LA QUESTION DU DIMANCHE CHRÉTIEN DANS LE MONDE D'AUJOURD'HUI

Le dimanche chrétien : un problème à résoudre ou une réalité riche et complexe à vivre ?

Une réalité riche parce que le dimanche chrétien fait faire mémoire, célébrer la résurrection du Seigneur, fait faire actualiser le mystère pascal du Christ comme don fait aux croyants. C’est le jour de l’Eucharistie, le jour de l’Église, le jour de l’assemblée dominicale. Jean-Paul II, dans Dies Dominiau numéro 36 souligne que « l'assemblée dominicale est un lieu privilégié d'unité: on y célèbre en effet le sacramentum unitatis qui caractérise profondément l'Église, peuple rassemblé ²par²et ²dans²l'unité du Père, du Fils et de l'Esprit Saint ». Je pourrais multiplier les exemples pour montrer l’épaisseur de la richesse du dimanche, mais je préfère rester là. Malgré cette richesse, le dimanche chrétien reste une réalité complexe à appréhender.
Il est complexe parce que depuis son origine, le dimanche chrétien confronte aux difficultés et aux aléas du temps, à l’histoire, à l’homme et aux mentalités. Il est toujours en tension avec le monde puisque ce qui fonde sa valeur n’est pas encore totalement compris et accepté : le Christ mort et ressuscité. Et cette tension, elle existe même chez les chrétiens. Pourquoi, dans certains milieux, nos églises sont vidées ? Pourquoi, certains catholiques privilégient leur temps de détentes et de retrouvailles familiales au détriment du rassemblement dominical ? Les réponses sont multiples, mais je peux dire que c’est à cause de cette incompréhension du mystère pascal du Christ. Beaucoup n’arrivent pas encore à comprendre que la résurrection du Christ apporte quelque chose à l’humanité. La complexité du dimanche est l’expression même de la complexité de notre foi pascale. On ne comprend pas que dans cette œuvre pascale, Dieu a agi et continue d’agir pour nous. Or, justement, le dimanche chrétien nous met dans cette posture, la posture de reconnaître que la résurrection du Christ nous concerne aujourd’hui. 
Alors, le dimanche chrétien à la fois riche et complexe n’est pas un problème à résoudre, mais un événement à vivre. À chaque époque, on a tendance à proposer des choses, à prendre des mesures pour que ça aille mieux, mais on constate que cela ne fait pas bouger les choses davantage. Le problème du dimanche est ailleurs, il est probablement dans la manière de proposer la foi, dans la manière de faire la catéchèse, dans l’ouverture à de nouvelles manières d’organiser la vie de foi de la communauté, dans la difficulté des hommes d’aujourd’hui à accueillir et à vivre le message de la foi, dans le monde sans Dieu que nous voulons fabriquer, dans l’individualisme, l’indifférence religieuse et le sécularisme mal compris et politisé qui sont en train d’être proposés aux pauvres hommes comme valeurs indéniables. Si je dis que le dimanche chrétien n’est pas un problème à résoudre mais à vivre, je voudrais dire que le dimanche chrétien tel que nous le voyons et le percevons aujourd’hui, demande une démarche de conversion. C’est plutôt une démarche de foi à proposer ou à entreprendre. Une démarche de foi n’est pas un problème à résoudre, selon moi, mais une ouverture, un accueil au don de Dieu à réaliser en toute liberté. On ne peut pas forcer quelqu’un à honorer le dimanche chrétien. Chaque chrétien devrait en toute liberté, puiser dans ce que j’appellerais « l’énergie dominicale » c’est-à-dire l’écoute de la Parole et le pain eucharistique. 
Ceci dit, il faut toujours envisager le dimanche chrétien comme une réalité dynamique et délicate. Il demande toujours des adaptations selon les époques, selon les circonstances pour que la foi puisse y être déployée, proposée et célébrée. Toucher au dimanche chrétien, c’est porter atteinte même au fondement de l’Église : le mystère pascal dont elle est née (SC 5), duquel elle vit continuellement et par lequel elle se manifeste et croit comme « communion », jusqu’à atteindre la mesure de la plénitude du Christ (cf. Ép 4, 13)[1].  Tout déploiement pastoral du dimanche chrétien demande un discernement ecclésial. Cela concerne toute la communauté chrétienne animée, guidée par ses pasteurs. Dans le souci de remédier au problème du dimanche chrétien, on voit parfois des dommages que cela pourrait provoquer quand il n’y a pas trop de discernement ecclésial. Le problème du dimanche chrétien peut briser l’unité au sein d’un même diocèse, d’une même paroisse, d’un même secteur pastoral. Pour moi, la prudence réside dans ce que je viens de dire : ce n’est pas un problème à résoudre, c’est une réalité riche et complexe à vivre. Si le « vivre » prédomine sur le « résoudre », alors on peut chercher à trouver des moyens pour mieux le vivre avec lucidité en discernant les signes des temps et surtout en écoutant ce que l’Esprit Saint veut dire aujourd’hui. 


Père Diesel Phat



[1]Luca Brandolini, « Dimanche », Dictionnaire encyclopédique de la liturgie, t. 1, Belqique, Brepols, 1992, 271-283, p. 277. 

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