hiérarchie.

 

La mitre: insigne dont les évêques se couvrent la tête à certains moments des célébrations liturgiques, pour rappeler qu’ils tiennent leur pouvoir de Dieu, qui leur accorde cette “couronne de justice”.

 

La croix pectorale: elle rappelle à l’évêque qu’il est le représentant de Jésus Christ et qu’il a pour mission d’annoncer le Mystère de la mort et de la résurrection du Christ.

 

L’anneau: insigne portée en permanence par l’évêque pour lui 

rappeler l’union nuptiale et la fidélité qu’il doit à l’Eglise, son épouse. 

 

 

 

Les Linges d’autel sont de petits tissus ou des objets enveloppés de tissu dont on se sert avec les vases sacrés. 



LES LINGES D’AUTEL

Corporal: tissu carré de lin brodé d’une croix au centre. Sorte de serviette sur laquelle on dépose les vases sacrés pendant la consécration. 

Purificatoire:. tissu rectangulaire avec lequel le prêtre, après la communion, nettoie le calice, et le cas échéant s’essuie la bouche et les doigts. 

Manuterge: petite serviette, posée sur la crédence, avec laquelle le prêtre s’essuie les mains après les avoir lavées. Utilisée pour se purifier les mains. 

Pale: couverture carrée, revêtue de tissu, servant à recouvrir la patène et le calice. 

 

Conopée: rideau placé devant le tabernacle, ou voile qui couvre la porte du tabernacle, dont la couleur change selon le temps liturgique. En certains endroits, on appelle aussi conopée le voile du ciboire. 

Voile du ciboire: petit linge de soie blanche qui recouvre le ciboire en signe de respect pour l’Eucharistie 

La nappe : longue band de toile recouvrant l’autel et retombant souvent de chaque côté. 

Bourse: Elle est formée de deux carrés en carton mesurant environ vingt centimètres de côté, revêtus à l'extérieur d'un tissu de soie identique à celui de la chasuble - en fonction de la couleur liturgique du jour – et, à l'intérieur, d'une doublure assortie. Elle sert à contenir le corporal et est placée sur le voile du calice. 

 

 

4.3. Les objets liturgiques

 

Les objets liturgiques sont des objets qui servent au culte divin et à l’usage sacré, raison pour laquelle ils ne peuvent être maniés avec indifférence, et encore moins de façon irrespectueuse. Les objets utilisés pour le culte divin doivent être faits de matériaux nobles, et ornés de manière à invoquer la richesse des mystères qu’ils servent. SC au n° 122 décrit ainsi l’importance et la dignité des objets utilisés dans la liturgie : 

 

Parmi les plus nobles activités de l’esprit humain, on compte à très bon droit les beaux-arts, mais surtout l’art religieux et ce qui en est le sommet, l’art sacré. Par nature, ils visent à exprimer de quelque façon dans les œuvres humaines la beauté infinie de Dieu, et ils se consacrent d’autant plus à accroître sa louange et sa gloire qu’ils n’ont pas d’autre propos que de contribuer le plus possible, par leurs œuvres, à tourner les âmes humaines vers Dieu. (...). L’Église a veillé avec un zèle particulier à ce que les objets sacrés contribuent de façon digne et belle à l’éclat du culte, tout en admettant, soit dans les matériaux, soit dans les formes, soit dans la décoration, les changements introduits au cours des âges par les progrès de la technique. 

 

 

 

 

OBJETS LITURGIQUES LES PLUS UTILISÉS

 

Le Missel: prières sacerdotales propres à chaque jour. 

 

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L’Evangéliaire: livre qui contient les Saints Évangiles. Il est porté par le diacre au cours de la procession d’entrée. 

 

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Le Lectionnaire: le lectionnaire est le livre utilisé pour faire les lectures, dans la forme ordinaire. Les lectionnaires contiennent les lectures, les séquences, les psaumes, l’acclamation à l’évangile, et encore l’évangile lui-même. Parmi les différents lectionnaires, signalons: 

·      le lectionnaire dominical ;

·      le lectionnaire hebdomadaire (en deux volumes);  

·      le lectionnaire sanctoral;
 le lectionnaire pontifical romain, 

et encore les lectionnaires pour la liturgie des heures. On place toujours les lectionnaires sur l’ambon. 

Cérémonial des évêques: livre qui contient les rubriques de toutes les célébrations de caractère épiscopal. 

Pontifical romain: livre qui contient les textes des célébrations présidées par l’évêque, telles que la confirmation, les ordinations, etc. 

 

Rituels: On appelle rituels les livres qui contiennent les rites des sacrements et des sacramentaux, cités ci-dessous: 

·         Rituel du baptême des enfants; 

·         Rituel des obsèques; 

·         Rituel de l’initiation chrétienne des adultes; 

·         Rituel de l’onction des malades; 

·         Rituel de la communion sacrée et du culte 

eucharistique hors de la Messe; 

·         Rituel de la pénitence; 

·         Rituel de la dédicace ;

·         Rituel des bénédictions; 

·         Rituel du mariage; 

·         Rituel de l’exorcisme et autres supplications. 

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Ostensoire: c’est l’objet qui permet d’exposer le Saint-Sacrement à l’adoration des fidèles et de donner la bénédiction eucharistique. Il se compose d’une partie centrale fixe appelée custode, qui contient une partie mobile, circulaire et transparente, la lunette, où l’on place l’hostie consacrée pour l’adoration. 

 

Plateau de Communion: petit plat, en général muni d’une poignée, placé pendant la communion sous le menton du communiant, afin d’éviter qu’une particule des espèces sacrées puisse se perdre. 

Custode: petit étui, généralement en métal, dans lequel est placée l’Eucharistie à apporter aux malades. 

Croix: croix à longue poignée, utilisée devant les processions ; un crucifix plus petit est posé sur l’autel pendant la Messe. 

 

Chandeliers de procession: supports pour les cierges utilisés pour les processions liturgiques. 

 

Encensoir: objet utilisé pour encenser. On y place l’encens, une résine aromatique, sur une braise. L’encens, qui symbolise la prière que l’on dirige à Dieu, est déposé par le prêtre dans l’encensoir, et conservé dans la Navette, petit vase qui sert à le transporter. 

Navette: vase dans lequel on met l’encens avant de le brûler dans l’encensoir. Sa forme rappelle une nef, d’où son nom. 

 

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Calice: coupe ou l’on met le vin qui va être consacré. C’est le plus digne des vases sacrés. On l’utilise pour transporter le Précieux Sang de Jésus Christ. 

 

Burettes: récipients où l’on met l’eau et le vin pour la célébration de la Messe. 

 

 

Ciboire: récipient où se conservent les hosties, et qui sert à les distribuer aux fidèles qui vont communier.
On appelle pyxide une petite boîte à couvercle contenant l’hostie que le prêtre porte aux malades. 

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Patène: assiette où l’on place la grande Hostie. Petite assiette en métal utilisée pour la consécration du pain. On peut aussi s’en servir lors de la distribution de la communion, pour recueillir les particules consacrées qui pourraient tomber. 

Vases d’ablutions ou aiguières: ensemble de cruche et bassine qui permettent au prêtre de se laver les mains à la fin de la présentation des dons. Un linge, le manuterge, lui permet de les essuyer. La cruche est aussi utilisée pour les purifications liturgiques. 

Bénitier: vase liturgique destiné à contenir l’eau bénite. 

Hyssope: sert à asperger le peuple, ou un objet, avec de l’eau bénite. 

 

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Tabernacle: lieu où l’on conserve les réserves eucharistiques non consommées pendant la célébration. Il est orné, fermé à clef, et une lampe allumée indique toujours la présence du Saint- Sacrement. 

 

Chandeliers: servent de support aux cierges. On les met sur l’autel au nombre de deux, quatre ou six, sept si c’est un évêque qui célèbre. 

 

Cierge Pascal: grand cierge, bénit au cours de la Veillée Pascale, le Samedi Saint. On l‘allume aux messes célébrées pendant le Temps Pascal, et aussi toute l’année lors des baptêmes et des funérailles. Il représente la lumière du Christ, lumière du monde. On y lit ALPHA et OMEGA (Le Christ: commencement et fin) et les chiffres correspondants à l’année en cours. 

Clochettes: contient de petites cloches. Elles annoncent la consécration. 

 

 

Reliquaire: objet semblable à l’ostensoir, utilisé pour exposer les reliques des saints à la vénération des fidèles. 

 

Hostie et particules: Pain azime (non fermenté) en forme de cercle. La plus grande est appelée hostie, consacrée et consommée par le prêtre pendant la messe. Les plus petites, appelées particules, sont consacrées par le prêtre et distribuées aux fidèles. Celles qui ne sont pas consommées sont conservées jusqu’à la messe suivante dans le tabernacle, pour la communion aux malades ou pour l’adoration du Saint Sacrement par les fidèles. On les appelle la réserve eucharistique. 

Pierre d’autel: la pierre de l’autel où sont placées les reliques des Saints. 

 

 

 

MOBILIERS LITURGIQUES

Autel: table pour la cène eucharistique.

 

Ambon: l’emplacement surélevé où l’on proclame la Parole de Dieu. 

 

Crédence: petite table à côté de l’autel, sur laquelle on place les objets du culte. 

 

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Siège du président de la célébration: fauteuil au centre du presbytère avec les stalles pour les concélébrants, où s’asseoit le le prêtre dont la fonction est de présider la liturgie. 

 

Agenouilloir: partie inférieure des bancs d’église, qui permet aux fidèles de s’agenouiller.

 

 

Il nous convient de rappeler ce que dit la Constitution sur la liturgie Sacrosanctum Concilium (SC, n° 122) au sujet de la dignité des objets sacrés : « L’Église a veillé avec un zèle particulier à ce que les objets sacrés contribuent de façon digne et belle à l’éclat du culte ». Cela nous donne à penser trois choses qu’il ne faut pas oublier :

1. Les objets liturgiques doivent remplir le rôle auquel ils sont destinés avec dignité. 

2. Les symboles liturgiques cachent et rappellent à la fois le mystère d’un Dieu qui fait Alliance avec nous, qui vient à notre rencontre et nous communique sa propre vie. En matière liturgique, tout doit être valorisé : les gestes, les paroles prononcées, les vêtements liturgiques, le rite sacré en leur simplicité.

 

 

CONCLUSION 

 

La liturgie est fondamentalement pédagogique et éducative. Elle forme et éduque le sujet croyant par tout ce qui la constitue : les gestes, les paroles, les symboles, les rites etc. La liturgie éveille la mémoire, les sens et toutes les facultés humaines afin d’offrir à Dieu une offrande que Dieu lui-même prend plaisir à agréer parce qu’il s’agit d’un culte véritable que le peuple chrétien rend à Dieu en élevant et tournant son cœur vers lui. À la fin de ce parcours, retenons trois choses de la liturgie :

1. La liturgie est avant tout une réalité « mystique » c’est-à-dire qu’elle nous fait accueillir et célébrer l’action de Dieu lui-même. Dieu agit dans la liturgie, c’est son « œuvre ». La liturgie a donc une dimension transcendantale. Elle n’est pas seulement un agir des croyants puisque Dieu agit dans l’action liturgique de l’Église par le mystère de l’Esprit Saint. 

2. La liturgie est « l’exercice de la fonction sacerdotale de Jésus Christ » telle que la décrit SC 7. La liturgie entretient un rapport spécifique avec la figure du Christ. Le liturge principal est le Christ. C’est son Mystère pascal qui est célébré dans la liturgie et non autre chose. Il est donc présent dans les actions liturgiques de l’Église de manière éminente et irremplaçable.  

3. La liturgie est la véritable prière de l’Église. L’Église ne prie mieux que dans les actions liturgiques. C’est pourquoi la dimension communautaire de la liturgie est fondamentale. La participation active des fidèles est inhérente à la liturgie de l’Église. Si la liturgie réclame donc la dimension communautaire, elle ne l’est pas moins pour la dimension personnelle. Le « nous » de la liturgie ne supprime pas la prégnance du « je » participant véritablement à son action. Il faut donc, considérant tout cela, savoir entrer dans l’intelligence de la liturgie avec, pour ouverture, la charité pastorale, car dans la liturgie, Dieu rejoint son peuple dans son histoire, dans sa culture et non ailleurs. 

 

 



[1] À la fois celui qui fait « part de » et qui a « part à ». 

[2] Cf. François MoogLa participation des laïcs à la charge pastorale, Paris, Desclée de Brouwer, 2010, p. 200-201.

[3] Cf. Abbaye Notre-Dame de Bonne-Espérance, « La liturgie des Heures », https://www.abbaye-echourgnac.org/prier/le-temps-liturgique/la-liturgie-des-heures.html, consulté le 1er décembre 2022.

[4] Cf. José AldazabelVocabulário básica de Liturgia, São Paulo, Paulinas, 1a éd., 2013, p. 358. 

[5] Id.

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